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[CRITIQUE] : Trenque Lauquen Parties 1 & 2


Réalisatrice : Laura Citarella
Avec : Laura Paredes, Juliana Muras, Ezequiel Pierri, Elisa Carricajo, …
Distributeur : Capricci Films
Budget : -
Genre : Drame
Nationalité : Argentin
Durée : 2h09min / 2h13min.

Synopsis :
Une femme disparaît. Deux hommes partent à sa recherche aux alentours de la ville de Trenque Lauquen. Ils l’aiment tous les deux et chacun a ses propres soupçons quant aux raisons de cette disparition. Les circonstances vont cependant se révéler plus étranges que prévues. En deux parties et douze chapitres, « Trenque Lauquen » croise les récits de ses différents personnages et cartographie une ville. De la découverte d’une ancienne correspondance amoureuse dans une bibliothèque à de mystérieuses apparitions près d’un lac, la pampa n’a pas encore révélé tous ses secrets…


Critique :


Une femme disparaît … Cependant, nous ne sommes pas devant un film de Hitchcock mais devant le nouveau puzzle audiovisuel de la réalisatrice argentine Laura Citarella. Une œuvre commencée en 2011 avec Ostende, où nous pouvions suivre une certaine Laura (interprétée par Laura Paredes) dans un hôtel d’une station balnéaire, tout à fait convaincue qu’il existait des mystères à percer parmi les vacanciers. Dix ans plus tard, ce même personnage suit un nouveau chemin de fiction à Trenque Lauquen (autant le titre du film que la ville de l’intrigue, dans la banlieue de Buenos Aires), où des femmes, fictives, adultères, enceintes, scientifiques, mystérieuses (peut-être même tout à la fois) se succèdent dans son besoin de suivre une aventure. Découpé en deux parties, le film nous propose plus de quatre heures d’une odyssée féminine et romanesque. Quand le besoin de fiction est si fort qu’il entraîne un personnage (de fiction) dans les affres du mystère, quitte à s’y perdre.

Copyright Capricci Films

Labyrinthique est un mot fort à propos quand il s’agit de donner un adjectif à Trenque Lauquen. À la fin de la deuxième partie, une émotion étrange se dégage. Celle d’avoir vécu une aventure singulière sans bouger de son siège. Tour à tour enquête, drame, buddy movie, comédie romantique et film psychologique, l'œuvre qu’a composée Laura Citarella ne laisse pas indifférent. Petite ville aux abords de la capitale argentine, le panneau Trenque Lauquen, en forme d’arche, devient un passage vers une autre dimension. Une dimension où les femmes deviennent héroïnes. Elles prennent part à d’étonnantes lettres érotiques cachées à l'intérieur de livres, elles sont des scientifiques, des biologistes ou des journalistes, si intéressantes et puissantes qu’il faut déterrer leurs histoires (souvent oubliées) pour mettre en lumière leurs valeurs et leurs accomplissements.

Le principal enjeu du film est de trouver la vérité au sein des illusions que transmet la fiction. Le film lui-même nous induit en erreur, jouant de sa mise en scène pour former de fausses pistes dans sa narration. Les premiers personnages que l’on nous présente ont tout de détectives en service. Nous découvrons, avec effarement, qu’ils ne se connaissent que depuis quelques minutes. L’un est le petit ami de Laura, l’autre son collègue de travail à qui elle a emprunté (ou bien volé) sa voiture avant de disparaître. La dynamique entre les deux hommes est marquée par une hiérarchie distincte, Rafael (l’homme le plus vieux du duo et le petit-ami de Laura) prend la direction de l’enquête face à l'apathique Ezequiel (dit Chicho) qui tient autant à elle que le premier. « Adios adios, me voy me voy » (adieu adieu, je m’en vais, je m’en vais), ce message mystérieux à l’intention de Chicho, nous plonge dans une narration diablement romanesque. Laura trompait-elle son petit ami avec Chicho ? Qu’à-t-elle à cacher ? Est-elle partie de sa propre volonté ? Que de questions (pour l’instant) sans réponses qui n'intéressera nullement la réalisatrice. Car Trenque Lauquen, tout comme son personnage principal, a pour obsession de raconter une histoire qui n’est pas la sienne.

Copyright Capricci Films

Deux parties, découpées elle-même en chapitre. Le récit n’est cependant pas compartimenté et s’étale parmi les différentes histoires, aidé par la mise en scène. Une musique redondante et diégétique, qui devient par la force des choses extradiégétique. Des points de vue différents, en fonction du personnage mis à l'avant. Des phrases commencées par un personnage et finies par un autre, dans une autre séquence. Des flash-back répétées, avec un autre point de vue pour comprendre l’ensemble. Des histoires dans des histoires (dans des histoires). Labyrinthique on vous a dit ! Trenque Lauquen fait en sorte de garder notre attention intacte. L’obsession des personnages de se nourrir des histoires devient la nôtre également. Il faut toutefois qu’elles soient tronquées ou incomplètes pour que nous (les personnages et les spectateurs) puissions les habiter pleinement, afin qu’elles nous appartiennent. Le mystère demeure tant que la fin est inconnue. Le problème étant que les histoires, contrairement à la fiction que l’on crée, se façonnent difficilement à notre convenance. Et lorsque Laura se retrouve sans histoires à raconter ou à explorer, elle devient un véritable personnage de film (à l’aide du format le plus cinématographique, le 2:35), errant sans but dans un décor qui ne lui apporte que des accessoires pour combler ses besoins primaires. Laura n’est autre qu’un personnage qui n’existe plus dès lors qu’elle admet être une héroïne comme celle dont elle a suivi le destin. Est-elle libre ? C’est une question sans réponse pour le public, jusqu’à la prochaine pièce du puzzle peut-être.


Laura Enjolvy


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