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[CRITIQUE] : Les Colons


Réalisateur : Felipe Gálvez Haberle
Avec : Sam Spruell, Mark Stanley, Alfredo Castro, Mariano Llinás,...
Distributeur : Dulac Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Chilien, Argentin, Français, Britannique, Danois, Taïwainais, Suédois.
Durée : 1h37min

Synopsis :
Terre de Feu, République du Chili, 1901. Un territoire immense, fertile, que l’aristocratie blanche cherche à « civiliser ». Trois cavaliers sont engagés par un riche propriétaire terrien, José Menendez, pour déposséder les populations autochtones de leurs terres et ouvrir une route vers l’Atlantique. Sous les ordres du lieutenant MacLennan, un soldat britannique, et d’un mercenaire américain, le jeune métis chilien, Segundo, découvre le prix de la construction d’une jeune nation, celui du sang et du mensonge.



Critique :

Au sein d'une année cinématographique 2023 qui aura vu le cinéma chilien nous asséner quelques upercuts bien sentis (Chili 1976 de Manuela Martelli, La vache qui chantait le futur de Francisca Alegría ou encore Blanquita de Fernando Guzzon), le wannabe cinéaste Felipe Gálvez affirme et confirme cette belle percée dans nos salles obscures avec son premier long-métrage, Les Colons, plongée crue au cœur génocide perpétré en 1901, à l'encontre des Indiens Selknam en Terre de Feu, gentiment mis sous le tapis par les livres d’histoire et ce dès l'arrivée au pouvoir du président Pedro Montt, quelques années plus tard.

Copyright Quijote Films

Au plus près de ce massacre et de l'incapacité révoltante de l'état chilien a le reconnaître comme tel, pur acte de colonisation génocidaire ayant tâché de sang l'histoire du pays, Gálvez raconte une frange majeure de cette tragédie, motivée par le grand propriétaire terrien José Menendez (dont les héritiers possèdent toujours des terres en Terre de Feu), qui avait lancé cette boucherie locale contre les populations locales pour permettre l'ouverture de routes et faciliter son commerce, avec l'aide du lieutenant britannique MacLennan ou encore d'un mercenaire américain, incarnations des deux plus grosses puissances colonialistes (progressistes selon le révisionnisme institutionnalisé) des siècles derniers.

Embaumé dans une atmosphère et une grammaire pas si éloigné d'un western à la John Ford, qui sublime les grands espaces sans jamais masquer la violence sourde de l'homme qui la souille, le film détonne néanmoins dans sa manière d'aborder les origines l'horreur par ceux qui la perpétue et sa résultante auprès les victimes, comme pour mieux sonder la brutalité humaine nourrie par l'avidité, comme pour mieux rendre d'autant plus inconfortable une violence originelle déjà psychologiquement écrasante, prospère dans une époque ou l'immoralité et l'inhumanité règnent.

Copyright Quijote Films

Porté par un sens et un soin précis du cadre, une poésie vénéneuse qui n'a d'égale que sa puissance politique, Les Colons, sans cesse voué et tourné vers l'importance de sa leçon d'histoire, s'inscrit dans la droite lignée du Jauja de Lisandro Alonso, et incarne un morceau de cinéma aussi éprouvant et épuré qu'il est pertinent et nécessaire.
Un sacré premier long-métrage, rien de moins.


Jonathan Chevrier


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