[CRITIQUE] : Oxygène
Réalisateur : Alexandre Aja
Acteurs : Mélanie Laurent, Mathieu Amalric, Malik Zidi, Marc Saez,...
Distributeur : Netflix France
Budget : -
Genre : Science-fiction, Thriller, Drame.
Nationalité : Français, Américain.
Durée : 1h40min.
Synopsis :
Une jeune femme se réveille seule dans une unité cryogénique. Elle ne sait plus qui elle est, ni comment elle a pu finir enfermée dans une capsule de la taille d'un cercueil. Tandis qu'elle commence à manquer d'oxygène, elle va devoir recomposer les éléments de sa mémoire pour sortir de ce cauchemar.
Critique :
Il y a quelque chose de passionnant, et même de profondément rassurant, à l'idée de se dire que le cinéma d'Alexandre Aja est une redécouverte constante, le bonhomme n'étant jamais vraiment là ou l'on attend - que ce soit pour le meilleur ou pour le pire.
Ce sentiment rafraîchissant est sans doute pourquoi chacune de ses oeuvres fait un minimum l'événement, cette sorte de promesse tacite faite à son auditoire de l'emmener coûte que coûte dans un voyage soit réflexif, soit savamment jouissif.
Loin du frisson extrême et viscéral de Crawl, son Oxygène, qui débarque directement sur Netflix (et qui marque son premier film dans sa langue natale depuis Haute Tension), vibre d'une manière diamétralement opposée et plus hermétique, en épousant les contours d'un huis clos/survival claustrophobique haletant et hors des sentiers battus.
Arrivant justement au moment même où l'humanité, et d'autant plus la France, semble - provisoirement - émerger d'une sorte de sommeil forcé mondial, provoquant de facto à sa vision, une résonance toute particulière à l'isolement que chaque spectateur - à différentes échelles - a pu vivre dans son propre quotidien (d'autant plus que le script comporte une pandémie mondiale en son sein); le film trouble tant l'essence même de ce qu'il incarne n'est pas tant une histoire de survie dans le sens conventionnel du terme, mais plus quelque chose d'existentielle - comme Gravity - et de sensoriel, son héroïne devant deviner qui elle est pour avoir conscience de ce quelle vie, et ainsi avoir une chance de survivre.
Elle, c'est le Dr Elizabeth Hansen, qui se réveille dans une chambre cryogénique, sans n'avoir aucune idée de comment elle est arrivée là-bas et ni se souvenir de qui elle est.
Le système informatique interne du caisson, MILO (incarné vocalement par Mathieu Amalric Siri-esque, à la diction aussi froide que posée), informe la jeune femme que son lieu d'accueil a été endommagé et qu'en tant que tel, il ne lui reste plus que 33% d'un oxygène qui se réduit à une vitesse indéterminée.
En l'absence d'aide extérieure - laissée en grande partie invisible par le spectateur -, il appartient uniquement à Liz donc de découvrir qui elle est et, en fin de compte, de comprendre comment elle peut survivre alors que ses réserves d'oxygène s'épuisent...
S'il est facile de passer à côté de la richesse de son concept en termes de mise en place de rebondissements à la fois thématiques et narratifs (d'autant plus quand on se loge dans l'idée que tout a déjà été vu), l'ajout salvateur d'une torsion scénaristique originale - la cryogénie médicale - et d'un cauchemar syntaxique réel (devoir absolument formuler correctement vos questions afin d'obtenir une réponse de votre seule aide à bord), suffit à rassurer face à la créativité de l'entreprise.
Intelligent (mais trop en dire ruinerait totalement ses effets), débrouillard dans sa manière de maximiser la petitesse de son cadre, minimaliste à l'extrême (une chambre cryogénique semblable à un cercueil, qui ne s'autorise que quelques écarts extérieurs) en maximisant ses enjeux dès le départ, tout en restant tout du long visuellement vivant (une mise en scène affutée et inventive couplée à une superbe photographie de Maxime Alexandre, sans oublier un immense sound design de Ken Yasumoto et un score hypnotique de Robin Coudert), effrayant - surtout pour les claustrophobes - et au final jusqu'au-boutiste et déchirant; la bande nous fait le témoin privilégié d'un cauchemar spatial tendu à l'extrême en nous pliant complètement dans tous les sens, alors que le tout se passe uniquement dans une petite capsule.
