[TOUCHE PAS NON PLUS À MES 90ϟs] : #59. Friday
Photo by New Line - © 1995 New Line Cinema |
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 90's c'était bien, tout comme les 90's, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, prenez votre ticket magique, votre spray anti-Dinos et la pillule rouge de Morpheus : on se replonge illico dans les années 90 !
#59. Friday de F. Gary Gray (1995)
Au coeur des 90's, bien aidé par les efforts bouillants sur pellicule de Spike Lee, John Singleton et des frangins Hughes, qui auront façonnés avec force tout le versant dramatique des " gangsta stories " de la culture ciné US, en insufflant une âme à leurs oeuvres tout en exposant des thèmes universels (l'importance de la famille, le processus gerbant d'aliénation sociale ayant transformé les quartiers de L.A et consorts, en véritables zones de guerre,...), certains cinéastes se sont lancés dans la volonté salvatrice de dédramatiser ces bouleversantes et authentiques tranches de vies du ghettos, en jouant pleinement la carte de l'humour et même parfois, du pastiche pur et simple - coucou les frangins Wayans.
Résolument moins potache mais tout aussi drôle, et servant avant tout et surtout de véhicule pour gonfler un brin le statut de rappeur/comédien/potentiel next big thing de Ice " Bouboule Forever " Cube (révélation déchirante du Boyz in The Hood de Singleton), F. Gary Gray démystifiait la face cachée des banlieues de L.A. en atténuant subtilement leur aspect tragique et terrifiant, pour y montrer aussi et surtout la vie banale et réaliste de jeunes adultes ne sachant, comme la majorité d'entre nous à cet âge, quoi faire de leur existence.
Photo by New Line - © 1995 New Line Cinema |
Soit les aléas de Craig (Cube), lancé dans un vendredi tous sauf idyllique : viré de son taf alors qu'il était en congé (true story) et emmerdé par une petite amie furieusement jalouse, il va devoir sauver les miches de son BFF Smockey (Chris Tucker, délirant), petit dealer au débit mitraillette qui flirte dangereusement avec les embrouilles, essayer de trouver un taf avant de se faire virer de la maison familial (il est un brin martyrisé par ses proches, juste un brin), mais aussi et surtout, affronter la terreur du quartier, Debo...
Telle une épopée " Linklaterienne " sur pellicule (toute propension gardée), Friday semble ne rien raconté sur une unité de temps très réduite - une journée, comme l'indique simplement son titre -, et pourtant tout dire à la fois, non sans un certain esprit régressif (les mecs pensent qu'aux filles, au sexe, à fumer des joints et à l'argent), posant sa caméra au coeur du quotidien déjanté de South Central, ou les voisins sont aussi barrés que les propres membres de sa famille; ou les leçons de la vie peuvent s'apprendre aussi bien dans des toilettes pendant que notre père (John Witherspoon, génial) coule un bronze devant nous, que le cul vissé sur une chaise devant son palier.
Le ghetto n'est pas qu'un terreau pour apprentis gangsters ou dealers, il est aussi un endroit ou les gentils losers/glandeurs peuvent devenir des hommes en assumant les épreuves de la vie.
C'est tout con, mais F. Gary Gray rétablie gentiment cette vérité avec humour, une B.O. au poil et en brossant le portrait de personnages certes simplistes mais attachants.
La meilleure comédie du genre, avec le résolument plus décomplexé et parodique Spoof Movie.
Jonathan Chevrier