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[CRITIQUE] : Libertate


Réalisateur : Tudor Giurgiu
Acteurs : Alex Calangiu, Cătălin Herlo, Ionut Caras, Iulian Postelnicu,...
Distributeur : Destiny Films
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Roumain, Hongrois.
Durée : 1h49min

Synopsis :
Décembre 1989. La révolution roumaine a débuté et la ville de Sibiu devient le théâtre de terribles affrontements. Les policiers et miliciens fidèles à Ceausescu sont arrêtés et réunis dans le bassin vide d’une piscine. Mais comment savoir qui est qui dans un tel chaos ?




Difficile de ne pas saluer l'ambition, tout autant évidente que gentiment couillue, du cinéaste Tudor Giurgiu à vouloir avec Libertate, faire de son cinéma une voix peut-être aussi importante (toute propension gardée, évidemment) que peuvent l'être ceux de ses talentueux camarades Cristian Mungiu, Radu Jude ou encore Cristi Puiu, au sein d'un cinéma roumain résolument en bonne santé depuis quelques années maintenant, lui qui suit scrupuleusement la logique de ce que l'on peut considérer comme la Nouvelle Vague roumaine, avec des considérations socio-politiques et un sens - léger, certes - de l'absurde caractéristiques de cette mouvance aussi fascinante que particulière.

Le tissu névralgique même d'une œuvre se revendiquant comme un véritable coup de rétroviseur sur un épisode sombre du passé historique récent de sa nation : les heures chaotiques, à quelques encablures de la chute du mur de Berlin, de la révolution de décembre 1989, des émeutes de Timisoara à la chute de Ceaușescu et de la dernière dictature communiste d'Europe.

Copyright Cinéma Comoedia

Un pan d'histoire méconnu de notre côté du Vieux Continent, que le cinéaste aborde dans toute sa confusion chaotique et violente, drame pédagogico-choral à la narration sensiblement éparpillée flanqué au cœur d'une ville de Sibiu transformée en théâtre sanglant où des centaines d'âmes furent à la merci des actes comme de la volonté du pouvoir martiale en place (tout simplement une dictature en transition d'une autre); un capharnaüm où les concepts de criminalité comme de terrorisme seront subtilement subvertis - comme celui de la corruption -, tandis que les médias gouvernementaux se livreront à un véritable terrorisme psychologique, et où la révolution sera capturée par le truchement d'une focale distancée, au fin fond d'une piscine asséchée et déshumanisée.

Bordélique mais frappé par un réalisme brut et pénétrant, fruit d'une mise en scène caméra à l’épaule qui embrasse nerveusement l'incertitude et la vérité désordonnée de cette révolution, Giurgiu, à défaut d'offrir des personnages suffisamment croqués pour servir d'ancrage émotionnel forts, arrive néanmoins à transmettre la complexité de cet événement charnière tout en soulignant ses zones d’ombre comme ses cicatrices toujours ouvertes, sans jamais tomber dans les bras du manichéisme facile et putassier.
Pas un petit effort donc, constamment à hauteur humaine.


Jonathan Chevrier