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[SƎANCES FANTASTIQUES] : #43. Heartless

Films IFC


Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's ; mais surtout montrer un brin la richesse des cinémas fantastique et horrifique aussi abondant qu'ils sont passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !

#43. Heartless de Philip Ridley (2009)

Le 11 novembre prochain on verra la première vague de départ de film sur le catalogue de Shadowz, et oui c’est aussi le jeu. On parle ici d’une toute petite vague puisque seuls trois titres tireront leur révérence, quand on sait que la première plateforme de screaming nous abreuve de sorties très régulières depuis maintenant presque une année, c’est extrêmement mineur. Et parmi ces trois titres, entre le thriller mafieux avec un sacré coup de vieux dans les narines qu’est Du Sang sur la Tamise et l’errance cryptique et sensorielle qu’est le génial Images de Robert Altman, on trouve une petite perle méconnue du cinéma de genre, un genre qui se veut être utilisé pour parler de problématique sociétale comme dans les plus grandes heures des zombies de Romero : Heartless.

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L’intrigue se déroule dans les bas fond d’une Angleterre aux allures post-apocalyptique, et va nous raconter la descente aux enfers du doux et bienveillant Jamie, incarné par le beau gosse Jim Sturgess incapable d’avancer dans la vie à cause d’une énorme tache de naissance recouvrant la moitié de son corps et aboutissant sur son visage, gravant sur celui-ci une forme de cœur. Et aussi parce que le monde est devenu une zone de non-droit pour la bonté et la bienveillance. Lorsqu’il vendra son âme au diable, littéralement, ce sera pour faire disparaitre cette particularité handicapante qui l’empêche de vivre, de s’intégrer et de s’accepter lui-même comme digne d’aimer et être aimé. Le film aborde intelligemment le sujet du reniement et du refoulement de soi-même, s’aventurant assez frontalement sur le sujet de l’homosexualité refoulée entre autre. Symboliquement en perdant sa tâche de naissance, il perd son cœur, et se voit contraint d’agir pour les forces du chaos, de devenir lui-même un de ses agents. C’est une très belle façon qu’a le film d’aborder le pacte avec le malin, qui devient la pièce centrale d’un engrenage fatal provoquant des réactions en chaine aboutissant à ce que chaque homme bon se voit contraindre à devenir un rouage chaotique du monde qui l’entoure. Le monde que nous présente le cinéaste Philip Ridley est particulièrement intéressant, c’est presque littéralement l’enfer sur terre dans lequel évolue notre personnage, un enfer peuplé de démons d’apparence bien réel et à leur tête d’un diable au charisme putrescent (très bon Joseph Mawle, ce bon tonton Benjen dans Game of Thrones). Difficile d’ailleurs devant les démons du film de ne pas penser à l’incroyable Citadel que réalisera Ciarán Foy trois ans plus tard, qui proposera également comme créatures malveillante des silhouettes encapuchonnées et trouvera une certaine résonance avec Heartless, même si les films sont très différents. Précisons que cette petite dinguerie est disponible sur Shadowz également.

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Avec un manque de subtilité apparant dans le propos, Heartless utilise le genre horrifique pour exposer une société coincé dans un engrenage de violence entrainant la violence, un monde d’anarchie chaotique que rien ne semble pouvoir enrayer et dans lequel le seul salut est la résignation. Pas la résignation au fait que le monde est devenu l’avatar de l’enfer, mais au contraire que ce n’est pas le cas. Car en vérité la réalité est bien plus miséreuse que maléfique, et les masques ne sont bien que des masques, mais est-ce une bien meilleure chose ? Ne serait-ce pas au moins plus rassurant de pouvoir déclarer que le Mal est la seule cause de la déchéance du Bien ? Heartless feint tout du long une posture manichéenne pour mieux s’en affranchir sur la toute fin, se muant en une œuvre bien plus subtile qu’on pourrait le penser au premier abord. C’est une œuvre pessimiste qui n’est pas très indiqué pour se remonter le moral, mais porté à l’écran avec une incandescence folle qui mérite vraiment un coup d’œil avant son départ. 

 

Kevin