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[CRITIQUE] : Invisible Man


Réalisateur : Leigh Whannell
Acteurs : Elizabeth Moss, Oliver Jackson-Cohen, Storm Reid, Aldis Hodge,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Fantastique, Épouvante-Horreur, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h05min.

Synopsis :
Cecilia Kass est en couple avec un brillant et riche scientifique. Ne supportant plus son comportement violent et tyrannique, elle prend la fuite une nuit et se réfugie auprès de sa sœur, leur ami d'enfance et sa fille adolescente.
Mais quand l'homme se suicide en laissant à Cecilia une part importante de son immense fortune, celle-ci commence à se demander s'il est réellement mort. Tandis qu'une série de coïncidences inquiétantes menace la vie des êtres qu'elle aime, Cecilia cherche désespérément à prouver qu'elle est traquée par un homme que nul ne peut voir. Peu à peu, elle a le sentiment que sa raison vacille…




Critique :


Nerveux, brutal et d'une cruauté rare, porté la prestation habitée d'un Logan Marshall-Green transcendé, Upgrade, bouillant thriller SF/cyberpunk, a gentiment inscrit Leigh Whannell au panthéon des honnêtes faiseurs de séries B à suivre de très, très près, au coeur d'une jungle Hollywoodienne où il n'est pas si simple de s'inviter.
En attendant de le voir s'attaquer au remake de New York 1997 - difficile de s'enthousiasmer pour le coup -, le voilà qu'il reprend à son compte la légende de l'homme invisible près de deux décennies après le vénéré Paul Verhoeven, et son bouillant et sombre Hollow Man, pour lui offrir un bon coup de botox nécessaire après son vrai-faux départ amorcé il y a quelques années du côté d'Universal (feu le Monsters Universe...).



Indiscutablement dans l'ombre de l'adaptation du Hollandais Volant, tout en louchant agréablement du côté du mésestimé Unsane de Steven Soderbergh (qui mérite sa réhabilitation après un passage en salles un brin timide), le cinéaste fait de son Invisible Man une relecture habile du mythe de H.G. Wells, et croque ce qui est sans doute le film le plus terrifiant à ce jour, puisqu'il grossit à peine le trait de la toxicité masculine et de la violence domestique, dans une intrigue douloureuse et intense ou le fantastique s'immisce sournoisement dans le réel, pour en amplifier sa puissance dévastatrice.
Simple mais fort bien articulé autour des mésaventures - pour être poli - d'une femme battue et persécutée par un petit ami violent, (Elisabeth Moss, absolument parfaite et crédible), qui arrive miraculeusement à s'en extirper avant que celui ne se suicide (lui laissant 5 millions de dollars dans son testament), et ne vienne la persécuté sans que personne ne puisse le soupçonner, le film parle avec une justesse incroyable du harcèlement, de la peur constante des femmes victimes et de la difficulté qu'elles peuvent avoir d'en parler au coeur d'un système sourd et déshumanisé, qui choisit de ne pas écouter mais avant tout et surtout, de ne jamais les comprendre.




Pertinent, il explore sous toutes les coutures la peur constante des victimes d'harcèlements et de violences, autant d'un point de vue extérieur (le bourreau manipule son entourage et les situations pour retirer tout soutien à sa proie, doppant même sa méthodologie terrifiante une fois devenu invisible) qu'intérieur (la peur de l'abandon, la solitude et l'isolement des victimes qui n'osent pas parler ni juridiquement se défendre, avec la certitude de n'être ni écouté, ni comprise), tout en plaçant habilement le spectateur dans une situation de témoin qui ne peut absolument pas douter de ce qu'il voit : il sait que tout est vrai et que la pauvre Cecilia n'imagine rien de son intense calvaire, rendant de facto l'expérience aussi anxiogène que douloureusement réaliste.
L'invisibilité n'est alors plus alors comme jadis, un pouvoir qui mène à la perversion, mais ici un outil qui la nourrit, la décuple (et encore plus dans la psyché d'un agresseur qui n'avait décemment pas besoin de cela pour être dangereux), lui offrant une finalité dans l'acte encore plus imposante, tant la violence psychologique est définitivement plus forte encore que si elle était physique.
Et ce qui est réellement invisible dans le long-métrage, c'est tout ce que le metteur en scène via sa réalisation paranoïaque et froide (tout s'enchaîne autour du visible, de l'invisible et de l'audible), c'est au final tout ce qu'il arrive à nous faire ressentir sans rien - ou très peu - nous montrer, même dans un ultime tiers qui semble parfois ne plus trop savoir ou aller.




Épurant au maximum ses effets (le fantastique est insidieux et est au service de son intrigue et non l'inverse, à la différence de quasiment toute production Blumhouse du moment), tout en étant très influencé par l'épouvante nippone (il oblige le public à ses confronter aussi bien à ses pires travers que ses plus terribles cauchemars), Leigh Whannell ancre son histoire dans une réalité sinistre et macabre, et fait de son Invisible Man un thriller psychologique viscéral et envoûtant, certes un poil prévisible pour les puristes, mais joliment solide.
Une put*** de réussite, rien de moins.


