[CRITIQUE] : Sans un Bruit
Réalisateur : John Krasinski
Acteurs : John Krasinski, Emily Blunt, Millicent Simmonds, Noah Jupe, Cade Woodward
Distributeur : Paramount Pictures France
Budget : -
Genre : Thriller, Epouvante-horreur
Nationalité : Américain
Durée : 1h30min
Synopsis :
Une famille tente de survivre sous la menace de mystérieuses créatures qui attaquent au moindre bruit. S’ils vous entendent, il est déjà trop tard.
Critique :
Survival intime alignant les sursauts traumatiques avec une justesse rare, distillant avec parcimonie de vrais morceaux de terreur tétanisant tout en puisant sa force dans une rigueur scénaristique exceptionnelle, #SansunBruit est un bijou de divertissement racé et intelligent pic.twitter.com/ILfblGwA9T— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 1 juin 2018
Sans un Bruit a fait beaucoup de bruit (jeu de mot bonjour) depuis sa sortie aux États-Unis. Considéré comme le meilleur film d’épouvante de cette année, le film fait énormément parler de lui. À tort, à raison ? Parlons en.
On connaît John Krasinski grâce à la série The Office ou ses petits rôles dans 13 Hours (Michael Bay) ou Detroit (Kathryn Bigelow). Ceux qui lisent la presse people le connaissent surtout par le biais de sa femme, Emily Blunt. Le voir réaliser un film à succès est un peu une surprise. Pourtant, il n’en ai pas à son premier essai de réalisation. Après avoir exploré le cinéma indépendant avec Brief interview with hideous men en 2009 et La famille Hollar en 2016, qui sont passés inaperçus chez nous, il revient pour un troisième film, un film de genre, avec un concept intéressant : pas de parole et un travail sur le son poussé à l’extrême.
Le spectateur se plonge dans un univers post-apocalyptique, où des créatures à priori extraterrestre sont sur Terre et attaquent l’être humain au moindre son. Une famille s’adapte, ne parle qu’en langue des signes et transforme leur ferme en lieu de calme pour survivre. Sans un Bruit fourmille de détails, visuels et sonores permettant aux spectateurs de s'immerger directement dans l’univers. Le concept du silence passe par la formidable Millicent Simmonds (Le musée des merveilles) et donne droit à des scènes de suspens particulièrement glaçante. Le film repose sur un code du genre vu et revu, mais qui fonctionne ici: l’anticipation. John Krasinski fait comprendre aux spectateurs ce qui va se passer avant le personnage. La tension est presque insoutenable.
Mais le film n’est pas exempt de défauts. Le scénario est assez basique et dévoile de grosses ficelles. Mais ce qui gêne le plus est la musique de Marco Beltrami, très poussive et qui ne laisse presque jamais respirer le film. Certaines scènes auraient gagné en intensité sans elle.
Sans un Bruit est devenu le film phénomène du mois et à raison. Un film immersif et jubilatoire, avec un concept original qui tient la route du début à la fin. Courez y dès le 20 juin.
Laura Enjolvy
Printemps 2017, une petite bombe indépendante (Get Out) concocté par un jeune cinéaste que l'on n'a pas vu venir (Jordan Peele) offrait un coup de fouet non négligeable à un cinéma de genre ricain qui en avait bien besoin, tout en faisant gentiment exploser le box-office mondial.
Printemps 2018... bis repetita.
Passé deux premiers essais qui n'ont pas forcément fait grand bruit (Brief Interviews with Hideous Men et le sympathique La Famille Hollar), le génial John Krasinski passe à la vitesse supérieure avec Sans un Bruit, film de monstres tendu comme la ficelle d'un string, dont l'excellence est appelée à marquer son époque.
Sommet de survival/terreur intime alignant les sursauts traumatiques avec une justesse rare, distillant avec parcimonie de vrais morceaux de terreur tétanisant tout en puisant sa force autant dans une rigueur scénaristique exceptionnelle qui nous préserve majoritairement des habituelles facilités du genre (même si Krasinski se perd un peu plus dans le dernier acte, et qu'il est obligé de se laisser aller à quelques jumps scares dispensables) dans une réalisation inspirée et totalement vouée à la mise en valeur du hors-champ et de l'inconnue; Sans un Bruit, tout en suggestion, revient au fondement du suspense horrifique adulte au classicisme formel imparable.
Articulant son oeuvre sur deux artifices simples au sein d'un cadre faussement apocalyptique (une invasion de monstres à l'ouïe hyper développée et la nécessité d'une famille à ne pas faire de bruit pour survivre) et enlacé au plus près de ses personnages, volontairement ordinaires (pour accentuer l'empathie et la charge émotionnelle du récit), A Quiet Place ne révolutionne jamais le genre, mais va constamment à l'essentiel et exécute son électrochoc avec une telle minutie - proche de la perfection -, qu'il exhale une angoisse sourde et obsédante qui ne peut que marquer durablement son auditoire.
Cauchemar sur pellicule singulier, silencieux - évidemment - et authentique, à la photographie crépusculaire et interprété à la perfection (Krasinski et Blunt sont convaincants en parents aimants mais fermes, Millicent Simmonds confirme tout le bien que l'on pense d'elle depuis Wonderstruck), Sans un Bruit est un petit bijou au charme subtil, un bel exemple de divertissement racé et intelligent à la synthèse minimaliste, qui n'est pas sans rappeler les premières oeuvres pré-craquage égocentrique, de M. Night Shyamalan.
Bref, vivement le prochain long de John Krasinski...
Jonathan Chevrier