[CRITIQUE/RESSORTIE] : L'Évangile selon Saint Matthieu
Réalisateur : Pier Paolo Pasolini
Acteurs : Enrique Irazoqui, Margherita Caruso, Susanna Pasolini,...
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Drame, Historique, Biopic.
Nationalité : Italien.
Durée : 2h17min.
Date de sortie : 3 mars 1965
Date de ressortie : 20 juillet 2022
Synopsis :
Un ange vient annoncer à Joseph que sa femme Marie attend le fils de Dieu : Jésus. Devenu jeune homme, son cousin Jean-Baptiste le fait Christ. Il se retire dans le désert durant quarante jours et quarante nuits puis s’en va prêcher la bonne parole entouré de ses disciples. Trahi par l’un d’entre eux, Jésus meurt sur le Golgotha mais ressuscite trois jours plus tard...
Critique :
S'il est le premier film historique de Pasolini, dans le sens où il se base à la fois sur des textes canoniques et se déroule en des temps reculés, L'Évangile selon Saint Matthieu est peut-être aussi et surtout son plus bel effort, première pierre de ce qui incarnera sa " méthode ", à savoir une proprension à proposer une reconstruction sèche, minimaliste et nue - voire même parfois surréaliste - d'un passé explicitement lu à travers le prisme des préoccupations et sentiments contemporains.
Un évangile qui correspondait autant à ce qu'il était (un athée avec une "nostalgie de la croyance") qu'à sa perspective marxiste/ascétique, pour un projet qui se plaçait à une époque charnière autant de sa vie, que de son cinéma (il sortait, à la suite de La Ricotta, d'une condamnation à quatre mois de réclusion pour « insulte à la religion d'État » - blasphème en gros, qu'il ne fera pas en payant une amende -, fruit d'une campagne de persécution et d'harcèlement qui durait depuis le début de sa carrière).
Sans doute l'une des meilleures traductions cinématographiques de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus de Nazareth (il respecte au pied de la lettre les textes de Saint-Matthieu), le film incarne une oeuvre foisonnante, à la fois logée entre le poème visuel et le résumé doctrinal chrétien, la capture à la lisière du documentaire social (sondant au plus près de l'abjection sociale et des mensonges du pouvoir en place) qu'une exégèse du Christ, montré en tant que figure presque Leninienne, un révolutionnaire dont les miracles importent moins que le discours, qui apporte l'égalité et la miséricorde au coeur d'une Judée marquée par l'exploitation et la misère.
Dénué de toute fioriture liturgique où de moralisation digne du prisme Hollywoodien, Pasolini filme de manière brute et directe le dessein maximal et le paradoxe (entre l'homme humble et le militant appelant à lutter contre le pharisaïsme ambiant) d'un Jésus appelé à renverser l'ordre établi, à dénoncer l'hypocrisie des autorités romaines en Judée en déclenchant une révolution spirituelle, politique et communautaire sans pareil.
Jamais trivial tout en se focalisant sur l'idiosyncrasie même de la figure du martyr (dans laquelle le cinéaste se reconnaît un brin, lui qui a longtemps été discriminé pour son statut d'athée, son homosexualité et son militantisme marxiste), Pasolini, sous les sonorités de Bach où encore Prokofiev, croque un pur chef-d'oeuvre viscéral et complexe, dont la ressortie en salles - et en version restaurée - est aussi somptueuse qu'essentielle.
Jonathan Chevrier
Acteurs : Enrique Irazoqui, Margherita Caruso, Susanna Pasolini,...
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Drame, Historique, Biopic.
Nationalité : Italien.
Durée : 2h17min.
Date de sortie : 3 mars 1965
Date de ressortie : 20 juillet 2022
Synopsis :
Un ange vient annoncer à Joseph que sa femme Marie attend le fils de Dieu : Jésus. Devenu jeune homme, son cousin Jean-Baptiste le fait Christ. Il se retire dans le désert durant quarante jours et quarante nuits puis s’en va prêcher la bonne parole entouré de ses disciples. Trahi par l’un d’entre eux, Jésus meurt sur le Golgotha mais ressuscite trois jours plus tard...
Critique :
Dénué de toute fioriture liturgique où de moralisation digne du prisme Hollywoodien, Pasolini filme avec #LEvangileSelonSaintMatthieu de manière brute et viscérale le dessein maximal et le paradoxe (entre l'homme humble et le militant) d'un Jésus appelé à renverser l'ordre établi pic.twitter.com/3BN8vl67xm
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) July 20, 2022
S'il est le premier film historique de Pasolini, dans le sens où il se base à la fois sur des textes canoniques et se déroule en des temps reculés, L'Évangile selon Saint Matthieu est peut-être aussi et surtout son plus bel effort, première pierre de ce qui incarnera sa " méthode ", à savoir une proprension à proposer une reconstruction sèche, minimaliste et nue - voire même parfois surréaliste - d'un passé explicitement lu à travers le prisme des préoccupations et sentiments contemporains.
Un évangile qui correspondait autant à ce qu'il était (un athée avec une "nostalgie de la croyance") qu'à sa perspective marxiste/ascétique, pour un projet qui se plaçait à une époque charnière autant de sa vie, que de son cinéma (il sortait, à la suite de La Ricotta, d'une condamnation à quatre mois de réclusion pour « insulte à la religion d'État » - blasphème en gros, qu'il ne fera pas en payant une amende -, fruit d'une campagne de persécution et d'harcèlement qui durait depuis le début de sa carrière).
STUDIOCANAL IMAGE / ARCO FILMS |
Sans doute l'une des meilleures traductions cinématographiques de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus de Nazareth (il respecte au pied de la lettre les textes de Saint-Matthieu), le film incarne une oeuvre foisonnante, à la fois logée entre le poème visuel et le résumé doctrinal chrétien, la capture à la lisière du documentaire social (sondant au plus près de l'abjection sociale et des mensonges du pouvoir en place) qu'une exégèse du Christ, montré en tant que figure presque Leninienne, un révolutionnaire dont les miracles importent moins que le discours, qui apporte l'égalité et la miséricorde au coeur d'une Judée marquée par l'exploitation et la misère.
Dénué de toute fioriture liturgique où de moralisation digne du prisme Hollywoodien, Pasolini filme de manière brute et directe le dessein maximal et le paradoxe (entre l'homme humble et le militant appelant à lutter contre le pharisaïsme ambiant) d'un Jésus appelé à renverser l'ordre établi, à dénoncer l'hypocrisie des autorités romaines en Judée en déclenchant une révolution spirituelle, politique et communautaire sans pareil.
Jamais trivial tout en se focalisant sur l'idiosyncrasie même de la figure du martyr (dans laquelle le cinéaste se reconnaît un brin, lui qui a longtemps été discriminé pour son statut d'athée, son homosexualité et son militantisme marxiste), Pasolini, sous les sonorités de Bach où encore Prokofiev, croque un pur chef-d'oeuvre viscéral et complexe, dont la ressortie en salles - et en version restaurée - est aussi somptueuse qu'essentielle.
Jonathan Chevrier