[CRITIQUE] : L'Amie
Réalisatrice : Margarethe von Trotta
Acteurs : Hanna Schygulla, Angela Winkler, Peter Striebeck, Franz Buchrieser,...
Budget : -
Distributeur : Splendor Films / StudioCanal
Genre : Drame.
Nationalité : Français, Allemand.
Durée : 1h45min
Synopsis :
Olga et Ruth n'ont, à première vue, rien en commun. Olga est sûre d'elle, indépendante et appréciée des hommes. Ruth est renfermée et craintive. Dès leur rencontre, une grande amitié se noue entre les deux femmes. La force et la profondeur de cette affection vont perturber leur entourage, en particulier les hommes.
Loin d'être un simple hasard du calendrier, mais un véritable cadeau de la part de Splendor Films, le cinéphile n'a pas donc une seule mais bien deux séances en salles cette semaine, à quelques heures du tumulte cannois, chapeauté par la cinéaste allemande Margarethe von Trotta, figure majeure de la Nouvelle Vague du cinéma outre-rhin : son dernier effort en date, Ingeborg Bachmann, mais également L'Amie, jusqu'ici inédit en salles par chez nous - et dégainé dans une version restaurée 4K, pour ne rien gâcher à la fête.
Soit une exploration intense, subtile et tout en nuances de l'amitié féminine qui n'est pas sans rappeler, sur de nombreux points essentiels, Les Sœurs mais surtout Les années de plombs, qui mettait en images la relation toute aussi singulière que captivante entre deux sœurs diamétralement opposées (l'une est une militante féministe, l'autre une membre d'un groupe terroriste recherchée par la police) dans l'Allemagne d'après-guerre.
Olga, brillante professeure d'université - elle enseigne la littérature féminine - divorcée et Ruth, ancienne enseignante désormais peintre renfermee sur elle-même traumatisée par le suicide de son frère, ne sont pas des sœurs mais leur relation fusionnelle et mutuellement enrichissante les rapprochent inconsciemment de cette vérité, qui a tout d'une bombe de destruction massive pour les figures masculines les entourant; notamment l'époux de Ruth, Franz, moteur de cette union féminine qui ne le réjouit plus lorsqu'il ne peut plus exercer sa domination sur ce qui était sa moitié - et qui s'en est trouvé une autre -, lui qui ne désire pas tant la guérison psychologique de sa femme (et encore moins son émancipation, même s'il ne veut plus porter le fardeau de ses maux) s'il n'en est pas l'instigateur principal.
Étude aussi intimiste que profondément émouvante d'une amitié/dépendance psychologique, spirituelle et émotionnelle mutuelle dont l'authenticité n'a d'égale que l'objectivité derrière son auscultation de la sororité (qui peut tout autant être galvanisante que destructrice), L'Amie ne serait cependant rien sans les prestations lumineuses d'Hanna Schygulla et Angela Winkler, deux facettes complémentaires d'une même personnalité à la fois complexe et fascinante.
Une belle découverte.
Jonathan Chevrier