[SƎANCES FANTASTIQUES] : #75. Unbreakable
Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's (et même les plus récents); mais surtout montrer un brin la richesse des cinémas fantastique et horrifique aussi abondant qu'ils sont passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !
#75. Incassable de M. Night Shyamalan (2000)
Tout a été dit ou presque sur Incassable, à tel point qu'il serait presque assez présomptueux de vouloir apposer sa prose sur ce qui, est encore aujourd'hui, le plus bel effort de son étonnant metteur en scène, capable du meilleur comme du - définitivement - moins défendable, et ce d'une oeuvre à l'autre.
Pourtant, il est impossible de ne pas ressentir l'envie - ici sincère - de décortiquer encore et encore une oeuvre tellement en avance sur son temps, qu'elle s'échinait déjà à renouveler de l'intérieur un genre super-héroïque qui n'avait même pas encore connu son apogée où, plutôt, son essorage pur et simple, porté par le soutien populaire parfois incompréhensible qui va avec.
Une douce ironie quant on sait que le film est produit par une firme aux grandes oreilles n'ayant pas encore jeté son dévolu sur le catalogue Marvelien...
Trompant l'idée - déjà - à l'époque que son cinéma ne se résumait superficiellement qu'à un usage plus où moins audacieux de twists cliquants (ce qui est, évidemment, totalement stupide), Shyamalan ne fait que peu de mystère sur l'issue de son métrage, finalement ici presque anecdotique.
Plus important est le voyage, car si le spectateur a très vite compris la nature de super-héros de son protagoniste principal et, par effet de miroir brisé, celui de vilain majeur pour son nouvel " ami/mentor " qui va se révéler plus machiavélique que sa condition physique ne le laisse présager; tout le métrage est vissé sur la lente découverte des personnages, le lent et fascinant chemin fait de douleur et de brutalité, vers la lucidité d'une réalité à la fois cruelle mais juste.
Traitement réaliste du mythe super-héroïque dénué de tout artifice facile (pas de SFX, de scènes d'action rutilantes,...) tant il ne se base finalement que sur la croyance du public envers son histoire et une puissance iconographique rare (une simple cape de pluie peut s'apparenter à un véritable costume de super-héros, une canne de verre et un fauteuil roulant à tout des apparats d'un méchant, l'eau peut même se voir comme de la cryptonite...), pour rendre son aventure crédible, une croyance populaire couplée à une connaissance accrue de la culture pop américaine, qu'il convoquera plusieurs fois par la suite, avec plus où moins de succès (pour Le Village, La Jeune Fille de l'eau et Phénomènes).
Mais tout comme pour son précédent effort, Sixième Sens, c'est la méticulosité de son écriture qui élève Incassable au-delà du simple carcan du thriller surnaturel et contemplatif, où le fantastique tout comme l'émotion, né dans la banalité apparente du quotidien, que ce soit au travers de la solitude qui déconnecte lentement ses deux pôles positif - David Dunn - et négatif - Elijah Price -, où l'imaginaire fertile mais finalement lucide provenant du regard aimant d'un enfant pour son père.
Déchirant (la naissance douloureuse de Price, le pacte tacite silencieux mais formidable entre Dunn et son fils dans le final) et effrayant à la fois (ce don, très " Johnny Smith " du héros, pour déceler le mal omniprésent qui nous entoure), sublimé autant par une mise en scène enlevée (qui ne cesse de jouer sur l'ambiguïté des apparences, et à laquelle s'associe langoureusement le score entêtant de James Newton Howard, à son meilleur chez Shyami) que par une prestation tout en retenue du tandem Bruce Willis/Samuel L. Jackson; Incassable est un film de super-héros sombre et mature sans nul pareil, première pierre angulaire d'une étude profonde de la figure du super-héros et de la croyance populaire qu'il provoque et incarne.
Le film le plus abouti et passionnant de son metteur en scène, tout simplement.
