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[CRITIQUE] : Je verrai toujours vos visages


Réalisatrice : Jeanne Herry
Avec : Adèle Exarchopoulos, Dali Bensalah, Gilles Lellouche, Leïla Bekhti, Élodie Bouchez,...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Drame
Nationalité : Français.
Durée : 1h38min

Synopsis :
Depuis 2014, en France, la Justice Restaurative propose à des personnes victimes et auteurs d’infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles comme Judith, Fanny ou Michel.

Nassim, Issa, et Thomas, condamnés pour vols avec violence, Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de homejacking, de braquages et de vol à l'arraché, mais aussi Chloé, victime de viols incestueux, s’engagent tous dans des mesures de Justice Restaurative.

Sur leur parcours, il y a de la colère et de l’espoir, des silences et des mots, des alliances et des déchirements, des prises de conscience et de la confiance retrouvée… Et au bout du chemin, parfois, la réparation...



Critique :

 
Il y a de ces films qui vous cueillent de manière surprenante et dont les mots peuvent manquer pour mieux décrire ce qu'ils ont éveillé en nous. Pourtant, dans son ouverture, Je verrai toujours vos visages amène l'interrogation. Une femme aborde ainsi ses regrets face au meurtre de son compagnon tandis que les deux personnes qui lui font face l'interrogent, avec une dureté passant surtout par un montage brutal. Pourtant, une fois la nature de l'échange révélée, on ressent mieux les intentions de Jeanne Herry.
Et soyons francs : celles-ci explosent de manière forte et intense, fruit d'un grand film aussi discret que puissant.

Copyright Christophe Brachet - 2022 – CHI-FOU-MI PRODUCTIONS – TRESOR FILMS – STUDIOCANAL – FRANCE 3 CINEMA

Je verrai toujours vos visages aborde ainsi le sujet à priori peu connu de la justice restaurative par le biais de deux récits s'entrechoquant de manière passionnante. D'un côté, des victimes de vols avec violence rencontrent des malfrats ayant opéré dans le domaine. De l'autre, une jeune femme se prépare à une rencontre avec son frère qui l'avait agressée sexuellement durant sa jeunesse. Les liens entre ces deux histoires, outre le très beau personnage d'Élodie Bouchez, se développent surtout par les notions de pardon et de confrontation à des actes marquant à tout jamais l'existence. L'enjeu se resserre alors sur la parole et le besoin d'exprimer ces douleurs.

C'est par là que le film trouve déjà une beauté subtile : le fait de verbaliser la douleur est au cœur des doutes de chacun, des questionnements aussi bien des victimes que de ces personnes tentant de les accompagner comme elles le peuvent. Les nombreux dialogues s'avèrent alors d'une justesse folle, d'une proximité empathique qui retourne par la sincérité qui s'en dégage. La direction d'acteurs mérite alors d'être clairement soulignée, l'accumulation de noms ronflants permettant surtout de souligner une variété de protagonistes et de profils existant avec beauté dans ce drame. Pas étonnant par exemple d'opposer un jeu plus intériorisé pour Élodie Bouchez face à la chaleur plus expressive d'Adèle Exarchopoulos. C'est clairement ce genre de confrontation de jeu qui densifie un long-métrage clairement émotif.

Rien ne semble alors surfait, dans du jeu pur, et va plutôt vers une approche de jeu purement humaniste. La mise en scène permet alors de mieux faire respirer ces protagonistes, loin de la prestation totale, mais dans une inclination qui frappe, heurte et surtout émeut totalement. C'est en réfléchissant à certains plans subtils et effets de raccords aussi simples que dévastateurs que l'on découvre alors le génie d'un film aussi modeste que superbe. Il est rafraîchissant de voir pareil titre éviter l'ostentatoire en préférant se reposer sur l'humain pour se dévoiler, tout en étant cohérent par rapport au cœur sentimental du film.

Copyright Christophe Brachet - 2022 – CHI-FOU-MI PRODUCTIONS – TRESOR FILMS – STUDIOCANAL – FRANCE 3 CINEMA

Je verrai toujours vos visages s'avère alors une œuvre magnifique, captée au plus près de l'humain pour dépeindre des destins brisés sans jamais tomber dans le lacrymal vulgaire. Au contraire, l'exercice d'équilibriste émotionnel de Jeanne Herry est d'une telle justesse que l'on en sort bouleversé, avec la sensation d'avoir vu un grand film qui sait où toucher intimement. Impossible alors de ne pas recommander ce long-métrage tant tout ce qu'il véhicule est grandiose d'intimité et d'humanité.


Liam Debruel



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