[CRITIQUE] : States of Grace
Réalisateur : Destin Cretton
Acteurs : Brie Larson, John Gallagher Jr, Kaitlyn Dever, Rami Malek,...
Distributeur : Version Originale / Condor
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h36min.
Synopsis :
Sensible et déterminée, Grace est à la tête d'un foyer pour adolescents en difficulté. Parmi les jeunes membres de son équipe, diversement expérimentés, la solidarité et le bon esprit sont de mise. Jusqu’à l’arrivée soudaine d’une fille tourmentée qui ignore les règles du centre et renvoie Grace à sa propre adolescence… pas si lointaine.
Critique :
Brie Larson, pour beaucoup son nom ne dit pas grand chose, mais pour les cinéphiles purs et durs, il est synonyme d'exception depuis quelque temps maintenant.
Pointant le joli bout de son nez dans le délirant et mésestimé Scott Pilgrim vs The World dans la peau de l'ex-petite amie du héros Scott " Michael Cera " Pilgrim, elle a par la suite trainé son impressionnant minois en tant que second couteaux, entre autres dans le populaire 21 Jump Street, la série Community, mais surtout en tant que sœurette de Joseph Gordon-Levitt dans Don Jon et ex-love interest du tout aussi passionnant à suivre Miles Teller, dans le précieux The Spectacular Now, autre phénomène indé ayant fait grand bruit avant sa sortie.
Il était écrit qu'elle obtiendrait prochainement, un grand rôle qui la propulserait sur les cimes de la A-List d'Hollywood.
Et si beaucoup pensait que cela serait celui de Sarah Connor dans le reboot/suite/prequel de la franchise Terminator - rôle finalement confié à la tout aussi sublime Emilia Clarke -, force est d'admettre que la jolie Brie l'a obtenu bien avant via ce States of Grace, excellent drame social indé ou elle irradie la bande de sa beauté et de son talent.
Dans States of Grace, sortie triomphant aussi bien de Locarno que du récent Festival ricain de Deauville, elle incarne Grace justement, une éducatrice au sein d'un foyer de jeunes adolescents physiquement et mentalement abusés.
Dans une vie ou ils n'ont connus que l'enfer, leur seul lueur d'espoir d'un avenir plus rose leur est insufflé par la force et la détermination de leurs surveillants, eux-même douloureusement frappé par la dureté de l’existence...
Signé par un metteur en scène qui fait ses débuts aussi bien derrière la caméra qu'à la plume d'un script, Destin Cretton, qui maitrise on ne peut mieux son sujet de départ puisqu'il fut lui-même, éducateur dans un centre de jeunes en difficultés - dont il tira d'ailleurs au départ, un court métrage en 2008 -, States of Grace est un premier long métrage impressionnant, à la direction d'acteurs qui n'a d'égale que son exceptionnel scénario.
Personnages attachants loin des stéréotypes, une morale sans aucun jugement, une esthétique soignée, une habile gestion des sentiments, passant du rire aux larmes avec une facilité et une justesse déconcertante, et intelligemment focalisé sur le personnage de Grace - ce qui permet de s'évader de la dureté du centre, parfois éprouvant psychologiquement -, le film décrit une histoire simple mais admirablement mis en scène et joué, et qui a en plus le bon gout de ne jamais tomber dans un misérabilisme ou un pathos de supermarché détestable.
On ne doute pas un seul instant de la douleur et des angoisses ressenties par toutes ses générations abusées, violentées et désespérées, que ce soit ses formateurs qui forcent le respect ou ses jeunes membres, tous plus bouleversants les uns que les autres, notamment Marcus et Jayden, le premier se réfugiant dans le rap emplit de rage, et la seconde dans la mutilation, faisant ressurgir les démons du passé de son éducatrice, campée par une Brie Larson lumineuse, dans ce qui est à ce jour, son plus beau rôle.
Dans la peau de Grace, elle-même traumatisée par une enfance difficile des causes d'un père monstrueux, elle éclabousse la bande de son talent, tout en fragilité et en détermination, elle est totalement habitée par son rôle au point de lui offrir une épaisseur remarquable.
A ses côtés, l'excellent John Gallagher Jr lui donne parfaitement le change dans les traits justes de Mason, son fiancé et collègue.
Idem pour le génial Rami Malek, qui apporte une bonne dose d'humour salvatrice dans la peau du nouvel éducateur maladroit Nate.
Crédible, réaliste (on se croirait presque face à un documentaire), beau et mémorable, il est un vibrant - mais trop court - hommage à tous ses artisans de l'espoir, ses éducateurs de foyers pour jeunes adolescents plein de courage et de dévotion.
Une œuvre nécessaire et intime que l'on n'a pas vu venir et dont on ne sort pas indemne, mais qui vous donne encore plus envie de croquer dans la vie à pleine dents.
Tout simplement l'immanquable du mois.
Jonathan Chevrier