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[CRITIQUE] : The Professor and The Madman


Réalisateur : Farhad Safinia
Avec : Mel Gibson, Sean Penn, Eddie Marsan, Steve Coogan, Natalie Dormer, Jennifer Ehle, Stephen Dillane, Ioan Gruffudd, Jeremy Irvine,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Drame, Biopic.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h04min.

Synopsis :
La collaboration entre un philologue écossais et un médecin militaire interné dans un hôpital psychiatrique, qui amena à la création de l'Oxford English Dictionary.



Critique :



Tout partait d'un vrai désir de cinéma, celui vingt ans plus tôt d'un Mel Gibson alors au firmament de sa carrière (la fin des 90's), qui souhaitait capitaliser sur le succès monstrueux aussi bien critique et public de Braveheart, pour mettre en images la création de l'Oxford English Dictionary (d'après le roman de Simon Winchester, The Surgeon of Crowthorne), enlacée autour de l'amitié improbable entre un autodidacte écossais - le lexicographe James Murray - et un vétéran américain de la guerre de Sécession - le docteur William Chester Minor -, schizophrène et souffrant du SSPT.
In fine, passé par une traversée du désert (vingt ans de développement hell, un tournage compliqué avec un réal viré avant la fin, un dépassement de budget,...) puis une grosse bataille juridique qui a vu Gibson himself renier artistiquement le film - il n'en a pas fait la promo, comme Sean Penn -, l'effort de Farhad Safinia (scénariste sur Apocalypto et dont c'était le premier long, ici crédité sous le nom de P.B. Shemran) est sorti directement en VOD dans l'indifférence générale.

Copyright KSM

Pire, il a même été méchamment pris à partie par des critiques US en faisant une purge presque aussi indéfendable que les potacheries de Tyler Perry et autre Adam Sandler.
Récit d'acceptation et de rédemption à plusieurs niveaux (celle d'un homme qui tente de se faire accepter par des élitistes, un autre qui tente de guérir et de se racheter de son meurtre horrible), The Professor and The Madman n'est résolument pas la foirade annoncée, au moins autant qu'elle est une oeuvre malade et en proie à de multiples personnalités, l'obligeant constamment à ne jamais savoir sur quel pied danser.
Entre le drame d'époque luxuriant et passionnant sur des hommes intelligents qui entreprennent une tâche insondable et colossale qui était appelée changer le monde (dans un mélange un peu bizarre entre The Dangerous Method de Cronenberg, et l'académisme Imitation Game de Morten Tyldum), qui glisse dangereusement jusqu'à totalement se perdre, dans le territoire du thriller médical, le tout avec une couche de romance interdite un brin malaisante (entre Minor et la veuve de sa victime, à l'écriture effroyablement ridicule); le film démontre sporadiquement la grandeur qu'il espère constamment atteindre (un comble pour un film verbeux sur l'amour de la langue et la richesse des mots, mais qui n'a pas une seule tirade marquante en son sein), tout en semblant volontairement se tirer une balle dans sa propre jambe dès qu'il en a l'occasion.

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Un sentiment de tiraillements frustrant et constant qui se retrouve à tous les niveaux, que ce soit dans sa facture (la photographie superbe de Kasper Tuxen et la mise en scène appliquée de Safinia sont plombés par le montage souvent illogique de Dino Jonsater, et un usage maladroit du score de Bear McCreary) ou même dans ses performances, sondant deux extrémités opposées du spectre de la philosophie d'acteur.
Si Mel Gibson en impose et croque une interprétation tout en discrétion et en dignité, Sean Penn lui, dans une furie " Nicolas Cagienne ", livre une prestation plus maniaque et déroutante, aux nuances parfois risibles.
Une opposition étrange et déséquilibrée (mais forte en barbes blanches) pour un film qui, au fond, l'est tout autant.


Jonathan Chevrier