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[CRITIQUE] : Men, Women & Children


Réalisateur : Jason Reitman
Acteurs : Adam Sandler, Ansel Egort, Jennifer Garner, Emma Thompson, Kaitlyn Dever, Rosemarie DeWitt,...
Distributeur : Paramount Pictures France
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h59min.

Synopsis :
Men, Women & Children brosse le portrait de lycéens leurs rapports, leurs modes de communication, l’image qu’ils ont d’eux-mêmes et leur vie amoureuse. Le film aborde ainsi plusieurs enjeux sociétaux, comme la culture des jeux vidéo, l’anorexie, l’infidélité, la course à la célébrité et la prolifération de contenus illicites sur Internet. Tandis que les personnages s’engagent dans des trajectoires, dont l’issue est parfois heureuse et parfois tragique, il est désormais évident que personne ne peut rester insensible à ce bouleversement culturel qui déferle sur nos téléphones, nos tablettes et nos ordinateurs.


Critique :

Comme son illustre papounet le grand Ivan, Jason Reitman a un sérieux penchant pour la comédie atypique, sauf qu'à la différence de son cher pater, il compte bien plus de bonnes péloches que de navets dans sa filmographie.

Mieux même, hormis la légère déception Young Adult, difficile de ne pas admettre que Thank You For Smoking, Juno, In The Air et Last Days of Summer font tout simplement partis de ce que le cinéma indé ricain nous a offert de mieux dans le genre durant la dernière décennie.

D'un cynisme et d'un humour noir savoureusement cruel et parfois même proche de la méchanceté féroce, il y avait de quoi être surpris de voir que le surdoué cinéaste soit de retour un peu plus tôt dans l'année, avec pour cinquième long Last Days of Summer, un drame dépressif et familial, adapté d'un best-seller de Joyce Maynard (Labor Day), merveilleux mélo sur la rédemption et sur l'importance de l'enfance, porté par un duo Josh Brolin/Kate Winslet absolument à tomber.


Toujours en verve en cette année ciné donc, le bonhomme, plus prolifique que jamais, nous revient une vingtaine de jours avant le gong final de 2014 avec Men, Women & Children, mise en image du roman homonyme signé Chad Kultgen, qui porte un regard appuyé sur l’influence des nouvelles technologies de communication sur les comportements des humains du XXIe siècle, à travers les histoires vécues par divers adultes et adolescents américains.

Ou, la question du fondement même de la nécessité de ces avancées technologiques, qui si elles sont censées nous relier, nous éloignerait finalement les uns des autres.
Ou quand, connectés à internet, les hommes, les femmes et les enfants se déconnectent inéluctablement de leurs proches, et la fâcheuse habitude qu'ils ont pris de plus communiquer à coups d'avatars plus qu'en " live ".

Revenu dans le genre mordant qui a fait sa renommée, la comédie social pimentée, tout en s'essayant au très risqué film choral avec un casting de talents imposant (Emma Thompson, Adam Sandler, Jennifer Garner, Rosemarie DeWitt ou encore Ansel Egort), Reitman à la jolie ambition d'ausculter le quotidien de cinq adolescents et cinq parents, leur rapport entre eux et au monde du 2.0, entre internet et smartphones interposés.

En dessinant les différentes facettes de la toile (les réseaux sociaux, l'accès presque trop facile aux sites pornographiques ou d'escort, les sites de rencontres, les blogs) et de la téléphonie mobile (les textos et par effet de cause, les sextos) et son incursion presque naturel dans le quotidien/vie réelle de la société contemporaine, tout en y offrant en parallèle de véritables enjeux sociétaux (les relations amoureuses, l'image que les adolescents ont d'eux-même, la dictature de l'image, l'anorexie, l'infidélité ou encore la course à la célébrité facile, la surexposition des enfants, sexualisation des adolescents), Jason Reitman touche à un sujet d'actualité hautement sensible mais surtout méchamment intéressant.


Le hic, c'est que si le papa de Juno cherche à offrir une péloche un brin réactionnaire dans son décryptage d'une société interconnecté, il se perd littéralement dans son traitement à l'aspect beaucoup trop scolaire voir même beaucoup trop sage (l'amour et la famille triomphe de tout, etc...).

Pire, si Reitman peine à capter durablement l'intérêt, il largue trop vite son spectateur avec une intrigue " catalogue ", ouvrant une pléthore de portes et de possibilités sans ne jamais réellement traiter en profondeur les questionnements/problèmes sur lesquels il se penche.

Original dans sa mise en scène très inventive (l'incorporation des messages textos, Facebook, Tumblr, plus maline et justifiée que dans le récent #Chef de Jon Favreau, rattrape la maladroite et répétitive voix off) mais méchamment ariériste dans son scénario alignant une pluie de clichés presque aberrant dans une chronique qui se veut actuelle, sous forme d'arcs soit prévisibles soit lourdement larmoyants, Men, Women & Children - trop long - touche sporadiquement son public mais ne fait finalement jamais mouche.

Du coup, difficile de s'attacher aux personnages campés par un casting pourtant impeccable, même si les performances impliqués des prometteurs Ansel Egort (convaincant en ado rebelle fatigué par la normalité) et Kaitlyn Dever (la révélation de State of Grace, sympathique dans la peau d'une ado oppressée par une mère surprotectrice qui la flique abusivement) provoquent un minimum d'empathie - leur romance est d'ailleurs l'histoire la mieux traitée par le cinéaste.


Faussement complaisant et moralisateur - Internet a beau être fascinant son usage peut être dangereux et mal -, le nouveau Reitman est une péloche qui vogue constamment en surface, qui ne transcende que trop peu la richesse de son matériau d'origine (et son magnifique questionnement sur le parallèle entre notre existence réelle et notre existence numérique) et se manque de peu dans son portrait de l’explosion des moyens de communication qui rend pourtant encore plus difficile, notre interaction commune.

Avec plus de rigueur et un esprit plus frondeur et moins schématique, Men, Women & Children aurait décemment pu prétendre à un potentiel statut de témoin phare de son temps, sous la caméra du talentueux metteur en scène, mais il n'en est malheureusement rien.

Un petit ratage donc, mais un des plus beaux de cette dernière moitié d'année 2014...


Jonathan Chevrier


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