[CRITIQUE] : Palm Springs
Réalisateur : Max Barbakow
Avec : Andy Samberg, Cristin Milioti, J.K. Simmons,...
Distributeur : Amazon Prime Video France
Budget : -
Genre : Comédie, Romance, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h30min
Synopsis :
L'insouciant Nyles fait la connaissance lors d'un mariage à Palm Springs de Sarah, soeur de la mariée et demoiselle d'honneur. Les choses se compliquent rapidement lorsque le duo se retrouve piégé dans l’espace-temps de ce mariage, contraint de revivre sans cesse la même journée.
Critique :
En fin de compte, sauf cas tragiquement exceptionnels, quoi que nous fassions pour ou contre cela, nous mourons tous seuls, et c'est une vérité aussi effrayante que frustrante qu'il vaut mieux accepter puisqu'elle est... inéluctable.
En revanche, pouvoir de la fiction oblige, le septième art peut la contredire tout en désacralisant la mort elle-même, voire même la banaliser en la transformant en un gimmick humoristique savoureux, avec plus ou moins de maîtrise selon les plumes impliquées.
Résolument dans la tranche supérieure de toutes les péloches ayant gentiment pillé la référence absolue Un Jour sans Fin de feu Harold Ramis, Palm Springs de Max Barbakow - et avec un brillant scénario de d'Andy Siara - use merveilleusement du concept de l'emprisonnement dans une boucle temporelle, en le plaçant au coeur des artifices d'une comédie romantique saupoudré d'un double récit initiatique infiniment touchant et empathique; une évasion science-fictionnelle aussi délirante qu'elle est désarmante de tendresse, donnant du sens à l'apparente insignifiance de la vie avec un enthousiasme contagieux.
Inlassablement bloqué le jour d'un mariage à Palm Springs, on est tout d'abord happé par le personnage de Nyles, nihiliste à part entière (tellement que son nom peut juste se voir comme une contraction du mot, ou un rappel évident a " je Denies ", il nie), un trentenaire qui semble flotter sur la vague de cette journée sans jamais se soucier du monde qui l'entoure.
Il tolère à peine sa petite amie (qui recèle un lourd secret qu'il a découvert depuis longtemps), et ne cesse de rappeler que chaque jour est le même, laissant transparaître la fausse idée qu'il n'est simplement qu'un mec cool qui se laisse border par les platitudes insignifiantes de la vie.
Sauf que le bonhomme vit littéralement le même jour, encore et encore, depuis très longtemps - sans doute bien plus que plusieurs mois.
Lorsqu'il rencontre Sarah, demoiselle d'honneur et soeur de la mariée, il se glisse vers elle à travers la foule avec facilité, constamment au bon endroit au bon moment et avec les bons mots en bouche (le film n'attend pas de nous montrer tout son processus d'apprentissage comme Bill Murray dans Groundhog Day : Nyles a déjà une maîtrise totale de son environnement).
Mais là où le propos dénote, et le rapprocherait presque du Edge of Tomorrow de Doug Liman, c'est que cette dite boucle - naissant dans les profondeurs rougeoyantes d'une grotte dans le désert - n'implique pas seulement une seule personne, puisque Nyles finit accidentellement par y inviter Roy (génial J.K. Simmons, qui fait toujours énormément avec peu de temps à l'écran) et Sarah, les piégeant eux aussi dans cette journée.
Horrifiée par la situation et encaissant comme elle le peut les règles de son nouvel enfermement (ils peuvent tous les deux voyager aussi loin de Palm Springs que possible, mais le jour se terminera officiellement lorsqu'ils mourront ou s'endormeront), Sarah testera les limites de cette boucle de toutes les manières auxquelles elle peut penser (meilleure manière de découvrir comment la briser, et elle va sévèrement se crêper le chignon pour y arriver), avant d'être convaincu par Nyles d'essayer de trouver la paix dans cette nouvelle réalité, en embrassant le ridicule de la situation tout en se fixant à l'idée que rien n'a d'importance... sauf eux.
Finalement, les deux deviennent amis - et même un peu plus au fil du temps - en faisant de ce mojo un état d'esprit commun, et se laisse aller à épouser toute la folie qui les habite (entre les manières les plus ridicules de ruiner un mariage et les plus rocambolesques de mourir).
Errance irrévérencieuse, tragique (aucun des deux, surtout Nyles, ne se souviennent depuis combien de temps ils sont bloqués dans la boucle, peut-être toute une vie qui sait) et loufoque à la fois, ou une boucle temporelle devient autant le paradis parfait (puisque totalement dénué de responsabilités) qu'une prison de verre cathartique obligeant ses protagonistes à travailler sur eux-mêmes (pas uniquement Sarah et Nyles dans leur quête de maturité et de responsabilisation, puisque Roy apprendra de son côté à apprécier les joies du quotidien de sa vie de famille), Palm Springs désarçonne dans sa manière d'aborder aussi simplement son apparat fantastique, que dans sa façon authentique et adulte de concevoir la relation amoureuse - et inévitable - entre deux êtres qui ne peuvent rester ensemble que s'ils sont capable de grandir aussi bien ensemble qu'individuellement.
