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[CRITIQUE] : True North


Réalisateur : Eiji Han Shimizu
Avec les voix de : Joel Sutton, ...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Animation
Nationalité : Japonais, Indonésien
Durée : 1h33min

Synopsis :
Après que son père ait disparu et que le reste de sa famille ait été envoyé dans un camp pour prisonniers politiques, tristement célèbre, en Corée du Nord, un jeune garçon va devoir apprendre à survivre dans des conditions difficiles, trouver un sens à sa périlleuse existence, et peut-être même s'échapper.




Critique :


À l’issu de quatre mois de résidence au TED New-York, au cours de laquelle il a pu mieux élaborer son projet, le producteur et réalisateur Eiji Han Shimizu projette pour la première fois son long-métrage au festival d’Annecy, qui dénonce les camps de travaux forcés en Corée du Nord.
Malgré les nombreux témoignages de survivants, la Corée du Nord a toujours nié l’existence de ces camps. True North les dénonce en nous montrant un aperçu de la vie de ces prisonniers. Eiji Han Shimizu pense que la prise de conscience passe par l’image, il s’est imprégné des récits qu’il a recueilli pour être le plus proche possible de la réalité.

© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020

Malgré l’animation, qui pourrait créer une distanciation confortable avec le spectateur, le film est exténuant parce qu’il porte des histoires réelles, des histoires vécues.
Nous suivons la famille de Yo-han, un garçon de neuf ans qui vit en Corée du Nord avec sa petite sœur Mihi et ses parents. Mais sa vie bascule le jour où son père est arrêté car considéré comme un ennemi de l’État. Yo-han, sa mère et sa sœur ne sont pas en reste et sont arrêtés la nuit suivante. Ils doivent prendre quelques affaire en quatrième vitesse et doivent partir en camion, avec d’autres détenus vers un endroit inconnu. Nous découvrons l’entrée du camps via les yeux du petit garçon, qui doit lever la tête pour lire l’enseigne au dessus des grilles. L’endroit nous paraît alors immense et surtout menaçant, aidé par la contre-plongé initiée du point de vue de l’enfant. Ils ont juste le temps de s’installer dans un petit cabanon sale et froid, avant de commencer leurs journées harassantes, entre travail à la mine et/ ou aux champs. Personne n’est épargné, du plus jeune au plus vieux.
Il vaut mieux être efficace, silencieux sinon les prisonniers ne font pas long feu. La délation est encouragée, pour obtenir plus de ration qui est de base minuscule, entraînant malnutrition et maladie. Des exécutions publiques sont organisées, pour éviter tout mouvement de révolte et renforcer la peur.

© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020


L’entraide n’existe presque pas, la politique du “chacun pour soi” est la seule qui donne aux prisonniers une chance de s’en sortir à peu près. C’est ce que Yo-han va apprendre petit à petit. Il ne comprend pas pourquoi sa mère et sa sœur recueillent un petit garçon qui vient de perdre sa mère alors qu’ils ont déjà du mal à tous se nourrir. Neuf ans plus tard, pour permettre à Mihi de guérir d’une maladie, il décide à son tour d’utiliser la délation pour obtenir de l’aide. Il va voir alors les avantages d’un tel procédé et en user fréquemment pour nourrir sa famille, au risque de la mettre en danger.
L’animation, rudimentaire à cause d’un budget limité, rend quand même justice à cette histoire inspirée de vrais témoignages. True North illustre des événements censés se passer en secret, permettant ainsi de dénoncer les agissements cruels et inhumains dont on ne parle quasiment jamais, à défaut d’avoir des informations sur ce qu’il se passe. C’est tout l'intérêt du film, qui faute de preuve concrète (à part des photographies des camps en vue satellite), donne une voix aux survivants et un espace où ils seront écoutés et compris. Grâce à son expérience du TED Talk et à son boulot de producteur, Eiji Han Shimizu sait que l’empathie et le soutien d’une cause passent par les images. Sans elles, nous se ressentons pas le besoin de se renseigner, car il est plus confortable de rester dans l’ignorance. Cette ignorance est politique, car c’est consciemment que nous choisissons de tourner les yeux. Ce n’est qu’au moment où nous sommes abreuvés d’images, de données chiffrées, de témoignages qu’un mouvement d’entraide se crée. C’est ce que le réalisateur tente de faire avec True North

© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020


Véritable fresque d’une atrocité se déroulant encore à l’heure actuelle, True North met l’humain au centre d’un récit où se mêlent tragédie, entraide, perte et résilience. Malgré une narration marquée par un cinéma sensationaliste, il évite cependant un côté tire-larme facile pour devenir un véritable message.

