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[CRITIQUE] : Anti-Squat


Réalisateur : Nicolas Silhol
Avec : Louise Bourgoin, Samy Belkessa, Antoine Gouy, Sâm Mirhosseini,...
Distributeur : Diaphana Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h35min

Synopsis :
Inès est menacée de se faire expulser de chez elle avec Adam, son fils de 14 ans. A la recherche d’un emploi, elle est prise à l’essai chez Anti-Squat, une société qui loge des personnes dans des bureaux inoccupés pour les protéger contre les squatteurs. Son rôle : recruter les résidents et faire respecter un règlement très strict. Inès est prête à tout pour se faire embaucher et s’en sortir avec Adam. Mais jusqu’où ira-t-elle ?



Critique :


Discrètement mais sûrement, forte de choix qui l'a font explorer toutes les nuances de son jeu d'actrice, capable d'alterner entre comédie et drame avec une facilité absolument déconcertante, Louise Bourgoin détonne, rayonne mais surtout impose sans effort sa marque au sein d'un septième art hexagonal qui, n'ayons pas peur des morts, n'aurait pas été le même sans sa présence lumineuse depuis plus d'une décennie désormais.

Un de ses talents rare, qui peut nous vendre un film et nous pousser à se rendre en salles sur sa seule et unique présence (même pour des séances loin d'être attrayantes sur le papier, et parfois encore plus après vision), autant que de ceux capables de relever les menus défauts d'une écriture et/où d'une mise en scène ne les mettant jamais assez en valeur - voire même les deux.

Copyright Kazak Productions

Forte d'une année 2023 jusqu'ici remarquable (La Montagne, C'est mon homme), elle nous revient en cette rentrée ciné par deux fois, à la fois dans la distribution chorale de la nouvelle comédie dramatique de Thomas Lilti, Un Métier Sérieux, mais aussi et surtout en rôle titre du résolument plus sombre Anti-Squat de Nicolas Silhol, qui creuse encore un peu plus profondément le sillon du thriller social - à la lisière du polar urbain - après son solide Corporate, en s'attaquant cette fois frontalement à la question de la précarité et du mal-logement, de plus en plus criant en France, tout en s'appuyant dès son titre, sur la loi éponyme (la fameuse loi anti-squat, qui durcit les sanctions liées aux squats de locaux et pérennise l'expérimentation d'offres alternatives à l’hébergement d’urgence, utilisant des locaux inoccupés).

On y suit les difficultés d'une mère de famille, Inès, ancienne agent immobilier qui est en passe de se faire expulser de son appartement, avec son fils de 14 ans.
L'espoir renaît cela dit alors qu'elle est prise à l'essai chez Anti-Squat, une société dont l’activité consiste à loger temporairement des locataires dans des lieux/bureaux inoccupés, pour mieux empêcher les squatteurs d'y séjourner.
Bien qu'elle ne puisse emmener avec elle son rejeton, elle s'accroche aux possibilités que lui laisse cet emploi, qui consiste à recruter des résidents temporaires, à qui elle doit faire respecter un règlement très strict, sous peine d'être foutu dehors...

Copyright Kazak Productions

Confrontant de plein fouet son héroïne elle-même au pied du mur, face à une misère humaine ou elle incarne malgré elle et son empathie sincère, la main froide et cynique du profit, tout autant une victime qu'un outil - un chien de garde - pour creuser encore plus profondément l'injustice économique et sociale (là où son fils, dont elle est obligée d'être séparé, affirme peu à peu son engagement social et politique); Nicolas Silhol fait de son nouvel effort un drame tendu et austère façon constat angoissé et angoissant, d'une société contemporaine furieusement cupide et inhumaine, lentement gangrénée par le néoliberalisme.

Une œuvre militante puissante et captivante, dominée de la tête et des épaules par une exceptionnelle Louise Bourgoin, qui capture à merveille le trouble intime et l'ambivalence de son personnage, à la morale totalement écrasée par sa situation précaire.


Jonathan Chevrier