Jonathan Chevrier





Après s’être fait connaître dans les années 2000 comme le collaborateur, ami et scénariste fidèle de James Wan, œuvrant notamment sur le scénario de Saw dont ils doivent tout deux leur carrière à l’énorme succès planétaire qu’est devenu le film, puis la franchise, Leigh Whannell semble depuis quelques temps bien décidé à sortir de l’ombre de celui que l’on considère aujourd’hui comme l’un des maitres, si ce n’est le maitre incontesté de l’horreur contemporaine. Et son nouveau film semble confirmer l’agréable surprise qu’on avait eu avec Upgrade : ce monsieur risque bien de nous offrir une pelletée de série B très sympa chez Blumhouse si on continue à le laisser faire. Et bien continuons, s’il vous plait. Vraiment.
C’est une étrange contrée que la maison de production de Léon Blum. Un modèle de production unique duquel émerge une grosse part de films abominables, et au milieu de tout ça parfois, une pépite. C’est ainsi qu’en 2020, la firme a pu sortir coup sur coup un des films les plus abominable de ce début d’année avec Nightmare Island, et deux semaines plus tard débarquer avec Invisible Man, très chouette réinterprétation moderne du personnage créé par H.G. Wells devenu un monstre de cinéma classique au côté de Dracula, La Momie, La créature de Frankenstein, etc. Et si le film semble un peu facilement écrit par instant, il reste que c’est une adaptation extrêmement originale, dans la lignée du précédent film du réalisateur qui semble doucement se définir une patte très claire de cinéaste.




Cette patte elle va entre-autre se retrouver dans son approche technologique du mythe. Pas de formule scientifique, et rien d’irréversible dans l’invisibilité de cette nouvelle itération du monstre classique, mais belle est bien une combinaison futuriste ultra-élaboré aux accents cyberpunk (qui certes, teintée de blanc, lui donne une apparence de balle de golf humaine). De plus la science ici n’est pas un élément qui va échapper au contrôle de l’homme et en faire un monstre inhumain : c’est au contraire par un contrôle sans faille que l’antagoniste, déjà d’un penchant monstrueux dans sa condition humaine, va acquérir des capacités qui lui permettront de pleinement embrasser sa froide nature perverse et manipulatrice. Le film est déjà très intéressant dans cet inversement de propos sur le contrôle, et en faisant de son personnage un control freak psychopathe il parvient à traiter un autre sujet assez actuel plutôt intelligemment : une femme confrontée à un pervers narcissique.
Dans ce domaine, le film n’atteint pas la qualité d’écriture de Paranoïa de Soderbergh. Parce que si Invisible Man expose bien les mécanismes de manipulation de l’entourage utilisé par l’antagoniste pour isoler sa proie, son talent pour s’exposer en victime, susciter l’empathie et faire passer sa cible pour folle, tous ces subterfuges pour finalement obtenir un ascendant psychologique et un contrôle total sur la victime, reste que la position du spectateur ne laisse aucune place au doute sur la réalité de ce qui arrive à l’héroïne. Son entourage doute de sa parole, mais nous non, car malgré le caractère capilotracté de ses déclarations, on a vu tout ce qu’elle a vu et pour nous ça ne sera jamais remis en cause. Et c’est assez normal puisque l’on sait qu’on va voir un film sur l’homme invisible, et qu’il serait donc assez ridicule de chercher à nous faire douter de l’existence de celui-ci. Au lieu de ça on va embrasser le point de vue de Cecilia, et subir avec elle la violence des agissements de son bourreau et l’incompréhension de son entourage, ce qui est finalement une note d’intention autre que celle de Soderbergh dans Paranoïa, mais loin d’être dénué d’intérêt. L’expérience intime est bien moins prégnante que devant un film qui cultiverait le doute, ce point de vu qu’on fait adopté au spectateur fait du film une œuvre à vocation de spectacle comme peuvent en témoigner des scènes d’action vraiment nerveuses et très bien troussé rappelant beaucoup le travail de Whannell sur Upgrade, mais éloignant grandement le film de l’horreur psychologique intimiste, dans laquelle il réussit néanmoins merveilleusement quand il décide de s’y mettre avec un jeu de mise en scène habile sur l’invisible.




Reste que voir ces mécanismes balancés de façon à ce qu’on les comprenne très facilement, emballé dans un film de divertissement extrêmement bien produit et vraiment efficace, c’est une très bonne façon de les assimiler.
Invisible Man trouve un équilibre assez parfait entre l’horreur psychologique, le divertissement horrifique, ses concepts de science-fiction et sa réinterprétation d’un mythe de cinéma incontournable. Un tel équilibre est je trouve, assez miraculeux, et confirme le sentiment qu’on avait après Upgrade : La fantabuleuse émancipation de Leigh Whannell est une excellente chose pour le cinéma de divertissement made in Blumhouse et on a très hâte de le voir travailler sur de nouveaux projets.

Kevin


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