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[TOUCHE PAS À MES 80ϟs] : #127. Raising Arizona

Copyright 20th Century Fox

Nous sommes tous un peu nostalgique de ce que l'on considère, parfois à raison, comme l'une des plus plaisantes époques de l'industrie cinématographique : le cinéma béni des 80's, avec ses petits bijoux, ses séries B burnées et ses savoureux (si...) nanars.
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios (Cannon ❤) venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 80's c'était bien, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, mettez votre overboard dans le coffre, votre fouet d'Indiana Jones et la carte au trésor de Willy Le Borgne sur le siège arrière : on se replonge illico dans les années 80 !





#127. Arizona Junior de Joel et Ethan Coen (1987)

La règle absolument essentielle à garder en tête, lorsque l'on se plonge amoureusement dans la fantastique et protéiforme filmographie des frangins Coen, c'est qu'il n'y a justement... pas de règles, car tout est possible chez eux, vraiment tout.
Et Arizona Junior, leur second long-métrage, est sans doute, au-delà d'être le plus sous-évalué de leurs canons éclectiques, leur première odyssée loufoque à le démontrer avec une maestria folle et une sincérité désarmante.
De ses références constantes à Ronald Reagan (président connu pour son incapacité à faire la distinction entre fiction et réalité, quitte à volontairement les mêler pour nourrir la politique de son mandat), à sa folie cartoonesque totalement assumée et tout droit sortie des dessins animés Tex Avery, en passant par la satire politique singeant les valeurs de " l'American Way of Life " (tout en pointant du bout de la pellicule, les fausses promesses de l'American Dream, par le prisme des yuppies made in 80's); Raising Arizona en V.O, qui est à la fois tout cela sans l'être - comme tout bon film des Coen -, est de ses séances aussi savoureusement surréalistes que profondément barrées, qui s'amusent avec le folklore américain et qui n'ont jamais peur d'arpenter les limites extrêmes du burlesque le plus pur.

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Fable populaire positivement anarchique dans son influence sur la tendance de la fin des 80's à loucher sur les films familiaux (Baby Boom, Three Men And A Baby, Look Who's Talking), la péloche refuse d'être lié par une convention générique : du film de prison au gangster movie, en passant la comédie malicieuse/vicieuse, le road movie extravagant ou même le western spaghetti; jamais le film n'est engoncé dans un genre en particulier.
Concentré sur un couple de prime abord incompatible, mais fou amoureux l'un de l'autre, le film suit donc H.I (un ex-taulard imbécile heureux et maladroit) et Edwina (attachante ex-flic de l'univers carcéral), qui désespèrent terriblement d'apporter un enfant à leur mariage.
Le hic c'est que Edwina est stérile, et les deux conviennent vite que la seule solution raisonnable pour répondre à leur souhait, est de tout simplement en kidnapper un à ceux qui en ont plusieurs : soit soulagé un escroc/entrepreneur local de l'un de ses quintuplés, qui ne ferait sans doute pas la différence entre un enfant de plus ou un de moins.
Une fois leur méfait accompli, ils se lancent dans une aventure rempli de sensations fortes et d'un humour magnifiquement prononcé, ou la nouvelle famille improvisée est en proie à l'adversité, avant tout et surtout à cause du subconscient de H.I...

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Explorant un terrain qu'ils n'ont pratiqué que trop peu depuis (la comédie à forte tendance OVNI-esque, avec The Big Lebowski, O'Brother et Burn After Reading), les Coen tirent le meilleur parti d'un lieu somptueux (le revers géographique de Fargo) et d'un script en béton armé avec des dialogues fleuris et furieux, pour mieux orchestrer une fuite en avant à la philosophie jouissivement primaire, aussi charmante qu'intemporelle (même au milieu des 80's, le film semblait venir d'une autre époque), et qui n'a de cesse de provoquer l'hilarité la plus sincère chez son public, tout en renversant habilement les stéréotypes (H.I. et Edwina sont finalement les personnages les moins stupides de l'histoire).
Porté par des personnages atypiques et hauts en couleurs, aux partitions exquises (du jeu volontairement excessif de Cage et ses mimiques folles, à la partition déterminée d'Hunter, le duo titre est parfait) jusque dans ses seconds couteaux les plus mineurs (Frances McDormand mais surtout le tandem de taulards William Forsythe/John Goodman), hystérique et d'une humanité chaleureuse, ce délire frénétique ne serait sans doute pas aussi dingue sans la photographie inventive d'un Barry Sonnenfeld au top de sa forme, et qui avait aussi bien usé de la shaky cam sur le follement mésestimé Three O'Clock High la même année (l'un des meilleurs teen movies de l'histoire du cinéma US).

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Une mise en scène effrénée dont l'effort culmine à un véritable sommet de cinéma cartoonesque : la formidable course-poursuite dans un supermarché, ou sous les sonorités géniales de Cartel Burwell (l'un de ses meilleurs scores pour les frangins), un vol de couches n'a jamais paru aussi déglingué et iconique.
Ode frappadingue à la famille et à la difficile quête du bonheur, épousant fougueusement la logique de l'absurde, Arizona Junior dévoile les premières exclamations passionnées de la verve corrosive des Coen, et s'avère une séance on ne peut plus importante, pour quiconque aime aussi bien les frangins cinéastes les plus talentueux de leur génération, qu'un Nic Cage que l'on aimerait bien, justement, retrouver devant leur caméra dans un futur proche...


Jonathan Chevrier

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