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[CRITIQUE] : Tenet


Réalisateur : Christopher Nolan
Acteurs : John David Washington, Robert Pattinson, Elizabeth Debicki, Aaron Taylor-Johnson, Michael Caine, Kenneth Branagh, Himesh Patel, Clémence Poésy, Dimple Kapadia,...
Distributeur : Warner Bros. France
Budget : -
Genre : Thriller, Action, Espionnage.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h30min.

Synopsis :
Muni d'un seul mot – Tenet – et décidé à se battre pour sauver le monde, notre protagoniste sillonne l'univers crépusculaire de l'espionnage international. Sa mission le projettera dans une dimension qui dépasse le temps. Pourtant, il ne s'agit pas d'un voyage dans le temps, mais d'un renversement temporel…




Critique :




Avant même l'arrivée de ce foutu Covid-19, Tenet s'était gentiment installé comme l'un, si ce n'est LE, gros événement de l'année ciné 2020.
Mais la pandémie mondiale en a presque fait une sorte de Saint Graal, de potentiel sauveur des salles obscures, capable de faire revenir en masse dans les cinémas, des spectateurs oscillant souvent entre une méconnaissance totale des sorties récentes et/ou une volonté sévèrement au point mort, de venir découvrir autre chose qu'un gros mastodonte ricain des familles.
Mystérieux et difficilement déchiffrable malgré sa pléthore de bandes annonces riches en images, dont l'importance s'intensifiait à mesure qu'il s'éloignait des salles (le cas inverse d'un The New Mutants en gros), le onzième film de Christopher Nolan, qui s'est toujours échiné à conserver le plus grand secret autour de ses oeuvres, sort donc dans un contexte aussi désordonné et chaotique qu'anxieux à tous les niveaux, et encore plus dans l'univers même du septième art mondial.




À tel point qu'on en oublierait presque, parfois, qu'il n'est juste qu'un film : imparfait, proche d'une oeuvre-somme (mais sans vraiment l'être), tout autant qu'il est ambitieux, grisant, intelligent et savoureusement spectaculaire.
Résolument plus simple que pouvait le laissait présager les attentes les plus démesurés à son sujet - tout en étant suffisamment dense pour ne pas jouer dans la même cour des blockbusters lambda -, Tenet arbore la même approche qu'Inception : une utilisation astucieuse et habile d'un genre (le film de braquage pour celui qui vient de fêter ses dix printemps, le film d'espionnage a forte tendance SF ici), que le cinéaste trompe pour mieux y égrainer ses thématiques familières, saupoudrées d'une bonne dose de réflexions physiques (sans compter l'idée de la quête d'un père capable de tout pour retrouver la chair de sa chair), supputant cette fois que l'on peut changer le monde non plus en voyageant dans le temps, mais en... l'inversant (un artifice d'ailleurs résolument mieux lu à l'écran qu'exprimé à l'écrit).
Semblant tout droit sortie de la plume de Ian Fleming - ou presque - (le film est, sans doute, le 007 que Nolan ne tournera jamais), l'intrigue du film reprend la même structure d'une aventure Bondienne moderne (elles-mêmes, curieux paradoxe, transformées depuis plus d'une décennie par la vision du divertissement populaire apportée par Nolan ou encore Paul Greengrass), de son introduction spectaculaire - une habitude chez le cinéaste - au coeur d'une prise d'otage dans un opéra à Kiev, à la nécessité de stopper les ambitions d'un oligarque/trafiquant d'armes russe (so old school/Guerre Froide), jusque dans les tics inhérents à la saga (gadgets à gogo, wannabe Q, tour du globe so glamour, " Bond girls " à l'écriture fragile,...).
L'astuce qui le démarque des récents récits de 007 réside alors dans ses saillies sciences-fictionnelles, des complications structurelles volontairement évasives dès le départ (on réalisera in fine, que son prologue immersif regorge d'indices clés), et creusant sa fascination viscérale pour le temps (ici moins inéluctable, et modelé pour en faire une arme implacable).




