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[CRITIQUE] : Black Medusa

Réalisateurs : Ismaël et Youssef Chebbi
Avec : Nour Hajri, Rym Hayouni, ...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Drame, Thriller
Nationalité : Tunisien
Durée : 1h36min

Synopsis :
Nada mène une double vie. Pendant la journée, elle est calme, réservée voire mutique, mais la nuit, elle drague les hommes de Tunis. D'abord, elle les laisse la charmer pour mieux les tabasser...


Critique :


Le duo de réalisateurs, Ismaël et Youssef Chebbi, se forment de nouveau après le court-métrage Babylon (2012), avec Black Medusa. Présenté dans la Tiger Compétition de l’édition 2021 du Festival de Rotterdam, nous suivons Nada, jeune femme tunisienne énigmatique dans les rues sombres de Tunis. Si on pourrait la penser en danger, cette femme seule qui marche dans la nuit noire, il s’avère que le danger, c’est elle. 

Utopia Films

Nada a trouvé un certain équilibre en vivant une double vie. La journée, elle est une jeune femme discrète et muette. Elle se sert d’une application mobile pour communiquer. La nuit, elle devient une prédatrice redoutable. Laissant les hommes l’aborder et lui conter leurs déboires (son mutisme aidant à les laisser s’épancher), elle finit par les droguer et leur fait subir de terribles sévices sexuels et/ou mortels dans l’intimité de leur appartement. La dualité de ces deux visages ne se voit pas chez Nada, interprétée brillamment par Nour Hajri, qui conserve des traits neutres, maquillés élégamment pour tromper ses proies. Nous pouvons considérer Black Medusa comme un film noir, par son sujet, mais aussi par son image, filmée par Imed Aissaoui. Le noir et blanc penche beaucoup plus sur des tonalités sombres, gris foncé et noir, que vers les couleurs claires, donnant très peu de contraste à l’image. Les plans de nuit deviennent alors parfois peu visibles (accentués sûrement par le fait de regarder le film chez soi…), mais augmentent la sensation hypnotique. La nuit cède de moins en moins la place au jour, montrant visuellement le basculement de l'héroïne face à un besoin de tuerie sauvage. Elle ne peut plus se contrôler.

Utopia Films

Deux éléments la font basculer dans les ténèbres. Une toute nouvelle collègue, Noura, avec qui elle va entretenir une relation ambiguë, qui aide cependant le spectateur à en savoir plus sur Nada. Et la découverte d’un couteau ancestral chez l’une de ses victimes. Le malheureux refuse le verre d’eau empoisonné qu’elle lui propose, elle s’empare alors du poignard, qui deviendra sa nouvelle arme de prédilection. Les motivations du personnage restent hermétiques, le film étant très vague sur les enjeux d’une telle tuerie. On devine une haine des hommes tenaces, le schéma étant bien trop établi pour n’être qu’une colère passagère. Black Medusa se refuse à devenir un récit policier, ou de faire état d’une quelconque enquête. Le film prend des allures de conte, avec cette voix-off qu’on devine être celle de Nada, qui narre une histoire à l'allure mythologique. Découpé en neuf nuits, Nada se mue en une forme mythologique elle-même, Méduse des temps modernes. Un monstre puissant, symbole de la rage féminine, qui ne connaît aucun tarissement. 
Son incroyable charme plastique sauve le film de l’opacité de ses enjeux et du rythme redondant de sa structure. Black Medusa fascine par son refus de nuance et filme les ténèbres qui envahissent peu à peu son héroïne, tueuse hypnotique et fascinante.


Laura Enjolvy




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