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[CRITIQUE] : Déménagement


Réalisateur : Shinji Sōmai
Avec : Tomoko Tabata, Kiichi NakaiJunko Sakurada,…
Distributeur : Survivance
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Japonais.
Durée : 2h04min

Synopsis :
Ren est une jeune fille dont les parents viennent de divorcer. Son père déménage, et elle doit s’adapter à cette nouvelle vie voulue par les adultes. Révoltée contre le monde des grandes personnes qu’elle interroge avec clairvoyance, elle devra apprendre à grandir et à se réconcilier avec eux au cours d’un cheminement qui l’amènera aux confins de la réalité.



Critique :


Trois décennies, voilà le temps qu'il aura fallu pour que Déménagement/Ohikkoshi de Shinji Sōmai (tragiquement disparu en 2001 d'un cancer du poumon, à l'âge de 48 ans), passé par la case Un Certain regard à Cannes (en 1993, la même année que son compatriote Takeshi Kitano avec Sonatine, mélodie mortelle), débarque enfin dans nos salles obscures.

Une bénédiction, tant le dixième effort du cinéaste nippon est une merveille de récit initiatique à la mise en scène aussi (faussement) simpliste que virtuose, où le bouleversement du quotidien d'une jeune môme en passe de quitter l'innocence de l'enfance, se calque à celui d'une nation tout aussi déstabilisée par sa propre mutation.
Soit Renko (incroyable Tomoko Tabata), onze ans au compteur, qui rêve d'une famille unie et heureuse mais voit avec douleur que ses parents sont en passe de se séparer - alors même que le divorce était encore tabou et mal vu, même entre les enfants.

Copyright Survivance

Si elle se révolte intérieurement face à cet évènement perturbant, et au départ de son paternel de la maison familiale, elle finit par extérioriser son mal-être dans une rébellion intime (dans son foyer) et publique (à l'école), comme pour mieux s'affirmer et affirmer sa place, au cœur du chaos familial et sociétaire.
Sa nécessité d'accepter, non sans mal, cette épreuve avec stoïcisme et sympathie, ce déséquilibre intérieur douloureux et cette anxiété - légitime - d'être rejetée et de se retrouver seule, se voit alors plaqué autant sur la décrépitude d'une union elle-même déséquilibrée (puisque basé sur un renversement des pouvoirs au sein du couple : c'est sa mère qui travaille et ramène l'argent à la maison, ce qui induit que sa réussite économique a sapé le sentiment de fierté masculine de son père), que sur une société japonaise elle-même déséquilibrée par une crise économique brutale.

Odyssée initiatico-spirituelle d'une gamine en pleine transformation, au cœur même d'un quotidien familial et d'un monde en pleine mutation, qui ne dénote absolument pas des autres films du cinéaste (qui a toujours su jouer avec les concepts du temps et de la mémoire, tout en s'offrant quelques évasions surréalistes de la réalité), Déménagements, embaumé dans une tristesse à la fois déchirante et cruelle, est un beau film sur l'enfance, et une (re)découverte vraiment fantastique.


Jonathan Chevrier


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