Singulier, réglé comme une horlogerie suisse (pas d'aérations inutiles ou de divers stratagèmes visuels : tout va - presque - à l'essentiel, même quand la narration se laisse aller à quelques flashbacks désorientants) et tout en étant logiquement familier (on décèle des rapports évidents au Buried de Ricardo Cortés, au Alien de Ridley Scott voire même au Matrix des Wachowski), Oxygène ne serait cependant rien sans la partition habitée d'une Mélanie Laurent proprement monstrueuse - certainement son plus beau rôle à ce jour -, avec qui Aja forme une alchimie redoutable (il sait quand utiliser sa performance physique et quand uniquement se concentrer sur sa voix).
Plus que toute plausibilité narrative, avec son investissement hors du commun - elle ne joue pas Elizabeth Hansen/Omicron 267, elle l'est -, littéralement au bord de la rupture (mentalement et physiquement), la comédienne porte le film sur ses larges épaules, convoque une empathie indiscutable (ses triomphes comme ses craintes, sont également les nôtres) et exprime avec brio face caméra toute la rage, la peur, la colère, le désespoir et la frustration d'un femme injustement jetée de force devant la grande faucheuse (elle passe par toutes les étapes du deuil, du refus à l'acceptation).
Stimulant, sous tension et pertinent dans sa nature isolationniste (et encore une fois, encore plus dans le contexte social actuel), Oxygène est un pur trip sensoriel et anxiogène impitoyablement efficace, qui en impose autant qu'il tient méchamment en haleine durant une heure et demi... et on n'en demandait pas plus.
Jonathan Chevrier
Acteurs : Mélanie Laurent, Mathieu Amalric, Malik Zidi, Marc Saez,...
Distributeur : Netflix France
Budget : -
Genre : Science-fiction, Thriller, Drame.
Nationalité : Français, Américain.
Durée : 1h40min.
Synopsis :
Une jeune femme se réveille seule dans une unité cryogénique. Elle ne sait plus qui elle est, ni comment elle a pu finir enfermée dans une capsule de la taille d'un cercueil. Tandis qu'elle commence à manquer d'oxygène, elle va devoir recomposer les éléments de sa mémoire pour sortir de ce cauchemar.
Critique :
Loin du frisson extrême et viscéral de #Crawl, #Oxygène vibre d'une manière diamétralement opposée et bien plus hermétique, en épousant les contours d'un huis clos/survival claustrophobique haletant et hors des sentiers battus, dominé par une Mélanie Laurent juste exceptionnelle. pic.twitter.com/xfjbdhmYsa
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) May 12, 2021
Il y a quelque chose de passionnant, et même de profondément rassurant, à l'idée de se dire que le cinéma d'Alexandre Aja est une redécouverte constante, le bonhomme n'étant jamais vraiment là ou l'on attend - que ce soit pour le meilleur ou pour le pire.
Ce sentiment rafraîchissant est sans doute pourquoi chacune de ses oeuvres fait un minimum l'événement, cette sorte de promesse tacite faite à son auditoire de l'emmener coûte que coûte dans un voyage soit réflexif, soit savamment jouissif.
Loin du frisson extrême et viscéral de Crawl, son Oxygène, qui débarque directement sur Netflix (et qui marque son premier film dans sa langue natale depuis Haute Tension), vibre d'une manière diamétralement opposée et plus hermétique, en épousant les contours d'un huis clos/survival claustrophobique haletant et hors des sentiers battus.
Copyright Shanna Besson/Netflix |
Arrivant justement au moment même où l'humanité, et d'autant plus la France, semble - provisoirement - émerger d'une sorte de sommeil forcé mondial, provoquant de facto à sa vision, une résonance toute particulière à l'isolement que chaque spectateur - à différentes échelles - a pu vivre dans son propre quotidien (d'autant plus que le script comporte une pandémie mondiale en son sein); le film trouble tant l'essence même de ce qu'il incarne n'est pas tant une histoire de survie dans le sens conventionnel du terme, mais plus quelque chose d'existentielle - comme Gravity - et de sensoriel, son héroïne devant deviner qui elle est pour avoir conscience de ce quelle vie, et ainsi avoir une chance de survivre.
