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[CRITIQUE] : Desert of Namibia

Réalisatrice : Yoko Yamanaka
Acteurs : Yumi Kawai, Daichi Kaneko, Kanichiro, Makiko Watanabe,...
Distributeur : Eurozoom
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Japonais.
Durée : 2h27min.  

Synopsis :
Pour Kana, jeune japonaise de 21 ans, la vie est une succession d'instants sans saveur. Même tomber amoureuse ne sert qu’à faire passer le temps. Insatisfaite de sa relation avec Honda, un garçon attentionné, elle le quitte pour Hayashi, un jeune homme plus excentrique. Entre tribulations professionnelles et sentimentales, Kana se cherche.




Critique :



La magie des coming-of-age movie tient souvent à peu de choses, un où une héroïne furieusement empathique, un cadre qui titille savamment notre nostalgie où même une ambiance gentiment réconfortante.
En ce sens, le second long-métrage de la cinéaste japonaise Yoko YamanakaDesert of Namibia, qui s'inscrit dans la droite lignée de son premier effort, Amiko (qui sondait avec délicatesse la manière dont la jeunesse abordait les vicissitudes de l'amour et de la solitude), fait partie de ces projets que l'on veut instinctivement aimer - même s'il ne nous facilite jamais les choses pour autant.

Copyright Eurozoom

Paradoxalement, c'est précisément parce que la narration se fait plus complexe et tortueuse que la moyenne - tout du moins, d'une manière suffisamment habile pour captiver -, épousant les codes du genre tout en s'en éloignant savamment, que l'expérience de cette mise en abîme dans les tourments d'une jeune femme apathique (fantastique Yuumi Kawai), dérivant sans but dans une existence où elle aspire à un amour sans entraves mais ne sait jamais comment combler le vide qui la consume, se fait à la fois un brin déroutante mais aussi et surtout profondément attachante.
Soit Yoko, dont les hauts et les bas constants, les épisodes erratiques qui s'emmêlent avec une agitation impulsive voire même une léthargie presque dépressive, est qualifié par un psychologue par un terme aussi simple que complexe : bipolarité...

Trop facile pour Kana devant la caméra, qui remet tout en question et n'accepte rien comme réponse, mais encore plus pour Yamanaka.
À travers une odyssée subtile tout en sarcasme, en décalage de tons et en désir ardent de liberté, la cinéaste fait de sa têtue d'héroïne et par extension, de son compagnon (définitivement moins marqué le patriarcat, puisqu'il en devient l'un des innombrables bras armé), le symbole d'une jeune génération tokyoïtes opprimée et qui a peur de voir sa jeunesse lui passer sous le nez; une génération à la fois en colère et en lutte contre le système, dont la frustration et les désirs d'évasion ne sont que des réactions épidermiques aux us et coutumes oppressives d'une société prônant un conformisme et une forme d'auto-répression de soi excessive, une société où toute idée d’authenticité défiant la norme est considérée comme transgressive.

Copyright Eurozoom

D'une simplicité d'exécution (un sens du cadre remarquable, couplé à un montage précis de Banri Nagase) qui n'a d'égale que la sobriété terre-à-terre de sa forme (pas exempt de quelques séquences surréalistes dans son dernier tiers, pas forcément les plus heureuses du film), Desert of Namibia est à l'image de son héroïne qui n'a pas le temps pour les étiquettes et encore moins un quelconque souci d'empathie, à la fois vulnérable mais toujours authentique, même dans ses indécisions, qui s'entête farouchement à vouloir répondre à cette question essentielle : comment pourrait-on réussir sa vie, si l'on agit différemment de ce que l'on pense ?

Défier l'anxiété autant que la conformité, c'est totalement le genre de quête cinématographique qui vaut son pesant de pop-corn.


Jonathan Chevrier