Un concept brumeux et excitant d'inversion et de torsion du temps (qui rappelle évidemment le père de la SF sur le voyage dans le temps, La Jetée, mais aussi plus étonnamment... Deja-Vu de feu Tony Scott et Retour vers le Futur 2 dans sa manière de dupliquer/offrir un effet miroir à son histoire, et la nécessité de résoudre le passé pour rétablir le présent et l'avenir), facile à comprendre (car il est plus alambiqué que complexe, comme le suggère presque son palindrome de titre), qui va avec son lot d'imperfections (des écarts verbeux de personnages qui, comme dans Inception, posent soit toujours les bonnes questions, soient ont toujours des réponses à tout très détaillées), mais qui laisse très vite exploser une vérité essentielle sur les deux heures et demie de métrage : les illustrations de ses inversions sont plus frappantes que la théorie soignée derrière leurs trajectoires.
La méticulosité de l'esthétique et de l'aspect férocement ludique de l'action croquée par Nolan est passionnante (et que dire du score percutant et clinique de Ludwig " Creed " Göransson), comme si le bonhomme se bornait enfin à s'appliquer, autant pour combler ses lacunes (le vrai défaut de la saga TDK est là) que pour compenser les fils lâches et les paradoxes pas toujours adroit de son scénario, et même la gestion moins prégnante des émotions - plus subtiles qu'à l'accoutumée chez lui - et d'empathie sincère envers ses personnages (aussi humains soient-ils).
Ou peut-être, plus simplement pour souligner qu'ils n'ont pas tellement d'importance car comme toute expérience sensorielle et visuelle, ici poussée à son paroxysme (l'IMAX n'est pas qu'un simple gagdet marketing), l'important est l'émerveillement, la claque instantanée que nos mirettes prennent, et non notre esprit («N'essayez pas de le comprendre, mais de le ressentir», conseille très tôt Clémence Poésy au héros titre, un mantra qui peut clairement servir au spectateur).
Tel le prestidigitateur qu'il a toujours été, il concocte alors l'objet cinématographique populaire quasi-parfait, entre la magie simple de l'ancienne école (le concept d'inversion, et plus directement de l'inversion de l'image, plus vieil effet spécial du monde) et celle plus manipulatrice de la nouvelle (susciter le mystère en amont de la séance, pour mieux donner au spectateur autre chose que ce qu'il pensait voir).




Linéaire tout en étant rythmé au cordeau et riche en rebondissements, simpliste tout en étant élégamment exécuté tout du long, il est définitivement plus intéressant de suivre la vague des plaisirs sensoriels de Tenet que d'en déceler son tracé scénaristique chirurgical (l'océan d'informations assené dans un montage foutraque et effréné, est impossible à être assimilé sur une seule séance, et n'est pas totalement nécessaire non plus, aussi contradictoire que cela puisse paraître) et ses défauts évidents (la maladresse de Nolan à rendre ses films toujours trop long en tête), tant il est facile de se laisser enivrer par la rigueur musclée de ses séquences de combats, ou par la beauté éclatante de ses comédiens sculptés dans un marbre Hollywoodien digne de l'âge d'or (autant grâce à la photographie chatoyante Hoyte van Hoytema que grâce aux costumes de Jeffrey Kurland).
Si l'on déplorera une nouvelle fois l'incapacité criante de Nolan à croquer convenablement ses personnages féminins (Elizabeth Debicki, figure Hitchcockienne lumineuse et sous-exploitée, le scénario lui offrant le strict minimum de sentiment et l'enfermant dans un trio romantique émotionnellement rachitique; un comble puisqu'elle se révèle être le moteur du récit), ou même sa manière de ne pas recadrer le cabotinage intense d'un Kenneth Branagh sous vodka (un comble, quand l'excentricité enthousiasmante de Dimple Kapadia, est elle jamais irritante), en revanche, on louera sa propension à faire de John David Washington un héros purement Nolanien (et sans nom), charismatique et mélancolique à la fois, totalement crédible dans le feu de l'action.
Son alchimie avec un Robert Pattinson élégant et amusant - tout en étant capable de garder un certain mystère sur sa personnalité -, proche d'une dynamique de buddy movie (mais sans totalement l'être), est sans aucun doute, l'un des éléments forts du métrage.




