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[CRITIQUE] : À propos de Joan


Réalisateur : Laurent Larivière
Acteurs : Isabelle Huppert, Lars Eidinger, Freya Mavor, Swann Arlaud,...
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Français, Allemand, Irlandais.
Durée : 1h41min.

Synopsis :
Joan Verra a toujours été une femme indépendante, amoureuse, habitée par un esprit libre et aventureux. Lorsque son premier amour revient sans prévenir après des années d’absence, elle décide de ne pas lui avouer qu’ils ont eu un fils ensemble. Ce mensonge par omission est l’occasion pour elle de revisiter sa vie : sa jeunesse en Irlande, sa réussite professionnelle, ses amours et sa relation à son fils. Une vie comblée. En apparence.



Critique :


Difficile de totalement appréhender le sacré mélange de genre qu'incarne À Propos de Joan de Laurent Larivière, dont l'ouverture très théâtrale - et à la limite de la farce -, montre une Isabelle Huppert (un brin en pilote automatique) qui se présente et s'adresse face caméra dans un court monologue censé nous annoncer ce que le film s'échinera à nous conter, le tout sous une bande-son (faussement) sous tension.
Soit une confrontation du passé entre souvenir et imaginaire, à coups de flashbacks où le spectateur est très vite amené à s'interroger sur la crédibilité du narrateur, tout autant qu'il réalise que le réalisateur entend sensiblement laisser le naturalisme au second plan.
Sorte de gros melting-pot bordélique saupoudré de fantasy, de mélodrame, d'érotisme et même de comédie burlesque, la péloche laisse lentement mais sûrement son héroïne être, étrangement, le second rôle d'une histoire qui parle pour elle, où la narration n'en fait jamais un personnage si ce n'est complexe, au moins un tant soit peu impactant.

Copyright Films, Gifted Films West et Blinder Films

Chaos désorganisé et experimental qui ne prend jamais véritablement racine, À Propos de Joan se rêve comme un portrait vibrant d'une femme hanté par un amour perdu qui réapparaît subitement, mais n'incarne in fine qu'une évasion laissant un amer voile de gachis sur la rétine, tant il ne sait jamais réellement sur quel pied danser, que ce soit du côté de la comédie surréaliste - il est vrai prédominante - avec ses scènes excentriques (notamment celle avec un poulpe du désir, symbole maladroit mais cocasse d'une sexualité libérée) où le mélodrame sirupeux, pas aidé par des personnages qui ne semblent jamais réellement s'inscrire dans la vie d'une héroïne tout en retenue et elle-même spectatrice de l'histoire, à laquelle tout processus d'identification est tué dans l'oeuf.
Furieusement foutraque - jusque dans sa structure épisodique - tout autant qu'il pèche dans sa volonté d'insérer l'absurde et le surréalisme dans le quotidien d'une existence banale, le film distille plusieurs idées inachevées réellement accrocheuse (le fait que les expérience d'une vie puissent transformer quelqu'un qui nous est proche en un véritable étranger et de facto, comment quelques choix peuvent eux-mêmes nous changer,...), au coeur d'un récit qui pointe la volatilité autant que l'insincérité - parfois consciente - de la mémoire.
Dommage qu'il ne se donne jamais réellement les moyens de les concrétiser, engloutit par un pouvoir de la fiction qu'il cherche en vain à apprivoiser.


Jonathan Chevrier