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[LES CARNETS DE L’ÉTRANGE] : Jour 5


Étrange Festival cuvée 2021 : J-5.


Le rendez-vous de la rentrée pour les cinéphiles parisiens est, comme chaque année, L’Étrange Festival et son lot de curiosités venues des quatre coins du monde. Né en 1993, l’évènement prend place, cette année et comme d’habitude, au Forum des images, dans le centre de la capitale. C’est un immanquable pour tous les passionnés d’horreurs, de genre, de bizarre, de tout ce qui sort des écrans conventionnels et qu’on ne verrait pas ailleurs. Cette année, le festival propose sa traditionnelle compétition, sa sélection Mondovision, ses découvertes de nouveaux talents et ses trouvailles de documentaires mais aussi des cartes blanches et focus. La réalisatrice Lynne Ramsay a ainsi amené quelques œuvres avec elle, tout comme Pierre Bordage. On retrouve, enfin, des projections des films de Atsushi Yamatoya, un focus Fred Halsted et trois films de Yûzô Kawashima.

C’est un programme fort alléchant auquel on est ravi d’assister. Nos rédacteurs se font un plaisir de découvrir, pour vous, ces inédits ou ces rétrospectives.

Léa démarre sa journée avec Coffin Homes de Fruit Chan, présenté dans le cadre de la sélection Mondovision. Ce long-métrage hong-kongais traite des appartements à compartiments, aussi appelés « maisons cercueils », qui fleurissent dans la ville, à travers trois histoires de « maisons » hantées. On laisse la parole à notre rédactrice : « Quel curieux objet cinématographique que ce film, série B avec un message pourtant clair et ambitieux sur le marché de l’immobilier à Hong Kong ! Le ridicule le dispute à des effets gores de qualité variable (mention spéciale au ravalement des murs avec du sang multicolore fait par des têtes coupées !). L’aspect horrifique s’efface assez vite derrière les nécessités économiques, les coups bas et les magouilles entre frères et sœurs, d’agences véreuses, de propriétaires peu scrupuleux. Les bons sentiments dégoulinent dans ce patchwork d’appartements vides et luxueux ou au contraire étriqués et insalubres. Faisant fi de toute progression cohérente, le film assume son côté nanardesque pour proposer un “happy end” entre fantômes et humains. Stéphane Plaza aurait été fier ! »

© D.R.

Si vous souhaitez cette histoire vous intrigue, sachez que Coffin Homes sera rediffusé mardi 14 septembre à 16h00 !  

On continue dans la sélection Mondovision avec Oranges Sanguines, la comédie (noire) française de Jean-Christophe Meurisse qui avait provoqué un petit choc lors de sa projection en séance de minuit au dernier Festival de Cannes. Ce deuxième film du réalisateur et metteur en scène suit un ministre accusé de fraude fiscale, un couple de retraités espérant combler leurs dettes grâce à un concours de rock et une adolescente qui découvre sa sexualité, pendant qu’un psychopathe rôde dans les environs. Manon a tenté l’expérience : « Oranges Sanguines se présente, dans un premier temps, comme une comédie un peu gênante, à caractère boomer et un peu bête, avant de basculer petit à petit dans la violence. Ce n’est certainement pas le film le plus fin du festival et on doit lui reconnaître une certaine maladresse mais ça reste une œuvre d’actualité extrêmement dérangeante mais pas si provocante, sur une société cruelle, qui héberge des individus à son image. C’est un exutoire calme et progressif dont le jusqu’au-boutisme finit par séduire, pour faire trembler de dégoût, de rage mais aussi de joie. »

Copyright The Jokers

Si vous avez l’estomac bien accroché (ou vide), vous pourrez rattraper le film jeudi 16 septembre à 22h00.

Léa se dirige ensuite vers Tin Can, présenté en compétition. Ce film canadien de science-fiction est réalisé par le cinéaste et artiste visuel Seth A. Smith. Le programme du festival nous vend le pitch suivant : « Alors qu’une épidémie de peste ravage le monde, une parasitologue de renom se retrouve emprisonnée dans une chambre d’hibernation. Pour s’en échapper, elle doit commettre l’irréparable. »

Léa, enthousiasmée par ce pitch nous confie son avis en sortant de la séance : « Un film confiné présentant une pandémie mondiale ? A priori, Tin Can fait tout pour être dans la tendance. Dès le début cependant, le film nous donne tort en présentant son parasite fongique aux symptômes autrement plus dégueulasses qu’un virus grippal. La promesse d’une SF exigeante et froide à la Possessor (le nom de Brandon Cronenberg au générique n’est pas un hasard) et aux effets body horror appuyés est bien tenue. Le film nous suffoque dans sa première partie, où la compréhension des enjeux et de ce qui se passe est presque totalement absente. Des idées de mise en scène et de dispositifs d’enfermement inédits sont présentées, mais les dialogues paraissent illogiques. Les deux chapitres suivants nous désorientent encore plus, le film étant très peu généreux sur les clés de son intrigue, là où il laisse pléthore d’effets sons et images gores nous prendre aux tripes. Obscur et radical, Tin Can est un bijou de noirceur et de cynisme total, où rien n'est expliqué mais suggère des possibilités effrayantes. J’ai été séduite par cette confrontation métal contre champignon, happé par l’expérience sensorielle sans être convaincue. Le genre d’expériences qu’on cherche à l’étrange, finalement ! »

© D.R.

Notre rédactrice vous a donné envie de découvrir le film ? Tin Can bénéficiera d’une seconde projection mardi 14 septembre à 17h45.

De son côté, Manon clôture son étrange week-end avec le documentaire Raw! Uncut! Video! qui traite d’un studio pornographique gay, désirant proposer du sex safe en pleine épidémie de SIDA. Notre rédactrice en tire ces quelques mots : « Raw! Uncut! Video! est une histoire d’amour et d’épanouissement personnel. Loin d’une industrie qui exploite ses performeurs, le studio se voulait porte-parole et moyen d’expression pour ceux (homo comme hétéro !) qui souhaitaient vivre pleinement leurs fétiches et ce en toute sécurité, avec un consentement certain. C’est aussi la vision positive d’une sexualité alternative et très saine, qui ne peut se jouer qu’avec soi-même, ou ne pas dépendre de la pénétration. Le film brosse, à travers les images de cuir, de fouets, boue, le portrait étonnement positif d’une époque difficile, grâce à ce qui semble avoir été une parenthèse enchantée au milieu du chaos. »

© D.R.

Raw! Uncut! Video! sera rediffusé mercredi 15 septembre à 21h45. Petite précision utile : le documentaire contient des scènes de relations sexuelles non simulées avec des actes de bondage et sado-masochisme.

Le premier week-end de L’Etrange se termine sur ces mots mais rappelons qu’il reste encore une semaine complète pour découvrir la sélection du festival au Forum des images ! La Fucking Team se fait une joie de continuer à vous partager leur expérience.


La Fucking Team (Manon Franken)