[CRITIQUE] : Moffie
Réalisateur : Oliver Hermanus
Acteurs : Kai Luke Brummer, Mark Elderkin, Michael Kirch, Luke Tyler, ...
Distributeur : Outplay
Budget : -
Genre : Drame, Romance, Guerre
Nationalité : Sud-africain, Britannique
Durée : 1h44min
Synopsis :
1981, Nicholas a 16 ans, comme tous les jeunes blancs Sud-Africains de son âge, il doit accomplir son service militaire pendant deux ans. Durant cette période, le gouvernement sud-africain, blanc, raciste et ségrégationniste, mène une politique étrangère qui vise à combattre les communistes et die swart gevaar : "le danger noir". Nicholas est envoyé sur le front au sud de l’Angola pour défendre le régime de l'apartheid. Il tente alors de survivre tant aux horreurs de la guerre qu’à la brutalité de l'armée.
Dans les années 80, durant l’Apartheid, les jeunes hommes blancs sud-africains devaient effectuer deux ans de service militaire, se soldant par quelques mois sur le terrain dans la frontières avec l’Angola où la guerre faisait rage. L’écrivain André-Carl Van der Merwe raconte ce passage de sa jeunesse dans son roman autobiographique au titre éponyme, Moffie. Le mot afrikaans peut se traduire par “tafiole”, une insulte homophobe, qui sera souvent prononcée à l’encontre des jeunes adolescents venus subir un entraînement militaire intensif. Le quatrième long métrage d'Oliver Hermanus prend le point de vue de Nicholas (Kai Luke Brummer), un jeune homme gay sous un régime raciste et homophobe.
Dans cette violence, Oliver Hermanus arrive cependant à filmer des moments de tendresse suspendue, comme ce baiser volé entre Nick et Dylan (Ryan de Villiers) ou une étreinte pour se réchauffer sous la pluie dans une tranchée. Ces moments forment une bulle de douceur, en opposition avec ce qui les entoure. Moffie est d’ailleurs esthétiquement magnifique, une dichotomie s’installe entre les images et les actions. La lumière dorée du couché de soleil vient illuminer les visages exténués des cadets, en proie aux tourments et à la fatigue du corps. Le cinéaste tient cet équilibre entre ombre et lumière, beauté et ténèbres jusqu’aux derniers instants.
Laura Enjolvy
Acteurs : Kai Luke Brummer, Mark Elderkin, Michael Kirch, Luke Tyler, ...
Distributeur : Outplay
Budget : -
Genre : Drame, Romance, Guerre
Nationalité : Sud-africain, Britannique
Durée : 1h44min
Synopsis :
1981, Nicholas a 16 ans, comme tous les jeunes blancs Sud-Africains de son âge, il doit accomplir son service militaire pendant deux ans. Durant cette période, le gouvernement sud-africain, blanc, raciste et ségrégationniste, mène une politique étrangère qui vise à combattre les communistes et die swart gevaar : "le danger noir". Nicholas est envoyé sur le front au sud de l’Angola pour défendre le régime de l'apartheid. Il tente alors de survivre tant aux horreurs de la guerre qu’à la brutalité de l'armée.
Critique :
Avec #Moffie, Oliver Hermanus évite l’écueil de la comparaison entre racisme et homophobie et, au contraire, explore le fait qu’un système oppressif et violent en alimente un autre, et montre qu’il est nécessaire d’être inclusif dans les luttes. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/f65aOqNvwQ
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) June 25, 2021
Dans les années 80, durant l’Apartheid, les jeunes hommes blancs sud-africains devaient effectuer deux ans de service militaire, se soldant par quelques mois sur le terrain dans la frontières avec l’Angola où la guerre faisait rage. L’écrivain André-Carl Van der Merwe raconte ce passage de sa jeunesse dans son roman autobiographique au titre éponyme, Moffie. Le mot afrikaans peut se traduire par “tafiole”, une insulte homophobe, qui sera souvent prononcée à l’encontre des jeunes adolescents venus subir un entraînement militaire intensif. Le quatrième long métrage d'Oliver Hermanus prend le point de vue de Nicholas (Kai Luke Brummer), un jeune homme gay sous un régime raciste et homophobe.
Quiconque a déjà visionné Full Metal Jacket de Stanley Kubrick sait que la préparation à la guerre est autant physique que psychologique. Moffie se fait alors l’héritage du célèbre film, en le replaçant à une époque un peu plus proche, en 1981. L’Afrique du Sud est alors coupée en deux, les blancs (pourtant en minorité) dominent avec une politique raciste et extrêmement violente. Nick, seize ans, doit faire ses au-revoir à sa famille, il part le lendemain pour son service militaire. Son père lui donne une revue pornographique, dans un geste de transmission virile. Car dans l’imaginaire collectif, le service militaire transforme les garçons en hommes. La boue, les armes et les insultes des généraux à longueur de journée sont vecteurs de virilité, et ces (encore) innocents jeunes ados en seront abreuvés. Déjà, le cinéaste distille une sorte de rébellion dans son personnage. Après avoir dû subir les adieux obligatoires, il s’élance dans la nuit, courant à l’opposé du cadre, comme s’il voulait sortir du champ.
Dès qu’il met le pied dans le train qui l’emmène au camp militaire, Nick subit les cris et les insultes. Ils doivent rentrer dans le rang, souffrir en silence et ne surtout pas montrer des signes de faiblesses. Le discours inaugural donne le ton : être homosexuel est tout bonnement interdit, et passible de punition. Laquelle ? Nous le saurons très vite, quand deux recrues sont dénoncées, frappées, humiliées et ensuite emmenées dans l'énigmatique quartier 22, une cellule psychologique pour recrue déviante. L'enrôlement est puissant : il est interdit d’émettre une opinion sur les méthodes utilisées, de faire preuve d’empathie auprès des noirs (“die swart gevaar” en afrikaans : le danger noir) et des communistes. On leur demande de ne plus réfléchir et de devenir des machines de guerre. Le film fait une critique virulente de ce régime politique. Dans un effet de foule, de “boys club” blanc, les jeunes hommes, pas encore cadets, ont déjà imprimé le racisme et s’en prennent à un homme noir qui a le malheur d’attendre son train sur le quai. Sa sidération devient la nôtre, devant cette violence qui s’inscrit dans un système de ségrégation parfaitement conscient. L’homophobie est tout aussi systémique et découle des rôles genrés imprégnés de la guerre. Les hommes sont censés être forts pour protéger leur pays, leurs femmes et leurs enfants du danger. Moffie évite l’écueil de la comparaison entre racisme et homophobie, au contraire, le film explore le fait qu’un système oppressif en alimente un autre, et montre qu’il est nécessaire d’être inclusif dans les luttes.
Copyright Outplay |
Dans cette violence, Oliver Hermanus arrive cependant à filmer des moments de tendresse suspendue, comme ce baiser volé entre Nick et Dylan (Ryan de Villiers) ou une étreinte pour se réchauffer sous la pluie dans une tranchée. Ces moments forment une bulle de douceur, en opposition avec ce qui les entoure. Moffie est d’ailleurs esthétiquement magnifique, une dichotomie s’installe entre les images et les actions. La lumière dorée du couché de soleil vient illuminer les visages exténués des cadets, en proie aux tourments et à la fatigue du corps. Le cinéaste tient cet équilibre entre ombre et lumière, beauté et ténèbres jusqu’aux derniers instants.
Laura Enjolvy