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[CRITIQUE] : Spider-Man : No Way Home

Réalisateur : Jon Watts
Avec : Tom Holland, Zendaya, Benedict Cumberbatch, Alfred Molina, Willem Dafoe, Jamie Foxx,...
Distributeur : Sony Pictures Releasing France
Budget : -
Genre : Action, Aventure, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h29min

Synopsis :
Pour la première fois dans son histoire cinématographique, Spider-Man, le héros sympa du quartier est démasqué et ne peut désormais plus séparer sa vie normale de ses lourdes responsabilités de super-héros. Quand il demande de l'aide à Doctor Strange, les enjeux deviennent encore plus dangereux, le forçant à découvrir ce qu'être Spider-Man signifie véritablement.



Critique :


L'une des vraies réussites du deuxième reboot de l'homme araignée chapeauté par Sony Pictures - sous l'étroite surveillance de la maison mère Marvel -, fut d'avoir fait de son Peter Parker un adolescent plus fermement ancré dans l'adolescence, au sein d'un univers totalement WTF-esque mais léger (ou tout du moins, moins sombre et tragique que chez Raimi et Webb), ou les extraterrestre surpuissants et les super-soldats du bien, se font la guerre sous des yeux ébahis de môme du Queens; un ado assez fort pour se battre aux côtés d'héros plus âgés, mais pas encore assez sage et mature pour leur ressembler et ne pas accumuler les erreurs.
Et ce Spidey en fait des erreurs, des monumentales même, et Spider-Man : No Way Home l'amène à sa plus grosse erreur à ce jour... autant qu'à son aventure la plus désordonnée.

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Car ce troisième opus de la trilogie de Jon Watts essaie tout du long de jongler entre un fan service maousse costaud (tellement qu'il est presque impossible de ne pas jouer la carte des spoilers) et une volonté de conclure les années lycées de son héros - avec le mood teen moviesque des deux premiers films.
Démarrant directement à la suite de Spider-Man : Far From Home, avec un Peter Parker accusé du meurtre de Quentin Beck et dont la double personnalité super-héroïque est dévoilée au monde entier par Jonah J. Jameson (réinventé ici comme un provocateur 2.0 façon InfoWars), No Way Home épouse une énergie anxiogène jusqu'ici jamais vraiment abordé par le MCU, avec un héros devant réaliser en une poignée de secondes, comment vivre sa vie en tant qu'adolescent le plus célèbre de la planète.
Une célébrité soudaine et perverse qui a des conséquences diverses autant sur lui que sur ses proches, un prix qu'il sent trop lourd au point de se tourner vers le Doctor Strange pour qu'il arrange les choses, en demandant un sort pour faire oublier au monde qu'il est Spider-Man.
Le hic c'est que le rituel du Doc, encore une fois par la faute de Peter, se retourner contre lui, fracturant les frontières entre les différents univers et amenant les méchants des précédentes longs-métrages autant au coeur du film, que dans le riche catalogue du MCU (aucun spoilers, les dits méchants sont le Bouffon Vert de Dafoe, le Otto Octavius de Molina, l'Electro de Foxx l'homme de sable d'Haden Church et le Lézard de Ifans).
Et c'est là que le scénario du film commence gentiment mais sûrement à trébucher, tant son affrontement super-héroïque gargantuesque ralentit considérablement l'histoire autant quelle lui donne les atours mécaniques si chers au MCU : Peter à déconner, maintenant il doit nettoyer et renvoyer ces méchants d'où ils viennent... et voilà.

