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[CRITIQUE] : L'Incroyable femme des neiges


Réalisateur : Sébastien Betbeder
Acteurs : Blanche Gardin, Philippe Katherine, Bastien Bouillon, Ole Eliassen,...
Distributeur : KMBO
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Français.
Durée : 1h42min.

Synopsis :
Coline Morel, intrépide exploratrice du Pôle Nord, voit sa vie partir à la dérive. Après des années passées à traquer ce yéti auquel elle est la seule à croire, elle se fait licencier et son compagnon la quitte. En pleine débâcle, Coline n’a d’autre choix que de rentrer dans son village natal. Elle y retrouve ses deux frères, Basile et Lolo, ainsi que son amour de jeunesse.
Des montagnes du Jura jusqu’à l’immensité des terres immuables du Groenland, une nouvelle aventure commence alors pour « l’incroyable femme des neiges ».





On avait laissé le cinéma savoureusement singulier de Sébastien Betbeder sur ce qui était, de loin, son effort le plus engagé et loufoque : Tout fout le camp, fable politico-surnaturelle embrassant à pleine bouche les codes de la comédie populaire, pour mieux asséner sa charge féroce contre un gouvernement laissant à l'abandon ses classes populaires, autant qu'un vrai message d'espoir et un appel à la solidarité à une heure où la France d'en bas - mais pas que - est littéralement à genoux, battus par une société hexagonale gangrenée par le confirmisme et le capitalisme.

Un nouveau virage des plus revigorant mais toujours porté par une infinie tendresse pour ses personnages, qui nous laissait espérer une seconde moitié de carrière franchement enthousiasmante, qui continuerait donc avec L’Incroyable femme des neiges, sans doute son long-métrage le plus accessible à ce jour (et sensiblement dans lombre du Little Big Man d'Arthur Penn, à qui le film fait même directement référence), qui lui permet de retrouver le Groenland neuf ans après Voyage au Groenland - qui traitait déjà de relations familiales complexes et conflictuelles.

Copyright Envie de Tempete Production

Le tout dominé par une Blanche Gardin beaucoup trop rare (et appelée à l'être encore un peu plus vu ses prises de positions - courageuses - politiques) mais à la filmographie plus insaisissable - et passionnante à suivre - que jamais.
À la frontière entre la comédie complice et le drame (une habitude du cinéaste que de lier les genres pour mieux en accentuer leurs contrastes), la narration, entre mort et renaissance, s'attache au périple tragi-comique de l'intrépide et un poil - juste un poil - égocentrique Coline Morel, exploratrice spécialisée dans le Groenland dont l'existence est plus à la dérive encore que la banquise.

Une aventure chaotique et imprévisible scindée en deux parties, un retour au bercail tout d'abord, come-back aux contours d'adieux dans les montagnes du Jura, qui reflète non sans humour (et dont la mise en scène reste vissée au plus près des corps et des visages) le malaise de son anticonformisme, avant de voguer à nouveau vers la banquise où son héroïne se sent comme chez elle et plus en paix dans sa survie en solitaire; une moitié plus introspective et réaliste à la lisière du documentaire filmé caméra à l'épaule (avec un accent marqué sur la culture inuit), où les touches d'humour se font plus subtiles au coeur d'un tissu dramatique particulièrement poignant.

Copyright Envie de Tempete Production

Moins un récit de rédemption qu'une douloureuse et spirituelle quête de sérénité sous fond de survie, aussi bien face à un cadre glacial ravagé par la crise climatique, que face au rejet et à l'incompréhension de sa singularité par une société aux valeurs (ultra)conservatrices, L’Incroyable femme des neiges, parfois un poil décousu, n'en reste pas moins une séance joliment décalée et grave, dans la parfaite lignée d'une filmographie à la mélodie pas toujours juste mais réellement entêtante.


Jonathan Chevrier