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[CRITIQUE] : Les Olympiades


Réalisateur : Jacques Audiard
Acteurs : Lucie Zhang, Makita Samba, Noémie Merlant,...
Distributeur : Memento Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Français.
Durée : 1h45min

Synopsis :
Le film est présenté en compétition au Festival de Cannes 2021

D'après trois nouvelles graphiques de l’auteur américain Adrian Tomine : Amber Sweet, Killing and dying et Hawaiian getaway.

Paris 13e, quartier des Olympiades. Emilie rencontre Camille qui est attiré par Nora qui elle-même croise le chemin de Amber. Trois filles et un garçon. Ils sont amis, parfois amants, souvent les deux.



Critique :


Pour son dernier film, Jacques Audiard s’est associé avec deux scénaristes : la première est Céline Sciamma, une des figures les plus en vogue du moment. La seconde est Léa Mysius, acclamée pour son Ava, qui avait déjà fait un petit passage à Cannes lors de la 56ème édition de la Semaine de la critique. L’oeuvre est l’adaptation  de trois nouvelles graphiques de l’auteur américain Adrian Tomine.
Les Olympiades est un quartier de Paris situé dans le 13ème arrondissement, composé de grandes tours, entourée de restaurants asiatiques et échoppes de bubble tea, une des boissons à la mode chez les adolescents et jeunes adultes. On y retrouve une belle mixité sociale. Comme tous les quartiers intra-muros il reste très cher mais conserve un côté populaire ainsi qu’une diversité ethnique. Contrairement à ce que le titre pouvait laisser penser, Les Olympiades n’est pas un film social, bien qu’il attribue une place prépondérante à la représentation de son quartier. C’est une histoire d’amour et de jeunesse, de la solitude à l’attachement dans une grande ville qui laisse peu de place à ses habitants.

Copyright Shanna Besson

On y retrouve trois personnages : Emilie, qui vient d’une famille chinoise et qui enchaîne les petits boulots modestes voire désagréables (on y retrouve une représentation plutôt fidèle d’une centrale d’appel, poste harassant), Camille, qui prépare son doctorat, et Nora, qui reprend ses études après une carrière dans l’immobilier. Ils couchent ensemble, tombent amoureux (ou pas), se disputent et s’attachent, au milieu d’un quartier composé de béton, magnifié par quelques beaux plans. Les dialogues du film sont sur-écrits mais les paroles sonnent avec justesse, combinant l’élégance d’une mise en scène soignée avec un naturalisme discret. Il faut dire que les sentiments des personnages sont représentés avec grâce et leurs personnalités aussi diverses soient-elles sont toutes bien imaginées, permettant une identification plutôt aisée. Le segment sur l’histoire de Nora, moquée pour sa ressemblance avec une cam girl, ces femmes qui offrent des show sexy sur internet, évoque discrètement le sujet du slut shaming, la tendance à se moquer des filles qui affichent une sexualité libérée. La quête de plaisir sexuel et l’égocentrisme d’Emilie se révèle finalement touchant dans les défauts de la protagoniste qui s’affiche comme un miroir imparfait face au spectateur. Camille est une figure indécise, non pas dans la composition du personnage mais dans sa caractérisation. Le jeune homme peine à trouver un équilibre dans sa vie sentimentale comme sexuel et s’attire les foudres d’Emilie.
Le souvenir de Dheepan, largement contesté pour sa représentation de la banlieue, pouvait laisser quelques craintes. Les Olympiades aurait pu être un film bourgeois sur les tribulations sentimentales de jeunes adultes en quête de nouvelles sensations sexuelles mais il évite largement les écueils du genre, se contentant de la représentation discrète d’une classe moyenne. Il est rare qu’une œuvre combine à ce point une préparation si minutieuse de sa mise en scène avec une agréable sensation de spontanéité, nécessaire à la verve de ses personnages et à la chaleur sensuelle qui émane de l’œuvre.

Copyright Shanna Besson

On ressent largement les plumes de Sciamma et Mysius, spécialistes dans l’écriture de l’attirance. Les Olympiades est, en somme, un objet précieux que l’on s’approprie et une pépite dans cette compétition. Audiard est plus en forme que jamais.


Manon Franken