Le site du film https://www.truenorth.watch/ recense des informations concernant les camps de travaux forcés. 



Laura Enjolvy




© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020

Yo-han n'a que neuf ans lorsque sa famille est placée dans la ligne de mire des gardes d'État nord-coréens, la faute au patriarche de la famille, qui aurait commis un crime terrible.
Alors qu'il a disparu sans laisser de trace, le garçon, sa petite sœur et sa mère, doivent recommencer une nouvelle vie au coeur d'un camp de travail où, plus communément, un vrai camp de prisonniers.
Jour après jour, ils font un travail dur et physique sans beaucoup de nourriture à la clé, un " bon sort " qui peut basculer d'un moment à l'autre, si la vigilance n'est pas de mise et que l'on ne se soumet pas complètement.
Mais si la mère et la fille tentent de maintenir leur humanité d'une manière ou d'une autre pendant cette rude période, Yo-han lui, à mesure qu'il grandit et apprend à survivre - souvent au détriment des autres -, change de plus en plus...


© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020


Presque aucun pays n'est aussi hermétique et mystérieux pour le monde entier - ou presque -, que la Corée du Nord, tant on ne sait pas ou peu de chose du quotidien au coeur de cette dictature totalement assumée et tolérée, totalement isolée et qui ne laisse transparaître que ce qu'il désire dévoiler à travers des images officielles.

À tel point que la seule solution pour fissurer ce silence scrupuleusement orchestré autour de ces camps, est de tout simplement de trouver des personnes qui ont réussi à s'enfuir du pays, pour rendre compte de leurs expériences; des expériences souvent surréalistes, cauchemardesques, difficiles à concilier avec l'idée de ce que l'on se fait de la vie dans la société moderne.
Bien qu'il prenne la forme d'un long métrage d'animation, True North du scénariste-réalisateur Eiji Han Shimizu - qui ne connaît pas personnellement ces atrocités -, n'est certainement pas pour les enfants, et c'est d'ailleurs loin d'être le premier au coeur de la riche cuvée du festival d'Annecy.

Aperçu rare sur le quotidien à l'intérieur d'un camp de prisonniers nord-coréen, cette histoire exténuante et poignante à la fois, douloureusement fidèle à la réalité, est une oeuvre nécessaire et testamentaire pour quiconque souhaite avoir un regard pertinent et percutant, sur l'un des plus récents crime contre l'humanité.


© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020


Parfois maladroit visuellement, avec des graphismes 3D réalistes et rugueux, dont l'aspect rudimentaire rappellerait presque les premiers balbutiements du procédé, le film réussit pour la prouesse de conserver sa puissance évocatrice et sa valeur de choc frontal du début à la fin, illustrant des événements que peu de personnes ont eu la " chance " de pouvoir mirer.
Car tout l'intérêt de la péloche réside justement dans la façon dont il essaie, parfois avec les moyens du bord, de rendre visible l'invisible, de fournir des images d'un phénomène qui est resté invisible pendant plus d'un demi-siècle, et qui se poursuit encore aujourd'hui, dans l'indifférence générale (il n'y a presque aucune image disponible des cinq camps de prisonniers politiques connus de Corée du Nord, dans lesquels environ 200 000 à 300 000 personnes vivent dans des conditions surhumaines, souffrant de famine, de maladie, de torture et d'un travail éreintant).
Et les détails qu'il fournit sont brutaux : des hommes et des femmes émaciés (aux visages et aux corps squelettiques, souvent couverts de plaies) se disputant des restes de nourriture ou sont matraqués à mort par des gardes impitoyables, des exécutions publiques régulières que tous les détenus sont obligés de surveiller, des viol et avortements forcés; travaux forcés qui peuvent durer jusqu'à dix-huit heures par jour, avec des travailleurs qui meurent souvent sur leur lieu travail,...



© Festival international du film d’animation d’Annecy 2020

Aussi sombre que cela puisse paraître, Shimizu arrive pourtant, parfois, à laisser émerger quelques bribes d'humanité même s'il a tendance à se perdre dans un storytelling purement Hollywoodien (entre détours et rebondissements pas toujours utiles).
Reste que pour un premier passage derrière la caméra, il cogne dur et fort, et croque avec minutie ce qui restera un devoir de mémoire et d'actualité, furieusement douloureux et nécessaire.


Jonathan Chevrier 



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