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[CRITIQUE] : Pupille


Réalisateur : Jeanne Herry
Acteurs : Sandrine Kiberlain, Gilles Lellouche, Elodie Bouchez, Olivia Côte, ...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Drame
Nationalité : Français
Durée : 1h47min

Synopsis :
Théo est remis à l'adoption par sa mère biologique le jour de sa naissance. C'est un accouchement sous X. La mère à deux mois pour revenir sur sa décision...ou pas. Les services de l'aide sociale à l'enfance et le service adoption se mettent en mouvement. Les uns doivent s'occuper du bébé, le porter (au sens plein du terme) dans ce temps suspendu, cette phase d'incertitude. Les autres doivent trouver celle qui deviendra sa mère adoptante. Elle s'appelle Alice et cela fait dix ans qu'elle se bat pour avoir un enfant. PUPILLE est l'histoire de la rencontre entre Alice, 41 ans, et Théo, trois mois.



Critique :

Jeanne Herry avait signé la surprise de 2014 avec son premier film Elle l’adore. Sandrine Kiberlain incarnait une femme, menteuse sur les bords, en adoration totale pour un chanteur joué par Laurent Lafitte, prête à faire n’importe quoi pour lui. Ce film mélangeait deux genres, le thriller sombre et la comédie d’une main de maître, un très bon exercice pour un tout premier long-métrage. Elle a ensuite réalisé deux épisodes de la merveilleuse série française Dix pour cent et elle vient d’annoncer qu’elle sera au commande du remake de la série Fleabag avec Camille Cottin.



Pour son deuxième film, la réalisatrice décide de s’attaquer à un sujet beaucoup plus lourd et sensible, celui de l’adoption. Pupille suit donc le parcours d’un bébé, de sa naissance sous X, son placement en foyer jusqu’à son adoption par une femme qui n’y croyait plus. Jeanne Herry propose un regard inédit au cinéma sur ce thème. Au lieu de se concentrer sur les futurs parents (ici en l’occurrence, la future mère), la réalisatrice décide de placer son point de vue sur l’enfant et son parcours, étape par étape. Elle s’attache donc énormément aux procédures administratives, à l’attente. Jeanne Herry filme cette jeune fille dépassée par les événements, pas du tout préparée à élever un enfant, ni à être mère. Mais la caméra ne la juge jamais, acceptant sa décision, tout comme l’assistante sociale, qui fait preuve d’empathie, inattendue pour la jeune fille (et pour le spectateur, qui a l’habitude de voir des films qui jugent les mères à chaque instant). La réalisatrice arrive à trouver le ton juste, entre le blabla juridique des procédures et l’émotion. À partir de là, s’enclenche une machine de guerre, entraînant de nombreuses personnes pour s’occuper du bébé Théo et lui trouver les meilleurs parents possibles.



La réalisatrice retrouve Sandrine Kiberlain et Olivia Côte, les deux actrices de Elle l’adore, dévouées cette fois-ci au bonheur des enfants, les protégeant de tout, même parfois de leur parents. Sandrine Kiberlain trouve encore une fois son épingle du jeu, en campant cette éducatrice spécialisée haut en couleur et en bonbon ! On la trouve souvent à mâchouiller bonbon ou chewing-gum, ce qui amène une touche de comédie malgré la situation. Nous retrouvons aussi Elodie Bouchez (une belle année 2018 pour cette actrice avec Pupille, mais aussi Gaspard va au mariage, Fleuve noir et Guy), cette aspirante mère célibataire touchante. Gilles Lellouche trouve ici un rôle plus doux que d’habitude, et casse en même temps ce stéréotype qui dit qu’il n’y a que les femmes qui savent s’occuper de bébés. Ce père d'accueil au bout du rouleau reprend confiance en lui et en ce qu’il fait auprès de Théo.



Pupille propose un nouveau regard sur l’adoption et arrive à créer une émotion aussi pure qu’intense grâce à sa finesse d’écriture et aux interprétations des acteurs et actrices. Il fait partie des pépites de cette fin d’année.

 
Laura Enjolvy







Un film sur l'adoption : voilà le sujet du deuxième long-métrage de Jeanne Herry, qui a d’abord réalisé Elle l’adore en 2014. Un sujet difficile, délicat, autant par son contenu que par sa représentation. Pupille retrace le parcours pendant deux mois d’un bébé abandonné dès sa naissance, de sa venue au monde à son adoption. Deux mois, c’est le temps de rétractation qui est laissé à la mère biologique, et le temps que les services sociaux ont pour trouver une famille à ce pupille.
Sandrine Kiberlain a de nouveau été choisie par Jeanne Herry pour jouer dans son film : l’actrice incarne une employée des services d’aide à l’enfance, qui choisit de confier le bébé à Jean, un homme mûr rôdé au rôle de famille d’accueil, incarné par Gilles Lellouche. Lellouche fait d’ailleurs montre d’une sensibilité surprenante, bien que très appuyée par l’écriture du film : on devine une volonté de renverser les clichés familiaux et de mettre en avant un homme dont la vie est entièrement dédiée à s’occuper d’enfants. Cela fonctionne plutôt bien, et ce rôle est à l’origine des quelques scènes drôles du film pendant les interactions entre Lellouche et le bébé.





Mais le soleil du film est sans conteste Élodie Bouchez qui joue le rôle d’Alice, une femme célibataire qui ne peut avoir d’enfants. Les flashbacks montrant son parcours et surtout, sa bataille pour l’adoption, sont très justes et parmis les plus émouvantes du film. À travers son personnage se dessine la réflexion sur la mono-parentalité, et sur ce qui est bon et juste pour un enfant. Car tel est le propos du film : il ne s’agit pas de confier un enfant à des parents adoptifs parce qu’ils veulent avoir un enfant ; il faut confier un enfant à des parents qui seront ce qu’il y a de mieux pour lui - y compris une mère célibataire.
Une grande galerie de personnages peuple ce film : entre les psychologues, les services d’aide à l’adoption, les services sociaux, la mère biologique de l’enfant (et son propre parcours à la maternité entre le moment où elle accouche et celui où elle décide de quitter son enfant), le film est rempli d’histoires qui se tissent et vont se lier au fil du film, enroulées autour du destin du petit pupille.




Ainsi, Pupille est un film choral, mettant en scène une foule de personnages, chacun se battant à sa façon, surmontant ses propres défis, mais évoluant vers un même but : le bonheur de l’enfant. Un film dont même les longueurs ont un sens, exploitant ces deux mois suspendus dans le temps, qui surprendront et éclaireront l’adoption d’une lumière nouvelle. Les parents seront touchés à coup sûr.


Victoire