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[CRITIQUE] : Present. Perfect. (Wan Mei Xian zai shi)


Réalisatrice : Shengze Zhu
Avec : -
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Documentaire
Nationalité : Hong-Kongais, Américain.
Durée : 2h04min

Synopsis :
Le streaming en direct est à son paroxysme en Chine ces dernières années. Ce collage cinématographique dresse le portrait d’une communauté marginalisée en quête de contacts humains qui cherche à exister et plus que tout, à être connectés au monde.



Critique :

Le streaming en direct est devenue une grande entreprise en Chine (422 millions de streamers en 2017), notamment pour un jeunesse qui, sensiblement exclue/éclipsée de l'économie florissante de leur nation, fonde son avenir sur une hypothétique renommée en ligne.
Sans tomber dans un regard méchamment cynique sur une industrie - ou plutôt exploitation, dans tous les sens du terme - qui l'est tout autant, le documentaire Present. Perfect. de Shengze Zhu, condensé de pas moins de 800 heures de séquences recueillie auprès de douze streamers sur plus de dix mois (et scindé en un montage en quatre chapitres il est vrai pas forcément clair et un poil bordélique), s'attache à présenter des visages qui ne sont pas tant en ligne pour l'argent, que mué par un vrai sentiment de visibilité et d'acceptation sociale.
Où comment les petits instantanés de vies d'un présent répétitif et banal, se voient sanctifié dans l'éternité éphémère et inquiétante du web.

COURTESY OF INTERNATIONAL FILM FESTIVAL ROTTERDAM

Vissé sur la dépendance émotionnelle et affective de personnes banales (qui suscite en retour, une dépendance souvent malsaine de ses spectateurs) autant en périphérie de l'industrie (aucune " superstar " n'est choisie comme sujet) que marginalisés par la société, qui exposent leur vie en ligne - voire même leur handicap - pour mieux se connecter au monde, quitte à parfois en récolter les pots cassés (demandes et commentaires lubriques, désobligeants voire même profondément insultants); le documentaire, tout du long en noir et blanc, avec des intertitres joyeux et colorés, dévoile dans sa majorité une sorte de voyeurisme inversé, de ces brèves fenêtres sur la vie quotidienne (une couturière, une danseur solitaire, un jeune homme qui n'a jamais atteint la majorité sexuelle, une jeune femme paralysée et aussi fragile qu'une poupée...) pour des âmes désespérément en quête de rapprochement humain, même si la question pécuniaire n'est jamais totalement éludée.
Un effort édifiant qui pointe du bout de la (où plutôt des) caméra les rouages d'une industrie qui se fait autant une bouée de sauvetage qu'il pointe les vérités troublantes et fascinantes à la fois, d'une monétisation de la banalité du quotidien qui va bien au-delà de toutes les dérives absurdes et scénarisées de nos émissions de télé-réalité quotidienne...


Jonathan Chevrier