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[CRITIQUE] : Chien de Garde


Réalisateur : Sophie Dupuis
Acteurs : Jean-Simon Leduc, Théodore Pellerin, Maude Guérin,...
Distributeur : Fratel Films
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Canadien.
Durée : 1h27min

Synopsis :
JP et son jeune frère Vincent, un être impulsif et instable, sont comme deux petits princes de la rue. Leur royaume ? Verdun, quartier de Montréal, qu’ils sillonnent en « collectant » pour leur oncle, un petit malfrat plus dangereux qu’il n’y paraît. Dans le même appartement bruyant s’entassent les deux frères, leur mère Joe, alcoolique aux périodes de sobriété fragiles, et Mel, la fiancée de JP, qui, comme lui, aspire à mieux. Mais peut-on jamais échapper à son milieu, à son sang ?



Critique :

Le cercle familial est le socle de toute une vie, le point d'ancrage qui nous permet de nous construire où, inversement, nous détruire, aussi contradictoire que cela puisse être.
Une définition qui colle parfaitement au quotidien de JP, ténébreux magouilleur d'une famille dysfonctionnelle dont il est le repère masculin majeur, avec toute la complexité (et la perversité, parfois) que cela comporte.
Subissant sa vie plus qu'il ne la vit, constamment sur le fil du rasoir entre une mère alcoolique et un frangin légèrement déficient mental et à la fougue bestiale, il assume la casquette bien trop lourde de collecteur de dettes pour son oncle, trempant dans un monde du crime dont il veut se ranger, même si c'est un combat perdu d'avance.



Véritable fable moderne coup de poing au réalisme social criant de vérité, entre drame familial et thriller noir gentiment enlacé entre le cinoche européen (on pense instinctivement aux cinémas de Larry Clark et Nicolas Winding Refn période Pusher), Chien de Garde, premier long-métrage puant de maîtrise de Sophie Dupuis, est de ces petits bijoux d'équilibristes qu'on ne voit absolument pas venir, mais qui nous marquent furieusement la rétine par sa densité et son insolente puissance.
Étouffant autant son auditoire qu'un héros désabusé et éprouvé, tentant par tous les moyens de s'en sortir, par la force d'une mise en scène nerveuse et bestiale, au plus près des corps (appuyée par un sound design au couteau) mais également grâce à une écriture juste et sincère, entièrement focalisée sur ses personnages, à l'interprétation impliquée (le duo Théodore Pellerin/Jean-Simon Leduc en tête), Chien de Garde, chronique désenchantée et destructrice sur une famille toxique et ambivalente, entre manipulations et dévotion, est un sommet de cinéma sensitif, poignant et troublant.
L'enfer est partout, même dans les rues (supposément) accueillantes de Montréal.


Jonathan Chevrier