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[CRITIQUE] : Antebellum


Réalisateurs : Gerard Bush et Christopher Renz
Acteurs : Janelle Monáe, Jena Malone, Jack Huston, Kiersey Clemons, Gabourey Sidibe,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Thriller, Épouvante-Horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h46min.

Synopsis :
L'auteure à succès, Veronica Henley, se retrouve piégée dans un monde effroyable dont elle doit percer le mystère avant qu'il ne soit trop tard.



Critique :


Ils sont rares les thrillers psychologiques, horrifiques ou même sociaux (voire même tout ça en même temps, coucou Jordan Peele et Ari Aster) aujourd'hui, à ne pas voir leur mystère éventé par une campagne promotionnelle au mieux maladroite, au pire totalement à côté de la plaque; très rare.
Antebellum a presque donc un statut de petit miraculé avant même qu'il ne débarque dans les salles obscures hexagonales (il ne sortira qu'en VOD outre-Atlantique), et c'est on ne peut plus salvateur pour sa réception, tant le film du tandem Gerard Bush et Christopher Renz, avait besoin de cet appui conséquent pour mieux dévoiler la jolie petite surprise qu'il incarne; un regard pertinent et prenant sur comment le passé raciste, sadique et esclavagiste du pays de l'oncle Sam, dépeint encore le présent même deux siècles plus tard.
Avec une ambition assez folle - mais pas totalement avec l'habileté qui doit aller avec -, le film utilise l'esclavage comme une métaphore puissante et cohérente de la lutte continue contre le racisme systémique, tout en étant très (trop) bien synchronisé avec le discours ambiant actuel - et une Amérique qui n'a jamais été aussi déchirée.


Solide même si un brin étiré pour totalement convaincre, et usant d'un artifice Shyamalan-esque pour dynamiter son constat existentiel, la péloche ne fait pas dans la dentelle et ce dès une ouverture brutale, qui met tout de suite terriblement dans l'ambiance.
Tout du long, Antebellum articule son intrigue sur deux époques bien distinctes mais intimement liées, et totalement vissées sur une Janelle Monáe incroyablement investie.
La première est au coeur d'une plantation dominée par le sadisme d'une bande de confédérés (dont une diabolique Jena Malone) ou Eden est une esclave qui hésite entre s'échapper - gentiment pressée par une nouvelle venue - et prendre soin des siens, tandis que la seconde, au présent, suit Veronica Henley; une sociologue et auteure qui soutient que le racisme institutionnel est inscrit dans l'ADN de l'Amérique, et qui subit peu à peu une série d'événements étranges et racistes, qui ne dénotent pas tant des brimades sinistres subis par Eden et ses compagnons dans le passé...
D'une brutalité étonnante, le tandem Bush/Renz ne minimise jamais la cruauté de leur vision pour la rendre si ce n'est essentielle, au moins sensiblement marquante (pour preuve un nombre conséquent de scènes symboliques/emblématiques, visant à flatter la rétine avant tout), sans doute parce qu'ils ont pleinement conscience des vacuités d'un script limité - comme de la quasi-totalité de ses personnages - et d'un parti pris certes accrocheur (la connexion entre l'Amérique période Civil War, et une Amérique contemporaine qui n'est pas si loin d'en couver une nouvelle), mais ne s'extirpant jamais vraiment de l'impression tenace d'incarner un épisode rallongé de Black Mirror ou de The Twilight Zone.
Un goût d'inachevé - voire précipité - assez tenace, que vient pourtant contrebalancer une terreur palpable (et pas faite pour tous les publics), une réflexion musclée sur notre nécessité à tirer les leçons de notre passé haineux (spoilers : les récents événements prouvent que nous n'en sommes visiblement pas capable), mais aussi une gestion des artifices horrifiques étonnante, puisque fixée à une réalité historique indiscutable (pourquoi inventer quand l'horreur la plus cruelle et insoutenable, est inscrite dans nos passés communs ?).


Une approche singulière et véritablement louable, certes prévisible et un peu trop rageuse (comme le dernier tiers de Get Out, compréhensible mais presque absurde) qui fait d'Antebellum une expérience unique, certes pas totalement efficace (surtout au vu de son immense potentiel) dans sa juxtaposition de deux époques (on préférerait presque que le film ne se déroule qu'au XIXème siècle), mais qui vaut clairement son pesant de pop-corn aussi et surtout, pour que l'on se penche sur son message troublant.
Point celui qui prône une brutalité plus virulente pour combattre la brutalité, mais bien celle qui montre le racisme systémique comme une sorte de contagion increvable, un virus pandémique dévorant le cerveau et les âmes de générations en générations.


Jonathan Chevrier



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