[CRITIQUE] : Ville Neuve

Réalisateur : Félix Dufour-Laperrière
Acteurs : Robert Lalonde, Johanne Marie Tremblay, Théodore Pellerin, ...
Distributeur : Urban Distribution
Budget : -
Genre : Animation, Drame
Nationalité : Canadien
Durée : 1h16min

Synopsis :
Un été en bord de mer sur les côtes arides de la Gaspésie. Joseph s’installe dans la maison d’un ami. Il convainc Emma, son ex-femme, à venir l’y rejoindre. Tandis que la campagne référendaire de 1995 sur l’indépendance du Québec bat son plein, des maisons brûlent, des discours s’affrontent, un couple se retrouve et s’aime. Se défera-t-il à nouveau ?



Critique :

On ne sort pas indemne de #VilleNeuve. Son intimité, sa poésie reste en nous pendant longtemps. Animation épurée, comblée par une forte émotion. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/rXi4y8q3Mv

— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) July 7, 2019

Une maison sur la côte. Un couple désuni. Un homme qui reste dans son passé au lieu d’affronter son présent. Une femme qui garde espoir. Pendant un référendum qui secoue le Québec de toute part, Joseph et Emma s’enferment et rêvent d’une nouvelle vie ensemble. Mais est-elle possible ?
Félix Dufour-Laperrière, réalisateur est connu pour ces films expérimentaux, dont Transatlantique (2014), essai documentaire qui est aussi son premier long-métrage. Pour Ville Neuve, il décide de lier l’intime (la réunion d’un couple divorcé) à l’histoire collective d’une nation (le référendum de 1995, savoir si le Québec doit se séparer du Canada ou non). Intégralement dessiné à l’encre de chine, le film a secoué le Festival d’Annecy cette année. Par sa poésie, par sa force, mais aussi grâce à son réalisateur impliqué et généreux (les chanceux ont pu avoir des dessins originaux du film). Que vaut donc cette perle d’animation en noir et blanc ?

On ne peut pas sortir indemne de cette vibrante quête d’idéal et d’indépendance, qui passe et passera toujours par la création. Joseph a baissé les bras, après avoir combattu, fougue de la jeunesse, une liberté d’expression. Plein d’amertume (et d’alcool), il se complaît dans un passé révolu. Emma, elle, est restée lucide. Parce qu’elle a eu un enfant à élever, leur enfant, Ulysse. Mais elle n’a jamais cédé. C’est cet espoir qu’elle tente d'inculquer à Ulysse. En lui parlant du premier référendum des années 80, mais aussi de laisser une place à son père (et répondre à ses lettres), ainsi que sa passion pour l’art (la projection du film de Tarkovski, Andrei Roublev). C’est pourquoi elle décide de venir rejoindre Joseph quand celui-ci lui demande. Voir si la flamme est toujours là ...
Ce n’est pas un hasard si le réalisateur a fait de ces personnages des poètes. Joseph, n’écrit plus. Emma s’apprête à être publier et lui lit un passage (qui donne droit à la meilleure séquence du film). Les mots jouent un rôle important dans Ville Neuve et les acteurs récitent, mais surtout incarnent cette danse de l’encre sur le papier blanc.
 

La fin, avec la cloche de Tarkovski, renforce l’espoir qu’à essayer de distiller Félix Dufour-Laperrière pendant Ville Neuve. Tant qu’il y aura des personnes pour écouter, créer et transmettre, des personnes qui auront soif d’un idéal, tout ira bien.


Laura Enjolvy