[SƎANCES FANTASTIQUES] : #74. The Sixth Sense
Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's (et même les plus récents); mais surtout montrer un brin la richesse des cinémas fantastique et horrifique aussi abondant qu'ils sont passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !
#74. Sixième Sens de M. Night Shyamalan (1999)
Tous ceux qui au début des années 2000, voyaient en M. Night Shyamalan un futur Steven Spielberg en puissance (là ou pourtant, ses - premières - oeuvres fortement stylisées se sentaient pourtant plus Hitchcockiennes, vu la mécanique précise de leur narration), roi de l'entertainment racé et intelligent, ont vite dû se bouffer les yeux à la petite cuillère passé le ventre mou de ces mêmes années; même si la fin de la dernière décennie a permis au bonhomme de s'offrir un second souffle salvateur.
Non seulement il n'avait pas vraiment su confirmer son potentiel statut (beaucoup trop vite offert par les critiques, on est d'accord) avec ses péloches suivantes, mais surtout en à peine dix ans, il avait accomplit la prouesse de devenir le paria number two du tout Hollywood juste derrière Uwe Boll.
La machine à rêve Hollywoodienne est une putain ingrate, mais Shyamalan n'était pas totalement à plaindre, vu qu'il s'était amusé à donner autant qu'il l'a pu, le bâton pour se faire battre plus que de raison; l'exemple parfait du money maker chouchou du système, dorloté à coups de projets bandants avant d'être copieusement lynché, avalé puis salement recraché par l'industrie.
Un parcours prenant les contours d'une descente aux enfers incontrôlable, dominée par la mauvaise idée du lascar de vouloir construire sa propre légende plutôt que de la servir intelligement.
Avec une sale image de mégalomane suffisant et caractériel collée avec de la super glue-3 sur le front, la cassure a sans doute démarré non pas avec Le Village et son twist plus alambiqué et incoherent qu'il n'en a l'air, mais peut-être dès Signes, dont les contours de divertissement populaire avait sensiblement irrité ses aficionados les plus fidèles au moment de sa sortie en 2002.
La lune de miel n'aura donc duré que deux petites péloches, le chef-d'oeuvre absolu Incassable et Sixième Sens, merveille de bande fantastique dont la maestria résiste admirablement bien aux affres du temps.
Cauchemar atmosphérique qui s'est imposé - malgré lui - comme le précurseur du thriller/film à twist sans qu'aucun de ses héritiers ne soient parvenu à sa cheville (personne ou presque, ne pouvait prédire son renversant final dès la première vision), autant que du come-back séduisant d'une horreur résolument plus adulte (et absent des salles depuis le milieu des 80s); le troisième effort de Shyamalan, porté par un classicisme formel incroyable et dénué de tout artifice/surenchère putassière, ne distille son épouvante et ses émotions que par la force implacable de sa caméra (de virtuoses plan-séquences couplés à des cadrages au plus près des visages blessés) et de ses interprètes, tout au diapason.
Tout en épure et en rigueur d'exécution (le rapport au cinéma d'Hitchcock est une nouvelle fois évident, mais aussi à celui de Carpenter), il ne fait que renforcer la puissance psychologique et émotionnelle terrible d'un pauvre petit bout d'homme, Cole (Haley Joel Osment, LA révélation du métrage), tapis dans l'ombre de l'incompréhension et de la douleur insondable, raillé par un monde qui le rejete et incompris par une mère aimante et maladroite (magnifique Toni Colette), à qui il est incapable, par peur de la décevoir et parce qu'il l'aime - tout comme elle - plus que tout, d'avouer tous les fantômes (littéralement) et tourments qui le hantent sans répit.
Son salut ne viendra finalement que dans sa relation avec un psychologue triste et pétri de remords (Bruce Willis, empathique et touchant) qui, ironie du sort, cristallise pourtant tout le mal qui assaille l'enfant, puisqu'il est lui-même un revenant.
Fort de vrais moments d'horreur viscérale (la révélation de la fille tuée par sa belle-mère, le fameux " I see dead people ") autant que de séquences déchirantes (les aveux dans la voiture, le twist final), fruit d'une rigueur d'écriture impressionnante dans son refus de ne jamais - ou presque - dévoiler sa vérité avant son ultime bobine, Sixième Sens incarne une ghost story qui exhale une terreur glaciale et obsédante à la fois, une bande allant constamment beaucoup plus loin que le tour de passe-passe qui l'a popularisé.
Un formidable drame humain sur le deuil et la solitude orchestré par un marionnettiste en total possession de ses moyens.
