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[CRITIQUE] : The Perfect Candidate

 

Réalisateur : Haifaa Al Mansour
Acteurs : Mila Alzahrani, Dae Al Hilali, Khalid Abdulrhim,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Allemand, Saoudien.
Durée : 1h45min.

Synopsis :
Maryam est médecin dans la clinique d'une petite ville d'Arabie saoudite.
Alors qu'elle veut se rendre à Riyad pour candidater à un poste de chirurgien dans un grand hôpital, elle se voit refuser le droit de prendre l’avion.
Célibataire, il lui faut une autorisation à jour signée de son père, malheureusement absent.
Révoltée par cette interdiction de voyager, elle décide de se présenter aux élections municipales de sa ville.
Mais comment une femme peut-elle faire campagne dans ce pays ?




Critique :



Fable morale et feel good au coeur du Moyen-Orient, sur une jeune femme déterminée et courageuse qui établit sa propre identité dans l'une des sociétés masculines les plus répressives au monde, The Perfect Candidate de Haifaa Al Mansour offre un point de vue franc sur une société saoudienne dont les travers ne peuvent que piquer la curiosité du public occidental.
Passé le coup de poing absolument grandiose que fut Wadjda, aussi bien bande miraculée (il est le premier film réalisé par une femme saoudienne) que vrai petit bout de cinéma vrai, galvanisant et émouvant sur le dur passage à la vie d'adulte d'une jeune femme rebelle, mais surtout deux escapades américaines à la qualité vraiment moindre (le biopic romancé Mary Shelley et la romcom bien plus réussite Nappily Ever After du côté de Netflix); la cinéaste revient aux sources de son cinéma mais surtout sur ses propres terres, avec un récit certes simpliste mais fougueux et têtu, convoquant sans peine l'intérêt et la sympathie de son auditoire, totalement acquis à sa cause.




Premier film à obtenir un financement du Conseil saoudien, on y suit Maryam (Mila Alzahrani, absolument formidable), une infirmière surchargée de travail dans une clinique sous-financée, qui décide de briguer un siège au conseil municipal.
Qu'importe le fait qu'elle n'est pas censée montrer son visage dans ses vidéos de campagne, ou de s'adresser directement aux électeurs masculins lors d'un rassemblement, son combat est on ne peut plus légitime (elle va se battre avant tout pourble pavage du chemin de terre boueux devant l'hôpital ou elle travaille, afin que les patients puissent être amenés aux urgences sans risquer leur vie et leur corps), et ses actes deviennent vite viraux, comme une bouffée d'air frais dans une société qui ne demande que cela.
Pleinement dans la droite lignée de l'audacieuse collection d'héroïnes d'Al Mansour, elle tente de faire bouger les choses et d'une manière plus directe, se sent enfin quelqu'un (un comble quand son métier est d'une importance rare).
Sa candidature intrépide et idéaliste à un poste dans un monde entièrement masculin, est peut-être un fantasme cinématographique au score enivrant (superbe composition de Volker Bertelmann), mais elle ouvre une porte intéressante et peut-être inspirante, pour l'Arabie Saoudite de demain.




Raconté sans fioritures ni même beaucoup de nuances (et une mise en scène parfois trop basique, qui lui donne des allures de téléfilm de luxe), The Perfect Candidate puise sa puissance dans son humour subtil et cinglant à la fois, mais aussi dans sa vérité et son espoir sincère d'un monde meilleur, naissant dans quelques évolutions certes mineurs aux yeux des occidentaux (l'autorisation des concerts publics, concernant ici directement le père de Maryam, formidable joueur de oud qui, à l'approche des fêtes de l'Aïd, part en tournée avec son groupe de musiciens traditionnels), mais vitaux.
L'Arabie saoudite que nous dépeint le film est un endroit où la modernité se frotte au conservatisme enraciné, un désordre sans nom auquel il ne faut pas grand chose pour épouser le vent fougueux de la modernité, et ce pas grand chose incarne justement les clés que suggèrent Haifaa Al Mansour : des personnes comme Wadjda et Maryam.


Jonathan Chevrier