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[COEURS D♡ARTICHAUTS] : #4. Before Midnight

Copyright Prokino Filmverleih


Parce que l'overdose des téléfilms de Noël avant même que décembre ne commence, couplé à une envie soudaine de plonger tête la première dans tout ce qui est feel good et régressif, nous a motivé plus que de raison à papoter de cinéma sirupeux et tout plein de guimauve; la Fucking Team vient de créer une nouvelle section : #CoeursdArtichauts, une section ou on parlera évidemment de films/téléfilms romantiques, et de l'amour avec un grand A, dans ce qu'il a de plus beau, facile, kitsch et même parfois un peu tragique.
Parce qu'on a tous besoin d'amour pendant les fêtes (non surtout de chocolat, de bouffe et d'alcool), et même toute l'année, préparez votre mug de chocolat chaud, votre petite (bon grande) assiette de cookies et venez rechauffer vos petits coeurs de cinéphiles fragiles avec nous !


#4. Before Midnight de Richard Linklater (2013)


Si Before Sunrise épousait avec tendresse et romantisme la naissance d'un amour aux fausses apparences d'union impossible, et que Before Sunset s'arrêtait lui sur les frustrations et les regrets d'une vie sentimentale décevante, justement à cause du fait de ne pas avoir pleinement pu vivre cet amour fantasmé, Before Midnight lui s'attarde, non sans avec un certain humour salvateur, sur ladite consommation de cet amour passionnel, choisit consciemment au risque de l'érosion (comme toute passion pleinement vécue), qui se fait d'ailleurs de plus en plus lattant au moment où le cap de la quarantaine, et de sa fameuse crise, est fraichement passé.

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En seulement cinq ou six séquences aux monologues aussi fluides que profonds et renversants, ne trahissant jamais le style verbal typique de la franchise (comme toujours, tout semble improvisé alors que chaque ligne de dialogue est finement structurée et millimétré), le trio magique Linklater/Delpy/Hawke dissèque avec flamboyance le couple contemporain moyen, qui la quarantaine donc bien tassée, doit tirer un bilan du chemin parcouru, avec le plus d'honnêteté et de lucidité possible.
Honnêteté qui ne manquera justement jamais à Jesse et Céline, sublimé par des acteurs talentueux à la spontanéité et à la complicité désarmantes, qui traiteront de tous les sujets possibles de cette problématique (les regrets d'une vie passée, celle surtout d'un père n'ayant pas pu voir grandir son fils né d'un précédent mariage, la vieillesse et sa routine éprouvante face à la fougue d'une jeunesse perdue, la quête de la simplicité dans une vie familiale quotidiennement épuisante et insatisfaisante, la question de la place de chacun dans le couple, les sempiternels soupçons de tromperie,...), avec une drôlerie aussi tendre que remplit d'amertume.

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Un portrait humain profondément réaliste, naturel, percutant et rafraichissant, dénué de tout pathos et qui trouve son apothéose dans un final sublime, ou la rancœur qui gangrène douloureusement le quotidien des deux amants, nourri par les non-dits et les frustrations de chacun, explose dans un ton résolument très Allenien (Delpy ne s'est de toute façon jamais caché d'être une grande fan du cinéaste New-Yorkais), voire même très méditerranéenne.
Aussi tendre que tendu, profond et réaliste mais jamais pessimiste pour autant (mais bien plus sombre que les précédents films), poussant autant le spectateur à rire de pleins poumons qu'à réfléchir sur des scènes qu'il ne connait (logiquement) que trop bien, Before Midnight est tout simplement une sublime péloche décomplexée et mémorable, captant toujours avec magie l'insaisissable pour beaucoup, une bande presque parfaite au résultat bien loin d'incarner l'épisode de trop que certains redoutaient aux prémices de sa préparation.

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Attachant, drôle, magnifiquement interprété (une fois encore, Julie Delpy et Ethan Hawke sortent le grand jeu), scénarisé (comme d'habitude à trois têtes avec le trio) et mis en scène (Richard Linklater emballe le tout solidement et surtout sans aucun artifice), ce Before, contrairement aux précédents opus, pourrait presque se suffire à lui-même.
Une conclusion d'une réussite inattaquable pour une trilogie délicieusement minimaliste, intimiste et précieuse, consciente de sa force et construite sur le temps (alors que sa chronologie ne dépasse à peine les quarante-huit heures), et dont personnellement, je ne serais pas contre qu'elle se transforme d'ici quelques temps, en une puissante quadrilogie.


Jonathan Chevrier