Jonathan Chevrier
#74. Sixième Sens de M. Night Shyamalan (1999)
Tous ceux qui au début des années 2000, voyaient en M. Night Shyamalan un futur Steven Spielberg en puissance (là ou pourtant, ses - premières - oeuvres fortement stylisées se sentaient pourtant plus Hitchcockiennes, vu la mécanique précise de leur narration), roi de l'entertainment racé et intelligent, ont vite dû se bouffer les yeux à la petite cuillère passé le ventre mou de ces mêmes années; même si la fin de la dernière décennie a permis au bonhomme de s'offrir un second souffle salvateur.
Non seulement il n'avait pas vraiment su confirmer son potentiel statut (beaucoup trop vite offert par les critiques, on est d'accord) avec ses péloches suivantes, mais surtout en à peine dix ans, il avait accomplit la prouesse de devenir le paria number two du tout Hollywood juste derrière Uwe Boll.
Copyright Gaumont Buena Vista International (GBVI) |
La machine à rêve Hollywoodienne est une putain ingrate, mais Shyamalan n'était pas totalement à plaindre, vu qu'il s'était amusé à donner autant qu'il l'a pu, le bâton pour se faire battre plus que de raison; l'exemple parfait du money maker chouchou du système, dorloté à coups de projets bandants avant d'être copieusement lynché, avalé puis salement recraché par l'industrie.
Un parcours prenant les contours d'une descente aux enfers incontrôlable, dominée par la mauvaise idée du lascar de vouloir construire sa propre légende plutôt que de la servir intelligement.
Avec une sale image de mégalomane suffisant et caractériel collée avec de la super glue-3 sur le front, la cassure a sans doute démarré non pas avec Le Village et son twist plus alambiqué et incoherent qu'il n'en a l'air, mais peut-être dès Signes, dont les contours de divertissement populaire avait sensiblement irrité ses aficionados les plus fidèles au moment de sa sortie en 2002.
La lune de miel n'aura donc duré que deux petites péloches, le chef-d'oeuvre absolu Incassable et Sixième Sens, merveille de bande fantastique dont la maestria résiste admirablement bien aux affres du temps.
Cauchemar atmosphérique qui s'est imposé - malgré lui - comme le précurseur du thriller/film à twist sans qu'aucun de ses héritiers ne soient parvenu à sa cheville (personne ou presque, ne pouvait prédire son renversant final dès la première vision), autant que du come-back séduisant d'une horreur résolument plus adulte (et absent des salles depuis le milieu des 80s); le troisième effort de Shyamalan, porté par un classicisme formel incroyable et dénué de tout artifice/surenchère putassière, ne distille son épouvante et ses émotions que par la force implacable de sa caméra (de virtuoses plan-séquences couplés à des cadrages au plus près des visages blessés) et de ses interprètes, tout au diapason.
Copyright Gaumont Buena Vista International (GBVI) |
Tout en épure et en rigueur d'exécution (le rapport au cinéma d'Hitchcock est une nouvelle fois évident, mais aussi à celui de Carpenter), il ne fait que renforcer la puissance psychologique et émotionnelle terrible d'un pauvre petit bout d'homme, Cole (Haley Joel Osment, LA révélation du métrage), tapis dans l'ombre de l'incompréhension et de la douleur insondable, raillé par un monde qui le rejete et incompris par une mère aimante et maladroite (magnifique Toni Colette), à qui il est incapable, par peur de la décevoir et parce qu'il l'aime - tout comme elle - plus que tout, d'avouer tous les fantômes (littéralement) et tourments qui le hantent sans répit.
Son salut ne viendra finalement que dans sa relation avec un psychologue triste et pétri de remords (Bruce Willis, empathique et touchant) qui, ironie du sort, cristallise pourtant tout le mal qui assaille l'enfant, puisqu'il est lui-même un revenant.
Fort de vrais moments d'horreur viscérale (la révélation de la fille tuée par sa belle-mère, le fameux " I see dead people ") autant que de séquences déchirantes (les aveux dans la voiture, le twist final), fruit d'une rigueur d'écriture impressionnante dans son refus de ne jamais - ou presque - dévoiler sa vérité avant son ultime bobine, Sixième Sens incarne une ghost story qui exhale une terreur glaciale et obsédante à la fois, une bande allant constamment beaucoup plus loin que le tour de passe-passe qui l'a popularisé.
Un formidable drame humain sur le deuil et la solitude orchestré par un marionnettiste en total possession de ses moyens.
Jonathan Chevrier