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[CRITIQUE] : Immunité Collective


Réalisateur : Adilkhan Yerzhanov
Acteurs : Daniyar Alshinov, Nurbek Mukushev, Yerzhan Zhamankulov, Assel Sadvakassova,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Comédie.
Nationalité : Kazakh, Français.
Durée : 1h34min.

Synopsis :
Lorsque le coronavirus s’installe à Karatas, un gentil policier corrompu ignorant les crimes et délits et spécialiste des pots-de-vin se retrouve contraint à... faire régner la loi.



Critique :


Au sein de sa foisonnante sélection, la cuvée 2022 de l'Étrange Festival a décemment joué la carte de la gourmandise (et on ne va absolument pas s'en plaindre) en ne dégainant pas un mais bien les deux nouveaux efforts du génial cinéaste kazakh Adilkhan Yerzhanov, une bénédiction tant il n'est jamais totalement acquis que ses films aient des distributions décentes (comprendre : en salles) dans l'hexagone.
Outre le désopilant et sombre Assault, il est donc également de retour avec le bien nommé Immunité Collective, terme anxiogène ayant sensiblement (cyniquement ?) squatté notre quotidien médiatique depuis l'arrivée de la pandémie du Covid-19 dans nos existences, une comédie bien gratinée flanquée au coeur du familier cadre difficile de Karatas, où la corruption elle-même est perturbée par un coronavirus qui restreint toute liberté.
Yerzhanov colle sa caméra aux basques du pathétique Selkeu (le génial et habitué du cinéma du cinéaste, Daniyar Alshinov), flic local dont l'application du respect de la loi auprès de ses concitoyens, se limite aux pots-de-vin - rarement fructueux - qu'il tente de toucher pour fermer les yeux face à des effractions qui sont vitales pour que les habitants puissent un minimum joindre les deux bouts.

© D.R.

Mais son petit manège foireux prend sensiblement du plomb dans l'aile avec l'arrivée du Covid-19 et de son confinement imposé, qui l'oblige à renouer avec son ex-femme, Turiya, uniquement présente pour que Selkeu et son collègue Zhamzhysh, l'aide elle et son nouveau mari Gurbeken - haut fonctionnaire de police -, à coincer un propriétaire local, Zembeke, qui refuse de se soumettre à l'isolement.
À moins que cela ne soit qu'une ruse pour coincer un plus gros poisson directement lié à Selkeu et son rêve de mener une troupe de danse...
Comédie absurde et buddy moviesque aux forts accents Melvilliens (cinéaste presque totem que le kazakh cite régulièrement dans ses films) qui s'avère finalement plus bordélique et floue que réellement convaincante sur la durée, la péloche marque néanmoins le retour de Yerzhanov au coeur de la satire politique ludique et enlevée au contexte social urgent, portée par une mise en scène aussi théâtrale que les interprétations enjouées et bon-enfant de ses comédiens.
Dommage que l'écriture ne s'inscrit pas dans ce même tempo, le cinéaste tentant une nouvelle fois de tromper - cette fois difficilement - les fêlures de sa narration fragmentée et trop étirée (où quelques sous-intrigues peinent à justifier leur intérêt), par un ton naïf et de légères saillies surréalistes délirantes.
Immunité Collective, qui n'a finalement pas tant à voir avec la pandémie que cela, se fait un Yerzhanov mineur donc qui n'empêche pas de prendre un malin plaisir à suivre les bras cassés insouciants qu'il met en scène.


Jonathan Chevrier