Conscient que c'est bien plus la politique de l'image et non de l'esprit, qui imprime durablement la psyché du spectateur lambda d'aujourd'hui dans les salles obscures (et encore plus ceux outre-Atlantique), Christopher Nolan fait de Tenet le blockbuster le plus immersif et spectaculaire de ses dernières années (Fury Road ? Aussi opposés soient-ils), du bigger and louder fait pour exploser les limites de l'écran, de sa facture aux cadres qu'il emploie, de sa puissance physique à son envie de lier le passé (effets physiques et artisanaux) et le présent (effets spéciaux), dans un tout fracassant.
Mais, dans le même temps et plus encore que par le passé (The Dark Knight Rises diront certains), les limites de la " méthode Nolan " sont de plus en plus perceptibles, et le film croule de manière évidente sous le poids écrasant d'un script que les habiletés de sa mise en scène, ont bien du mal à soutenir.


Jonathan Chevrier






Dire que ce nouveau métrage de Nolan était attendu serait un euphémisme. L’après Dunkerque du réalisateur s’est donc concentré sur un scénario fictif et reposant sur des notions obscures de thermodynamique, que les bandes annonces laissaient à peine dévoiler.




Pourtant, dès la première scène, nous voilà plongés dans un déluge de son, d’action et de moyens à en perdre haleine, qui garde le rythme et ne s’essouffle pratiquement jamais durant le premier tiers du film. Pas de doute, la facture Nolan est bien là : des héros taiseux et efficaces, des plans qui semblent très bien s’enchaîner, des décors somptueux sans être écrasants, une impression de froid général. Nous sommes baladés comme le protagoniste -oui, c’est son nom (Nolan fait ainsi un pied de nez à ceux qui lui reprochaient de ne pas caractériser assez ses personnages… puisqu’il n’en fait rien ici) – de ville en ville aux quatre coins de la planète dans une aventure avec l’ambition de sauver rien de moins que le monde. Le duo principal constitué d’un charismatique Robert Pattinson et d’un efficient John David Washington est crédible en paire d’agents experts en tout et n’ayant peur de rien.
C’est ensuite que ça commence à se gâter – un peu -. Le film se perd avec une sous-intrigue amoureuse qui semble bien dérisoire au regard des enjeux en cours, menée par Elizabeth Debicki (qui tire son épingle du jeu) et Kenneth Branagh (qui cabotine avec un faux accent « russe » du plus mauvais effet) qui accuse quelques longueurs. Loin de la puissance suggestive et émotionnelle d’Inception, Nolan ne parvient pas à nous embarquer dans ces méandres-là, avant le grand final quelque peu confus. Le film ne cherche pas à nous faire comprendre ses mécanismes, et comme dans un train fantôme, on est bien obligés de suivre et de sursauter de temps à autres. Aaron Taylor-Johnson peut bien nous expliquer le plan, on n’y comprendra rien à moins de faire pause pour faire un petit schéma. Sans doute aurait-on gagné à expliquer plus tôt le pourquoi du comment du combat inversé, mais il est déjà trop tard pour cela.




Pour peu qu’on se laisse embarquer dans l’entropie inversée des objets et du scénario de Tenet, il se peut que le voyage vous plaise. La conclusion teintée d’actualité peut paraître trop évidente mais ancre le film dans des enjeux plus compréhensibles pour le spectateur. La maîtrise technique impressionne toujours autant, la musique vaut bien un concert en termes de volume (en attendant la réouverture des salles de spectacle vivant !) et le casting reste solide. Quelques séquences franchement impressionnantes justifient à elles seules le prix du ticket, prouvant que Nolan sait encore vraiment comment nous faire plaisir. Et si vous pouvez m’expliquer le final en détails sur le plan physique, je suis toujours preneuse !
Lea 


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