[Y-A-QUOI A LA TELE CETTE SEMAINE ?] : #155. Semaine du 23 au 29 janvier
Chaque semaine je continue à faire — pour vous — le tour des programmes TV en extirpant de tout cela une offre cinématographique autour de trois œuvres. Mais, je vais aussi vous proposer des contre-programmations ainsi que des secondes parties de soirée pour les cinéphiles insomniaques.
Semaine du 23 Janvier au 29 Janvier.
Dimanche 23 Janvier. Sibyl de Justine Triet sur France2.
Sibyl est une romancière reconvertie en psychanalyste. Rattrapée par le désir d’écrire, elle décide de quitter la plupart de ses patients. Alors qu’elle cherche l’inspiration, Margot, une jeune actrice en détresse, la supplie de la recevoir. En plein tournage, elle est enceinte de l’acteur principal... qui est en couple avec la réalisatrice du film.
L’annonce du décès de Gaspard Ulliel a secoué plus d’un cinéphile. Il faut dire qu’avec les années, l’acteur avait su affiner ses choix, se faire plus exigent avec ses rôles pour dessiner une filmographie qui aurait dû compter encore beaucoup de grands films. Forcément, les chaines ont bousculé leurs programmations tout au long de la semaine et ce sera encore le cas avec donc Sibyl. Il est vrai qu’il n’y possède qu’un rôle secondaire, mais je ne pouvais pas ne pas le mettre ici dans cette sélection.
Ce petit préambule fait, parlons donc de Sibyl. Après Victoria, Justine Triet retrouve Virginie Efira pour offrir comme un miroir de leur précédente collaboration. En effet, si Victoria était une comédie dramatique plus que comique que dramatique, Sibyl est une comédie dramatique plus dramatique que comique. Un inversement qui s’opère petit à petit, comme si la cinéaste tenait à nous dévoiler bout par bout toute la complexité d’une héroïne qui vient défier le dictat du bonheur. Oui, Sibyl est un film disant qu’on a le droit d’être perdue, esseulé, qu’on a le droit de sentir une douleur vive même lorsque les souvenirs en question sont anciens. Mais alors, comment aller mieux ? Justine Triet ne le sait pas vraiment, peut-être se mentir un peu à soi.
Lundi 24 Janvier. Les Sorcières d’Eastwick de George Miller sur Arte.
Trois jeunes femmes espiègles et indépendantes se morfondent dans la très puritaine petite ville d’Eastwick où jadis furent brulées maintes sorcières accusées de commerce avec le Diable. Nos trois belles se réunissent tous les week-ends et babillent gaiment à bâtons rompus de tous et sur tout. Jusqu’au jour où un extravagant personnage, un certain Daryl van Horne, s’installe dans la demeure la plus somptueuse de la ville.
Quand on regarde de loin, on pourrait croire que Les Sorcières d’Eastwick est une petite comédie sophistiquée avec un casting alléchant. Et c’est partiellement vrai. En effet, le film déroule son récit avec malice et ne refuse jamais à donner à son spectateur quelques scènes foutrement hilarantes. Pourtant, quand on commence à y regarder les détails de cet ensemble on y découvre autre chose. George Miller filme des femmes comme des prisonnières de cette Amérique puritaine qui vont se libérer de ces carcans. Alors oui, cette émancipation se fait au travers d’un homme, mais le film va plus loin, car il s’agit, dans un second temps, de se débarrasser de cet être entravant encore leurs désirs de liberté. C’est là que réside toute la force féministe d’une comédie qui décidément est plus profonde qu’elle n’y parait.
Mardi 25 Janvier. Vice-Versa de Pete Docter sur W9.
Grandir n’est pas de tout repos, et la petite Riley ne fait pas exception à la règle. À cause du travail de son père, elle vient de quitter le Midwest et la vie qu’elle a toujours connue pour emménager avec sa famille à San Francisco.
Derrière son high-concept où les émotions se voient incarnées, Pete Docter tisse un récit qui vise a émiettés nos petits cœurs pour nous laisser les yeux embués. Et cela marche. Le récit est d’abord un pur émerveillement tant il multiplie les idées visuelles afin de rendre compte des méandres de notre cerveau. Ludique donc, mais aussi presque expérimental lors d’une séquence de Pensées Abstraites, le film tient a dire qu’enfant ou pas rien n’est compliqué a comprendre quand l’idée qui l’accompagne est limpide. Au milieu de ce petit laboratoire, il y a les émotions qui prennent vie et qui viennent accompagner des propos parfois bouleversants, parfois doux, mais toujours d’une sublime audace. C’est là toute la réussite de ce film fourmillant d’observation, de réflexion, d’émotions.
Thibaut Ciavarella