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Le danger évident d'une telle narration réside dans la facilité avec laquelle on peut céder aux sirènes du spectacle total louchant aveuglément sur le fan service visant à contenter les attentes des fans (Spoilers : toutes les rumeurs sont quasiment vraies); un souci que le script de Chris McKenna et Erik Sommers n'évite absolument pas (à quoi bon ?), même s'il peut se targuer de décupler la puissance dramatique de certaines scènes revisitées, autant que de joliment conserver les valeurs du Peter d'Holland, plus naïf mais aussi plus humaniste que ces prédécesseurs.
Lorsqu'il apprend que ces vilains envahisseurs ont été arrachés à leurs univers avant des batailles fatales avec leurs tisseurs respectifs (ce qui convoque un immense souci de cohérence vu le reboot complet de certains, mais passons), il ne veut pas les renvoyer à la mort, il veut trouver un moyen de les «guérir» de leurs transformations en super-vilains pour mieux leur laisser une seconde chance (sans que l'écriture ne distille cela dit, une réflexion autour du fait que le mal peut être une chose qui se guérit ou non); une naïveté noble qui accentue son statut d'ado qui enquille les erreurs et ne fait qu'empirer les choses par son obstination.
C'est là ou le choix de privilégier les méchants susmentionnés (tous incarnant des hommes ayant laissé leurs défauts - cupidité ou encore orgueil, - prendre le dessus sur leur humanité) prend tout son sens, à la fois fascinant et profondément égocentré : s'opposer aux autres itérations de Spider-Man de Raimi et Webb, pour mieux s'adjuger la victoire théorique en faisant du Peter de Holland un Spidey qui non seulement arrive à vaincre les plus grands ennemis de ses prédécesseurs (pas du tout logés à la même enseigne à l'écran, tant seul le Bouffon Vert de Dafoe a un réel impact sur l'action), mais aussi potentiellement les guérir.

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Un sacré culot d'autant qu'il ne tient jamais vraiment la route visuellement (comme les deux premiers opus, Watts n'arrive pas à créer une vraie scène d'action marquante, sauf peut-être une bagarre entre Strange et Spidey dans la dimension miroir kaléidoscopique) et encore moins scénaristiquement parlant.
S'il a le (très) bon goût de mettre son Peter dans une essoreuse aussi bien émotionnellement (la perte de tante May) et physiquement (via quelques affrontements brutaux plutôt étonnant), puisqu'il est ici sans filet (plus de Tony Stark ni d'Avengers pour le soutenir, et Doc Strange n'est pas vraiment un substitut de mentor, et les apparitions fugaces des Spideys de Maguire et Garfield ne leur offre qu'un petit statut de grands frères), le script est avant tout et surtout frappé des mêmes maux qu'Homecoming et Far From Home, et même tout simplement de la quasi-majorité du MCU, qui n'existe par sa connivence : c'est un film qui ne tient debout que parce que sa charpente s'appuie sur d'autres films pour nourrir ses enjeux et la croissance galopante de son araignée adolescente (Homecoming avec un Stark/MCU en père de substitution, Far From Home avec les répercussions d'Infinity War et Endgame, et ici les précédents films Spider-Man, même New Generation et son multiverse).
Et c'est peut-être là le plus grand problème de cette nouvelle trilogie (victime sans le vouloir d'un partenariat inédit finalement plus castrateur qu'autre chose), cette incapacité à pleinement vivre d'elle-même alors qu'elle a, sans doute, le Peter Parker le mieux développé et le plus fidèle au matériau original, ainsi que quelques seconds couteaux franchement rafraîchissants (Ned évite la redite Harry Osborn, là où la MJ de Zendaya et son humour pince-sans-rire vole souvent le show).

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Dommage tant, au-delà de ses scènes racoleuses faciles - mais géniales - à la Endgame, visant à rendre les fans hystériques (et ils le seront), il y a quelque chose d'étrangement touchant dans les tentatives (mercantiles et pas toujours honnêtes certes) de ce No Way Home de relier nostalgiquement les wagons entre les deux sagas avortées qui ont précédé la sienne (sans oublier - Spoilers - les séries du MCU de Disney Plus et celle de Netflix), et cela même si elle cherche à un peu trop bomber le torse face à elles (si elle avait pu ne serait-ce qu'un brin, singer la maestria visuelle de la trilogie de Raimi...).
Bordélique et nostalgique, tragique et un brin frustrant, voilà la définition parfaite de ce multiverse mais aussi et surtout de Spider-Man : No Way Home dont le final assez déchirant, augure pourtant, et ce pour la première fois depuis longtemps, un avenir glorieux pour Spider-Man, d'autant qu'Holland sera bien de la partie pour une potentielle nouvelle trilogie...


Jonathan Chevrier