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[CRITIQUE] : Le Domaine


Réalisateur : Giovanni Aloi
Acteurs : Félix Lefebvre,  Lola Le Lann,  Patrick d'Assumçao, Raphaël Thiéry, Lina-Camélia Lumbroso,...
Distributeur : Capricci Films
Budget : -
Genre : Thriller.
Nationalité : Français
Durée : 1h31min

Synopsis :
Damien, étudiant à la dérive, accepte un emploi dans un relais de chasse tenu par deux malfrats locaux. Ces derniers utilisent leur domaine pour couvrir des activités illégales où jeux d’argent et prostitution se mêlent. Suite à la disparition d’une escort, Damien s’engouffre dans une spirale de règlements de comptes.




On était de ceux à avoir été gentiment séduit, malgré quelques petites panouilles dommageables, par le premier passage derrière la caméra du wannabe cinéaste italien Giovanni Aloi, La Troisième Guerre, petit bout de cinéma perfectible mais captivant, constamment à la lisière du documentaire, qui s'immiscait dans l'intimité de trois soldats en pleine mission Sentinelle, appelés à sécuriser une grosse manifestation antigouvernementale massive, pour mieux dégainer plusieurs observations observation mi-crue, mi-naïve, à la fois sur l'impuissance comme le vide absolu du non-interventionisme, mais également, d'une manière résolument plus existentielle, sur la paranoïa de soldats tout autant livrés à eux-mêmes qu'écrasés par l'aliénation qu'ils subissent.

Pas toujours adroit (l'apanage, souvent, des premières réalisations), mais sensiblement couillu pour un début.
Pas forcément verni, le bonhomme fait son retour un peu plus de cinq ans plus tard avec son second effort, en pleine réunion cannoise qui a toujours eu le chic pour vampiriser toute l'attention et laisser les sorties du moment, hors blockbusters, passablement sur le carreau.

Copyright Capricci

Tout comme La Troisième Guerre, Le Domaine prend base sur des faits réels et est appelé à gentiment diviser son auditoire, lui dont la narration s'inspire de la « Tuerie de Belhade », fait divers complexe où les cadavres d'un couple de gérants et leur employé sont retrouvés carbonisés dans l'incendie d'un relais de chasse, au cœur des Landes en décembre 1985.
Sacrée ambiance donc, pour un polar férocement noir et vénéneux qui assume tout du long sa singularité (comme sa voix-off omniprésente), vissé sur la psyché nébuleuse et biaisée d'un étudiant désabusé et tchatcheur, sans grands repères solides dans son existence, qui a voulu griller trop vite les étapes de la vie d'adulte, au point de se brûler les ailes et d'embrasser les lèvres fuyantes du côté obscur et d'un grand banditisme qui lui tend les bras, fermement ancré dans une France profonde où les vices sont rois.

Un apprenti gangster mélancolique, éconduit et rêveur qui ne voulait plus être pris pour un gentil, opérant une relation d'attirance-répulsion avec le milieu et incarné avec une prestance assez folle par un Félix Lefebvre inspiré, à la partition bien plus maîtrisé qu'une mise en scène certes pleine d'envie, mais qui a une méchante tendance à s'éparpiller dans ses effets de style.
Un sympathique cousin au récent L'Amour ouf de Gilles Lellouche, lui aussi pas exempt de maladresses - ni de fulgurances.


Jonathan Chevrier