Elle, c'est le Dr Elizabeth Hansen, qui se réveille dans une chambre cryogénique, sans n'avoir aucune idée de comment elle est arrivée là-bas et ni se souvenir de qui elle est.
Le système informatique interne du caisson, MILO (incarné vocalement par Mathieu Amalric Siri-esque, à la diction aussi froide que posée), informe la jeune femme que son lieu d'accueil a été endommagé et qu'en tant que tel, il ne lui reste plus que 33% d'un oxygène qui se réduit à une vitesse indéterminée.
Copyright Shanna Besson/Netflix |
En l'absence d'aide extérieure - laissée en grande partie invisible par le spectateur -, il appartient uniquement à Liz donc de découvrir qui elle est et, en fin de compte, de comprendre comment elle peut survivre alors que ses réserves d'oxygène s'épuisent...
S'il est facile de passer à côté de la richesse de son concept en termes de mise en place de rebondissements à la fois thématiques et narratifs (d'autant plus quand on se loge dans l'idée que tout a déjà été vu), l'ajout salvateur d'une torsion scénaristique originale - la cryogénie médicale - et d'un cauchemar syntaxique réel (devoir absolument formuler correctement vos questions afin d'obtenir une réponse de votre seule aide à bord), suffit à rassurer face à la créativité de l'entreprise.
Intelligent (mais trop en dire ruinerait totalement ses effets), débrouillard dans sa manière de maximiser la petitesse de son cadre, minimaliste à l'extrême (une chambre cryogénique semblable à un cercueil, qui ne s'autorise que quelques écarts extérieurs) en maximisant ses enjeux dès le départ, tout en restant tout du long visuellement vivant (une mise en scène affutée et inventive couplée à une superbe photographie de Maxime Alexandre, sans oublier un immense sound design de Ken Yasumoto et un score hypnotique de Robin Coudert), effrayant - surtout pour les claustrophobes - et au final jusqu'au-boutiste et déchirant; la bande nous fait le témoin privilégié d'un cauchemar spatial tendu à l'extrême en nous pliant complètement dans tous les sens, alors que le tout se passe uniquement dans une petite capsule.
Copyright Shanna Besson/Netflix |
Singulier, réglé comme une horlogerie suisse (pas d'aérations inutiles ou de divers stratagèmes visuels : tout va - presque - à l'essentiel, même quand la narration se laisse aller à quelques flashbacks désorientants) et tout en étant logiquement familier (on décèle des rapports évidents au Buried de Ricardo Cortés, au Alien de Ridley Scott voire même au Matrix des Wachowski), Oxygène ne serait cependant rien sans la partition habitée d'une Mélanie Laurent proprement monstrueuse - certainement son plus beau rôle à ce jour -, avec qui Aja forme une alchimie redoutable (il sait quand utiliser sa performance physique et quand uniquement se concentrer sur sa voix).
Plus que toute plausibilité narrative, avec son investissement hors du commun - elle ne joue pas Elizabeth Hansen/Omicron 267, elle l'est -, littéralement au bord de la rupture (mentalement et physiquement), la comédienne porte le film sur ses larges épaules, convoque une empathie indiscutable (ses triomphes comme ses craintes, sont également les nôtres) et exprime avec brio face caméra toute la rage, la peur, la colère, le désespoir et la frustration d'un femme injustement jetée de force devant la grande faucheuse (elle passe par toutes les étapes du deuil, du refus à l'acceptation).
Copyright Shanna Besson/Netflix |
Stimulant, sous tension et pertinent dans sa nature isolationniste (et encore une fois, encore plus dans le contexte social actuel), Oxygène est un pur trip sensoriel et anxiogène impitoyablement efficace, qui en impose autant qu'il tient méchamment en haleine durant une heure et demi... et on n'en demandait pas plus.
Jonathan Chevrier