Parce que bien que la banalité de leur existence plane sur eux comme une punchline infinie à laquelle ils ne peuvent totalement rétorquer, la peur de vivre seul gèle littéralement la spontanéité de leurs sentiments; ils ont beau vivre chaque jour de cette boucle au maximum, ils ne font finalement que vivre une seule journée coincée dans un champ des possibles infinies, ou le hasard est réduit par le manque cruel de risque et leur zone de confort sécurisante (rien ne peut leur arriver), et leur - potentiel - amour à une relation elle aussi sans but ni conséquences.
Pourtant, même s'il laisse planer l'ombre orageuse d'un cauchemar existentiel, le film en est tout l'inverse (sans pour autant renier sa part d'ombre), une sorte de parade existentielle justement, teintée de paillettes piquantes et de bières, prenant les tendres courbes d'une fabuleuse aventure passionnée et initiatique, incarnée à la perfection par le couple Andy Samberg (hilarant et d'une vulnérabilité attachante) et Cristin Milioti (magnétique et solaire).
Une oeuvre constamment en évolution - comme ses personnages -, arpentant brillamment les terrains sinueux de la comédie purement américaine désopilante (logée entre l'humour idiot de Nyles et le cynisme robuste de Sarah) et de la fable inquiète sur l'immobilisme de toute une génération (les jeunes trentenaires, dont nous, confrontés à des vérités dures sur leur propre existence), autant qu'une romcom douce-amère (interrogeant notamment la durabilité des relations à long terme) et un récit mélancolique flippée sur le temps qui passe (et sa redondance, ici évidemment accentuée à l'extrême), appuyant sur l'artifice d'un éternel recommencement pour mieux jouer aussi bien avec nos attentes qu'avec nos angoisses les plus intimes - le tout avec une utilisation du fantastique limpide et cohérente.
On appelle ça un put*** de classique instantané, mais surtout une pure merveille dont on a cruellement besoin en cette période plus que morose.
Jonathan Chevrier
Avec : Andy Samberg, Cristin Milioti, J.K. Simmons,...
Distributeur : Amazon Prime Video France
Budget : -
Genre : Comédie, Romance, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h30min
Synopsis :
L'insouciant Nyles fait la connaissance lors d'un mariage à Palm Springs de Sarah, soeur de la mariée et demoiselle d'honneur. Les choses se compliquent rapidement lorsque le duo se retrouve piégé dans l’espace-temps de ce mariage, contraint de revivre sans cesse la même journée.
Critique :
Film hybride en constante évolution (comme ses persos) entre la comédie fantastico-délirante, la fable inquiète sur l'immobilisme de toute une génération, la romcom douce-amère et le récit mélancolique flippée sur le temps qui passe,#PalmSprings est rien de moins qu'un vrai bijou pic.twitter.com/RNXA3L9NHh
— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) February 12, 2021
En fin de compte, sauf cas tragiquement exceptionnels, quoi que nous fassions pour ou contre cela, nous mourons tous seuls, et c'est une vérité aussi effrayante que frustrante qu'il vaut mieux accepter puisqu'elle est... inéluctable.
En revanche, pouvoir de la fiction oblige, le septième art peut la contredire tout en désacralisant la mort elle-même, voire même la banaliser en la transformant en un gimmick humoristique savoureux, avec plus ou moins de maîtrise selon les plumes impliquées.
Résolument dans la tranche supérieure de toutes les péloches ayant gentiment pillé la référence absolue Un Jour sans Fin de feu Harold Ramis, Palm Springs de Max Barbakow - et avec un brillant scénario de d'Andy Siara - use merveilleusement du concept de l'emprisonnement dans une boucle temporelle, en le plaçant au coeur des artifices d'une comédie romantique saupoudré d'un double récit initiatique infiniment touchant et empathique; une évasion science-fictionnelle aussi délirante qu'elle est désarmante de tendresse, donnant du sens à l'apparente insignifiance de la vie avec un enthousiasme contagieux.
Copyright Hulu |
Inlassablement bloqué le jour d'un mariage à Palm Springs, on est tout d'abord happé par le personnage de Nyles, nihiliste à part entière (tellement que son nom peut juste se voir comme une contraction du mot, ou un rappel évident a " je Denies ", il nie), un trentenaire qui semble flotter sur la vague de cette journée sans jamais se soucier du monde qui l'entoure.
Il tolère à peine sa petite amie (qui recèle un lourd secret qu'il a découvert depuis longtemps), et ne cesse de rappeler que chaque jour est le même, laissant transparaître la fausse idée qu'il n'est simplement qu'un mec cool qui se laisse border par les platitudes insignifiantes de la vie.
