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[CRITIQUE] : Vent Chaud

Réalisateur : Daniel Nolasco
Acteurs : Leandro Faria Lelo, Allan Jacinto Santana, Renata Carvalho, Mel Gonçalves,...
Distributeur : Optimale Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Brésilien.
Durée : 1h50min.

Synopsis :
Sandro travaille au département ressources humaines d’une compagnie minière. A la fin de la journée il retrouve son collègue Ricardo dans la forêt avoisinante où ils ont des relations sexuelles. Régulièrement il se rend à la piscine où il fantasme sur le beau Maicon qui ne le remarque pas. Lorsque celui-ci commence à travailler dans la même compagnie, le désir de Sandro se transforme en obsession, et cela empire lorsqu’il apprend que Ricardo et Maicon ont une aventure.


Critique :



Alors que nous pouvions découvrir l’univers queer & cuir de Daniel Nolasco l’année dernière, avec la sortie DVD française de son documentaire Mr. Leather, son premier long métrage de fiction, Vent Chaud, sort dans nos salles obscures. Avec son atmosphère sexuelle assumée, le film porte bien son nom. Scènes de sexes non simulées, univers BDSM, le cinéaste brésilien nous invite aux confins du film pornographique, à l’onirisme érotique et aux effleurements — que l’on pourrait qualifier de tout sauf de chaste. Vous êtes prévenu‧es.

Pendant un été particulièrement sec, Sandro, un quadragénaire célibataire va se rafraîchir à la piscine municipale avant de commencer ses horaires à l’usine minière de la ville. Vent Chaud prend dès le départ le point de vue du personnage, affirmant un «gaze» très male, le cadre respirant du torse, de l’entrejambe et des fesses extrêmement bien moulées dans les caleçons de bain. Sandro, homme gay dans un pays où le gouvernant actuel tient régulièrement des propos homophobes, n’ose pas s’assumer comme tel dans les yeux de ses collègues et ne s’octroie que des brefs moments avec Ricardo, un employé de la mine, jeune, beau et ténébreux. Ils s'éclipsent discrètement après le boulot, dans les bois, pour mieux dévorer le corps de l’autre, entre les feuillages, dans la terre. Mis à part ces rendez-vous sous le signe de chair et d’intimité, Sandro vit seul et emploie son temps libre dans l’occupation la plus solitaire qui soit : les puzzles. Son quotidien se résume à cela, un emploi redondant et creux, une intimité secrète et une extrême solitude, qu’il comble avec des rêves érotiques plus vrais que nature.

Copyright Optimale Distribution

Daniel Nolasco n’a peur de rien et c’est ce qui plaît le plus dans Vent Chaud, cette absence de pudeur, ce vent de liberté dans l’univers pourtant très codé du porno gay. Le cinéaste joue avec ces codes du plaisir, avec les formes phalliques du paysage et convoque l’imaginaire collectif de cet univers iconographique en amenant les fantasmes directement à Sandro, comme pour la séquence du policier. La mise en scène se met au diapason avec l’aspect représentation du porno, de la performance. Les scènes de sexe sont crues, filmées dans leur ensemble. Cependant, le film délaisse le côté voyeur et éloigne la caméra des corps. Si parfois les corps masculins sont érotiques et sexualisés (parce que nous les voyons par le prisme de Sandro), ces séquences ont un côté plus ludique, bienveillant, quoique lubrique. L’exploration est fiévreuse. On lèche le cuir, des culs, des aisselles. On parcourt des couloirs rouges, des forêts bleutées, des douches roses, des nuits oranges. Le film suit la météo et l’air se fait de plus en plus sec, de plus en plus rêche. Une atmosphère propice aux obsessions de s’installer, sournoisement, de se laisser aller aux fantasmes les plus sales.

Dans cette panoplie de fétichisme, Daniel Nolasco installe une émotion fugace mais tangible au sein des déambulations et des obsessions de Sandro. Derrière le désir, se trouve un homme seul, qui doit cacher une partie de lui-même au quotidien, par peur au début, puis par habitude. Quelques scènes ont une saveur plus grave et/ou plus sensible (Maicon qui lui tient la main pendant un grand-huit, ou quand il raconte qu’il n’a pas été à l’enterrement d’un professeur, lui-même homosexuel, par peur du «qu’en dira-t-on») et dépeint un quotidien amère, qui dans le secret, absorbe tout. Sandro est un homme qui ne croit plus en rien. Ni aux relations, ni à l’amitié (il ne fait pas grand chose pour entretenir sa relation avec son amie et collègue Paula), ni même en une petite bataille du syndicat de son entreprise pour obtenir de meilleures conditions de travail. Le personnage est vidé de toute substance (à part une, le foutre) et tient le cap uniquement grâce à ses fantasmes.

Copyright Optimale Distribution

Vent Chaud est un rêve érotique brûlant, qui désinhibe et déshydrate, sec et aride. Une proposition colorée d’un univers coquin pour mieux sonder la solitude d’un être à qui on impose le secret.


Laura Enjolvy