Jonathan Chevrier
#75. Incassable de M. Night Shyamalan (2000)
Tout a été dit ou presque sur Incassable, à tel point qu'il serait presque assez présomptueux de vouloir apposer sa prose sur ce qui, est encore aujourd'hui, le plus bel effort de son étonnant metteur en scène, capable du meilleur comme du - définitivement - moins défendable, et ce d'une oeuvre à l'autre.
Pourtant, il est impossible de ne pas ressentir l'envie - ici sincère - de décortiquer encore et encore une oeuvre tellement en avance sur son temps, qu'elle s'échinait déjà à renouveler de l'intérieur un genre super-héroïque qui n'avait même pas encore connu son apogée où, plutôt, son essorage pur et simple, porté par le soutien populaire parfois incompréhensible qui va avec.
Une douce ironie quant on sait que le film est produit par une firme aux grandes oreilles n'ayant pas encore jeté son dévolu sur le catalogue Marvelien...
Trompant l'idée - déjà - à l'époque que son cinéma ne se résumait superficiellement qu'à un usage plus où moins audacieux de twists cliquants (ce qui est, évidemment, totalement stupide), Shyamalan ne fait que peu de mystère sur l'issue de son métrage, finalement ici presque anecdotique.
Copyright Gaumont Buena Vista International (GBVI) |
Plus important est le voyage, car si le spectateur a très vite compris la nature de super-héros de son protagoniste principal et, par effet de miroir brisé, celui de vilain majeur pour son nouvel " ami/mentor " qui va se révéler plus machiavélique que sa condition physique ne le laisse présager; tout le métrage est vissé sur la lente découverte des personnages, le lent et fascinant chemin fait de douleur et de brutalité, vers la lucidité d'une réalité à la fois cruelle mais juste.
Traitement réaliste du mythe super-héroïque dénué de tout artifice facile (pas de SFX, de scènes d'action rutilantes,...) tant il ne se base finalement que sur la croyance du public envers son histoire et une puissance iconographique rare (une simple cape de pluie peut s'apparenter à un véritable costume de super-héros, une canne de verre et un fauteuil roulant à tout des apparats d'un méchant, l'eau peut même se voir comme de la cryptonite...), pour rendre son aventure crédible, une croyance populaire couplée à une connaissance accrue de la culture pop américaine, qu'il convoquera plusieurs fois par la suite, avec plus où moins de succès (pour Le Village, La Jeune Fille de l'eau et Phénomènes).
Mais tout comme pour son précédent effort, Sixième Sens, c'est la méticulosité de son écriture qui élève Incassable au-delà du simple carcan du thriller surnaturel et contemplatif, où le fantastique tout comme l'émotion, né dans la banalité apparente du quotidien, que ce soit au travers de la solitude qui déconnecte lentement ses deux pôles positif - David Dunn - et négatif - Elijah Price -, où l'imaginaire fertile mais finalement lucide provenant du regard aimant d'un enfant pour son père.
Copyright Gaumont Buena Vista International (GBVI) |
Déchirant (la naissance douloureuse de Price, le pacte tacite silencieux mais formidable entre Dunn et son fils dans le final) et effrayant à la fois (ce don, très " Johnny Smith " du héros, pour déceler le mal omniprésent qui nous entoure), sublimé autant par une mise en scène enlevée (qui ne cesse de jouer sur l'ambiguïté des apparences, et à laquelle s'associe langoureusement le score entêtant de James Newton Howard, à son meilleur chez Shyami) que par une prestation tout en retenue du tandem Bruce Willis/Samuel L. Jackson; Incassable est un film de super-héros sombre et mature sans nul pareil, première pierre angulaire d'une étude profonde de la figure du super-héros et de la croyance populaire qu'il provoque et incarne.
Le film le plus abouti et passionnant de son metteur en scène, tout simplement.
Jonathan Chevrier