Sauf que le bonhomme vit littéralement le même jour, encore et encore, depuis très longtemps - sans doute bien plus que plusieurs mois.
Lorsqu'il rencontre Sarah, demoiselle d'honneur et soeur de la mariée, il se glisse vers elle à travers la foule avec facilité, constamment au bon endroit au bon moment et avec les bons mots en bouche (le film n'attend pas de nous montrer tout son processus d'apprentissage comme Bill Murray dans Groundhog Day : Nyles a déjà une maîtrise totale de son environnement).
Mais là où le propos dénote, et le rapprocherait presque du Edge of Tomorrow de Doug Liman, c'est que cette dite boucle - naissant dans les profondeurs rougeoyantes d'une grotte dans le désert - n'implique pas seulement une seule personne, puisque Nyles finit accidentellement par y inviter Roy (génial J.K. Simmons, qui fait toujours énormément avec peu de temps à l'écran) et Sarah, les piégeant eux aussi dans cette journée.
Horrifiée par la situation et encaissant comme elle le peut les règles de son nouvel enfermement (ils peuvent tous les deux voyager aussi loin de Palm Springs que possible, mais le jour se terminera officiellement lorsqu'ils mourront ou s'endormeront), Sarah testera les limites de cette boucle de toutes les manières auxquelles elle peut penser (meilleure manière de découvrir comment la briser, et elle va sévèrement se crêper le chignon pour y arriver), avant d'être convaincu par Nyles d'essayer de trouver la paix dans cette nouvelle réalité, en embrassant le ridicule de la situation tout en se fixant à l'idée que rien n'a d'importance... sauf eux.
Copyright Hulu |
Finalement, les deux deviennent amis - et même un peu plus au fil du temps - en faisant de ce mojo un état d'esprit commun, et se laisse aller à épouser toute la folie qui les habite (entre les manières les plus ridicules de ruiner un mariage et les plus rocambolesques de mourir).
Errance irrévérencieuse, tragique (aucun des deux, surtout Nyles, ne se souviennent depuis combien de temps ils sont bloqués dans la boucle, peut-être toute une vie qui sait) et loufoque à la fois, ou une boucle temporelle devient autant le paradis parfait (puisque totalement dénué de responsabilités) qu'une prison de verre cathartique obligeant ses protagonistes à travailler sur eux-mêmes (pas uniquement Sarah et Nyles dans leur quête de maturité et de responsabilisation, puisque Roy apprendra de son côté à apprécier les joies du quotidien de sa vie de famille), Palm Springs désarçonne dans sa manière d'aborder aussi simplement son apparat fantastique, que dans sa façon authentique et adulte de concevoir la relation amoureuse - et inévitable - entre deux êtres qui ne peuvent rester ensemble que s'ils sont capable de grandir aussi bien ensemble qu'individuellement.
Parce que bien que la banalité de leur existence plane sur eux comme une punchline infinie à laquelle ils ne peuvent totalement rétorquer, la peur de vivre seul gèle littéralement la spontanéité de leurs sentiments; ils ont beau vivre chaque jour de cette boucle au maximum, ils ne font finalement que vivre une seule journée coincée dans un champ des possibles infinies, ou le hasard est réduit par le manque cruel de risque et leur zone de confort sécurisante (rien ne peut leur arriver), et leur - potentiel - amour à une relation elle aussi sans but ni conséquences.
Pourtant, même s'il laisse planer l'ombre orageuse d'un cauchemar existentiel, le film en est tout l'inverse (sans pour autant renier sa part d'ombre), une sorte de parade existentielle justement, teintée de paillettes piquantes et de bières, prenant les tendres courbes d'une fabuleuse aventure passionnée et initiatique, incarnée à la perfection par le couple Andy Samberg (hilarant et d'une vulnérabilité attachante) et Cristin Milioti (magnétique et solaire).
Copyright Hulu |
Une oeuvre constamment en évolution - comme ses personnages -, arpentant brillamment les terrains sinueux de la comédie purement américaine désopilante (logée entre l'humour idiot de Nyles et le cynisme robuste de Sarah) et de la fable inquiète sur l'immobilisme de toute une génération (les jeunes trentenaires, dont nous, confrontés à des vérités dures sur leur propre existence), autant qu'une romcom douce-amère (interrogeant notamment la durabilité des relations à long terme) et un récit mélancolique flippée sur le temps qui passe (et sa redondance, ici évidemment accentuée à l'extrême), appuyant sur l'artifice d'un éternel recommencement pour mieux jouer aussi bien avec nos attentes qu'avec nos angoisses les plus intimes - le tout avec une utilisation du fantastique limpide et cohérente.
On appelle ça un put*** de classique instantané, mais surtout une pure merveille dont on a cruellement besoin en cette période plus que morose.
Jonathan Chevrier