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[CRITIQUE] : La Tour


Réalisateur : Guillaume Nicloux
Avec : Angèle Mac, Hatik, Jules Houplain,...
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Fantastique, Épouvante-horreur.
Nationalité : Français.
Durée : 1h29min

Synopsis :
Au cœur d’une cité, les habitants d'une tour se réveillent un matin et découvrent que leur immeuble est enveloppé d’un brouillard opaque, obstruant portes et fenêtres – une étrange matière noire qui dévore tout ce qui tente de la traverser. Pris au piège, les résidents tentent de s’organiser, mais pour assurer leur survie ils succombent peu à peu à leurs instincts les plus primitifs, jusqu’à sombrer dans l’horreur...



Critique :


La dernière vraie réussite fictionnelle de Guillaume Nicloux (il a réalisé entre-temps le documentaire fascinant Les Rois de l'Arnaque du côté de la plateforme au Toudoum) reste sans aucun doute le merveilleux Les Confins du Monde (quand bien même Thalasso reste divertissant), trip halluciné et hallucinant sur fond de revenge movie viscéral, une auscultation contemplative et brutale d'un conflit qui le fut encore plus, qui rappellait instinctivement son Valley of Love dans ses thématiques - aussi bien dans son rapport intime à la grande faucheuse que son obsession pour le désagrégement de l'âme humaine -, d'autant qu'il jouait tout du long la carte la perte de repère (temporel, physique et psychologique) pour mieux déstabiliser son auditoire au sein d'un cauchemar sans nom sondant la noirceur macabre et cannibale de l'âme humaine, pervertie par ses excès de violence et ses angoisses.

Copyright Wild Bunch

De cauchemar il en est également question (tout comme de la noirceur de l'humanité) avec La Tour, première incursion frontale - tout dû moins sur le papier - mais surtout follement ambitieuse du cinéaste au coeur d'un cinéma fantastique qui reprend du poil de la bête dans l'hexagone, après de longues années caché dans l'ombre.
Dans ce qui aurait pu se voir comme une sorte d'hommage aux papes John Carpenter et feu George A. Romero, au travers d'une séance post-apocalyptique et sociologique dont la somme des maigres qualités ne vient jamais surplomber ses nombreux défauts; Nicloux n'use in fine du fantastique qu'en tant que base solide (une étrange masse noire pousse toute une tour HLM de banlieue à se confiner puis de restructurer l'édifice en une sorte de microcosme primaire où chacun vit au sein de communautés simplement régit par une logique ethnique) pour une réflexion elle sensiblement plus fragile et pessimiste de la France d'aujourd'hui, en crise et sans aucune once - où presque - d'humanité.
Un poil plus défendable que le délire comico-vain de Dany Boon (8 rue de l'humanité), le portrait de notre société confinée qu'en fait le cinéaste n'en est pas moins tout aussi navrant tant il se laisse aller à une violence sauvage voire profondément gênante et complaisante, pour exprimer avec de gros sabots sa pensée nihiliste sur comment nous nous dirigeons tous lentement vers un déclin inéluctable, une autodestruction collective faites de sang, de haine et de larmes.

Copyright Wild Bunch

Alignant les ellipses à la pelle comme pour masquer autant la vacuité de son point de vue que pour empêcher toute emprise sur des personnages taillés à la serpe (et pour lequel il ne semble pas plus avoir d'intérêt que pour son auditoire), Nicloux, dévitalisant toute la saveur de son cinéma, et fait de La Tour une fresque glauque et décadente sur la déchéance humaine au rythme furieusement décousu, tuant dans l'oeuf et dans une accumulation de massacres toute idée de multiculturalisme et du (chimérique il est vrai) concept de bon vibre ensemble, puisque l'homme n'est et ne restera qu'un loup pour l'homme - et la femme, réduite ici à son statut le plus primaire.
Not quite our tempo.


Jonathan Chevrier