[CRITIQUE/RESSORTIE] : Le Violent
Réalisateur : Nicholas Ray
Avec : Humphrey Bogart, Gloria Grahame, Frank Lovejoy, Jeff Donnell,...
Budget : -
Distributeur : Park Circus France
Genre : Policier, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h34min
Date de sortie : 8 juin 1951
Date de ressortie : 19 mars 2025
Synopsis :
Dixon Steele, un scénariste en proie à des crises de violence, est accusé du meurtre d'une serveuse. Laurel, une voisine amoureuse de Steele, le disculpe, mais leur amour ne peut échapper à la suspicion.
Qui aurait pu prédire que, plus de quatre décennies après avoir brutalement quitté notre monde dans la fleur de l'âge, alors qu'elle aurait décemment pu briller encore de mille feux sur grand écran, la merveilleuse Gloria Grahame squatte par deux fois nos salles obscures résolument chargée en sorties ?
Personne, sauf peut-être le distributeur Park Circus France qui la célèbre dans deux de ses plus beaux efforts - Règlement de comptes de Fritz Lang, et donc Le Violent de Nicholas Ray -, dégainés cette semaine dans des versions restaurées toute pimpante.
Séductrice aussi incandescente qu'inoubliable du film noir des 50s où, d'un simple regard, elle pouvait voler sans forcer la vedette à n'importe quelle " gueule " de cinéma face à elle (James Stewart, Glenn Ford, Humphrey Bogart, Robert Mitchum,...), elle était une femme pleine d'assurance, électrisante, d'une intensité à la fois impressionnante et merveilleusement désespérée; à l'image même de sa composition absolument magnifique, dans le sombre et tragique Le Violent.
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Copyright Park Circus/AllStars/Columbia Pictures |
Adaptation (très) libre par son époux de l'époque (on ne reviendra pas sur les raisons houleuses - et perverses - de leurs séparation) du roman In a Lonely Place (son titre V.O) de Dorothy B. Hughe, qui s'inscrit totalement dans la veine du Boulevard du crépuscule de Billy Wilder sorti dans le même pas, eux qui fustige avec une lucidité à la fois féroce et brutale la superficialité de la jungle Hollywoodienne, sans jamais tombé dans les méandres tortueux de la satire putassière.
Ray privilégie la tragédie déchirante et pessimiste, cloué aux basques d'un Bogart à la fois solaire et bestial en scénariste cynique (parce que beaucoup trop conscient de servir une industrie pourrie jusqu'à la moelle) qui perçoit sa vie comme il écrit (ce qui permet à Ray d'ajouter une petite méditation sur l'écriture comme un art à la fois désinvolte et abouti), soudainement suspecté de meurtre, une situation qui dévore de l'intérieur la romance passionnée qu'il noue avec une voisine qui tombe littéralement sous son charme.
Usant du cynisme pour se prémunir d'un chagrin pourtant inéluctable, déjouant savamment les codes du mélodrame purement Hollywoodien jusque dans son final bouleversant (la poésie brutale du réel et de deux amants retournant l'œil humide, à la triste vérité d'une vie solitaire et sans amour), Ray compose un beau et grand film noir qui, sept décennies plus tard, n'a rien perdu de sa puissance.
Jonathan Chevrier
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