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[CRITIQUE] : Bac Nord


Réalisateur : Cédric Jimenez
Acteurs : Gilles Lelouche, Karim Leklou, François Civil, Adèle Exarchopoulos, Kenza Fortas,...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Thriller
Nationalité : Français
Durée : 1h44min

Synopsis :
Le film est présenté hors-compétition au Festival de Cannes 2021

2012. Les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu'au jour où le système judiciaire se retourne contre eux…



Critique :


Personne ne pourra réellement remettre en cause à la vision de Bac Nord, les talents d'honnête faiseur de Cédric Jimenez, qui part la force de trois premiers longs aussi opposés que réussis (Aux Yeux de Tous, La French et HHhH), avait démontré une ambition pas forcément commune et rafraîchissante, au sein du cinéma hexagonal.
Sa réalisation étant d'ailleurs ici le point fort du film, sèche et nerveuse comme prise sur le vif, citant directement - toute propension gardée bien évidemment -, les efforts Hollywoodien les plus récents du genre, comme le diptyque Sicario du tandem Villeneuve/Sollima (déjà derrière le bouillant ACAB, au sujet sensiblement proche).
Reste que pour sa quatrième réalisation, quelque chose dénote voire dérange profondément dans sa mise en images intime d'une poignée de policiers de la BAC, lui qui avait su admirablement bien jongler pourtant, avec les contraintes du thriller urbain dès son premier long-métrage... à ceci près que celui-ci assumait pleinement ses contours fictionnels.

Copyright Jérôme MACE/Chifoumi Productions

Ce qui cloche avec cet effort, c'est qu'au-delà même de donner une tournure férocement douteuse (et pour le coup très américaine) à son penchant dramatique, dédramatisant voire même justifiant avec lourdeur l'aspect corrompu de ses sujets (de simples victimes de leur hiérarchie arriviste et, plus directement, de la vie, tout en sachant qu'ils ont consentis à choisir ce métier, avec les inconvénients peu commodes qu'il comporte), au sein d'une intrigue estampillée " inspiré de faits réels " (dix-huit membres de la BAC de Marseille furent arrêtés pour trafic de drogue, corruption, et racket en bande organisée en 2012); c'est qu'il ne propose aucune distance analytique et se dédouane même ridiculeusement de ne pas prendre parti dès son carton d'ouverture - et même ceux finaux -, alors qu'il s'échine scrupuleusement à ne faire que cela, durant les quatre-vingt-dix minutes qui suivent.
Prenant continuellement fait et cause d'une corruption qu'il héroïse presque (et pas forcément pour mieux la dénoncer, comme voulu), le film schématise de manière mécanique et presque télévisuelle dans son approche (comme la quasi-intégralité des émissions " chocs " consacrées aux forces de l'ordre, qui n'ont de différences - et encore - que les villes ou ils posent leurs caméras), ce quotidien ou la détresse sociale n'entre jamais pleinement en ligne de compte (les quartiers nord de Marseille ne sont qu'un regroupement de criminels donc), et où l'humanité n'a finalement aucun visage autre que celui des représentants de l'ordre - aussi faillible soit-il.

Copyright Jérôme MACE/Chifoumi Productions

Là où le récent Les Misérables de Ladj Ly, plus conscient de la société actuelle, ne diabolisait aucun des deux camps qu'il exposait autant à une tragédie qu'à un affrontement inéluctable, tout en s'inscrivant dans une réalité furieusement concrète (et encore plus à une heure ou les rapports de force entre la police et la population est au bord de l'implosion); Bac Nord, vrai thriller brutal et âpre formellement maîtrisé et bien incarné, ne s'embarrasse d'aucun vrai propos politique (quelques dialogues à peine esquissés), donne une image au demeurant juste sur la guerre contre la drogue (comme par exemple, cette rémunération, illégale mais paradoxalement tolérée, des informateurs), mais laisse perplexe sur la morale et l'idéologie qu'il défend, par une vision difficilement défendable voire même intimement révoltante.


Jonathan Chevrier


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