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[CRITIQUE] : Karmapolice


Réalisateur : Julien Paolini
Acteurs : Syrus Shahidi, Alexis Manenti, Karidja Touré, Steeve Tientcheu, Sabrina Ouazani,...
Distributeur : À Vif Cinémas
Budget : -
Genre : Policier, Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h20min.

Synopsis :
Angelo, flic idéaliste, veut changer de métier. Il se jette corps et âme dans les histoires de son quartier afin de rééquilibrer son karma. L’histoire d’une amitié et d’une emprise dans le Paris de Château Rouge ; une ode aux invisibles, à la contrebande et aux poètes de la rue ; une équipée humaniste, plongée électrique dans le sillon du film noir.



Critique :



Qu'ils soient d'une flamboyante réussite ou proprement insipides, les premières réalisations sont toujours plus ou moins frappées par le sceau rafraîchissant de la nouveauté, de cette petite excitation face à la possibilité de découvrir l'un des potentiels grands cinéastes de demain.

Plutôt de bon cru, le premier long-métrage de Julien Paolini, Amare Amaro, adoubé par de nombreux festivals (Cognac en tête, Grand Prix oblige), avait gentiment fait son petit effet une poignée de jours avant le premier confinement, petit bout de cinéma hybride (Paolini s'amusait à mélanger les genres, allant du polar noir au drame familial, en passant par la comédie burlesque et le quasi-western urbain) où le wannabe cinéaste trouvait une résonnance toute particulière dans l’universalité des textes antiques, pour son exploration des thèmes du deuil, de la famille et de l'immigration, à travers les pérégrinations d'un jeune boulanger français peinant à s'intégrer dans le village sicilien natal de sa mère.

Copyright La Réserve

Quatre ans plus tard, et avec un manque de mise en lumière proprement frustrant (comme souvent avec un cinéma français qui sort sensiblement des sentiers battus), le bonhomme franchit l'étape du " film de la confirmation " avec Karmapolice (toujours adoubé par Cognac), où il se place à nouveau à la frontière de plusieurs genres (le polar urbain, le drame social, la fable onirique,...), en scrutant aux plus près la respiration troublée d'un huitième arrondissement de Paris sous tension, vissé tout du long sur l'odyssée homérique d'Angelo, flic un peu trop idéaliste pour son métier (qu'il ne va pas tarder à quitter) qui tente de rééquilibrer son karma en s'impliquant plus que de raison dans les méandres humains et tortueux de son quartier et de ses alentours.

Furieusement indépendant dans l'âme - comme son aîné, avec qui il partage la même quête de rédemption désespérée de sa figure centrale -, ce second effort marque à nouveau par la propension qu'à Paolini de toucher du doigt le réel, sans artifices caricaturaux et putassiers, embrassant à pleine bouche autant la folie enivrante et assourdissante que la beauté sombre et abimée d'un Paris multiculturel rarement filmé (un peu moins ces dernières années, il est vrai) avec autant de hargne et de véracité caméra au poing.
Martin Scorsese n'est jamais loin, évidemment, même si la comparaison tourne vite à vide (tant mieux), et impossible de ne pas penser également aux grandes heures du cinéma d'Abel Ferrara.

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Chronique fiévreuse et référencée tout en talents mésestimés (Steeve Tientcheu, Karidja Touré, Sabrina Ouazani, Syrus Shahidi ou même le désormais indispensable Alexis Manenti,... la relève est là, et elle ne demande qu'à exploser l'écran), embaumée dans la superbe photographie de Hadrien Vedel, Karmapolice, certes pas exempts de quelques petites imperfections vite oubliables, se fait un solide et immersif polar karmico-introspectif, qui démontre que toutes les belles promesses distillées par Julien Paolini avec Amare Amaro, étaient loin d'être vaines.


Jonathan Chevrier