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[CRITIQUE] : Nous


Réalisatrice : Alice Diop
Acteurs : -
Distributeur : New Story
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français.
Durée : 1h57min.

Synopsis :
Une ligne, le RER B, traversée du nord vers le sud. Un voyage à l'intérieur de ces lieux indistincts qu'on appelle la banlieue. Des rencontres : une femme de ménage à Roissy, un ferrailleur au Bourget, une infirmière à Drancy, un écrivain à Gif-sur-Yvette, le suiveur d'une chasse à courre en vallée de Chevreuse et la cinéaste qui revisite le lieu de son enfance. Chacun est la pièce d'un ensemble qui compose un tout. Un possible "nous".



Critique :


Il n'y a rien d'étonnant à voir la vision d'Alice Diop se cristalliser à nouveau au coeur de son nouveau documentaire, Nous (inspiré par le livre Les Passagers du Roissy Express de François Maspero), sur le RER - ici le B -, outil périphérique qui identifie le spectateur à la région parisienne de manière étonnamment négative et ce, même s'il est un membre à part entière et même furieusement essentiel de notre quotidien.
Il marque cette frontière invisible mais réelle entre les différentes strates de la société, celle du pimpant et celle de la chair et du sang, celle où l'argent transpire du moindre pavé de rue et celle ou la précarité sociale est de plus en plus anxiogène.
La réflexion de la cinéaste et ce dès le titre, est claire, limpide : se faire se confronter toutes les facettes d'un pays qui forme ce " Nous ", ce tout collectif qui accepte autant qu'il rejette, refléter une cartographie humaine pour mieux faire comprendre prendre conscience au spectateur de l'existence de vies absolument identifiables à notre quotidien où que nous vivions, explosant les stéréotypes stigmatisant véhiculés autant par la télévision (mais pas que, coucou Bac Nord) qu'une politique d'extrême droite de plus en plus en verve.

Copyright Sarah Blum

Un regard humaniste et subtilement terre-à-terre de ce " Nous ", une vision hétérogène (comme la France) du citoyen moyen que la cinéaste scrute - jusqu'à elle-même, dans une sorte de note d'intention maladroite - à la recherche d'un instant cinématographique pas forcément révélateur de la vérité du quotidien commun mais plus dans une idée d'instantané du moment; un patchwork de témoignages disparates comme autant de stations où se confond les statuts sociaux, les générations et même l'intime (puisque la cinéaste se filme mais comme dit plus haut, filme également sa soeur infirmière).
Pur manifeste beau et bienveillant réussissant à conserver tout du long un équilibre précaire entre le récit personnel et l'ouverture à l'autre, quel qu'il soit (de royalistes célébrant l’anniversaire de la mort de Louis XVI à la basilique Saint-Denis, à un mécanicien malien en passant par sa propre soeur infirmière comme dit plus haut), la cinéaste soude ici l'unité autant qu'elle l'a brise dans sa mise en images des contrastes où l'inévitable lutte des classes ne fait que fustiger tout espoir naïf et idéaliste, d'un rapprochement inatteignable.
Éliminant toute distance et d'une humanité criante dénuée de tout jugement (tout le monde fait partie du paysage, tout fait partie de la France dans son ensemble), Alice Diop pointe les divergences évidentes au sein de ce « Nous » générique de la société, pour mieux solidifier avec intelligence et sensibilité, son discours de prise de conscience ou seul l'éradiquation de l'ignorance - volontaire ou non - peut amener à lutter pleinement contre les discriminations et nous rapprocher si ce n'est d'une union totale, au moins résolument moins déséquilibrée.


Jonathan Chevrier

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