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[FUCKING SERIES] : Ju-On : Origins : L’Art de la gru(d)ge


(Critique - avec un peu de spoilers - de la saison 1)



Il y a deux bonnes décennies maintenant, Hideo Nakata lançait une véritable vague horrifique sans précédent aux quatre coins de l'Extrême-Orient avec Ring, avant d'être copié à toutes les sauces par des péloches arrivant très rarement à son niveau.
Plombé comme Ring, autant par une franchisation à outrance que par un remake ricain lui-même franchisé à outrance (avec un concept bien à part : une franchise de chaque côté du pacifique, aux opus cornaqués par les mêmes réalisateurs...), Ju-On/The Grudge avait déjà tenté - en vain - de renaître de ses cendres cette année, en (re)jouant la carte du reboot avec un casting flambant neuf, et un réalisateur plutôt talentueux à sa barre - Nicolas Pesce; monumentale erreur puisque le film faisait à peine mieux que les suites DTV du premier remake US, un opus insipide et mal fagoté, condamnant en phase terminale autant une J-Horror jadis référentielle, que tout le bien que l'on pouvait pensé du jeune cinéaste (malgré quelques fulgurances visuelles de la part d'un Pesce englué dans une horreur dont la mayonnaise ne prend jamais).

Copyright Netflix

Seconde chance du côté de Netflix en ses premières heures d'été, puisque cette fois on s'attaque aux origines - tout est danq le titre - de la malédiction au coeur de la (trop) riche franchise.
Sur le papier, on avait franchement envie de dire pourquoi pas, tant un retour aux sources d'une horreur nippone aussi rêche que froide, articulée aussi bien autour de l'invisible et de l'audible, que d'une confrontation séduisante et sinistre entre technologie et au-delà, n'est pas le genre de proposition qui se boude facilement, et encore plus gentiment assis - bon, affalé - dans son canapé.
Et puis, quitte à assister au nouvel effort faisandé d'une saga maudite, autant le faire sans trop de frais...
Vitrine en six parties signée Sho Miyake (et logiquement le premier show horrifique originale nippon made in Netflix), qui se rêve comme une mise en abyme palpable sur plus d'une décennie, sur la naissance de la mythologie; la série, qui bénéficie d'une forme et d'une durée plus généreuse (on est loin du petit film fourre-tout et surchargé, qui tente de tout abordé en se ratant à tous les niveaux, mais six épisodes de trente minutes c'est assez light au fond), sent pourtant tout du long comme une collection d'anthologie qui n'a jamais la force ni la cohésion d'un récit global... et qui peine donc à pleinement captiver son auditoire, malgré ses bonnes intentions.
Car ce qu'il y a de franchement admirable dans l'approche de Miyake, c'est qu'il se démarque de tous ses petits camarades précédents en purgeant avec insistance, toutes les dérives et exagérations qui ont gangrené la saga au fil du temps, prônant un réalisme dramatique inédit et une menace progressive et plus cérébrale assez rafraîchissante.
Le hic, c'est que n'arrivant jamais vraiment à développer convenablement son drame familial touchant ni même ses personnages - pas si mal croqués que cela -, le show, conscient que sa durée est trop étriquée pour un tel effort (trop long pour de l'horreur pure, trop court pour l'installer convenablement, à l'instar de The Hauting of Hill House), se perd alors dans une violence volontairement choquante et désagréable, rompant avec l'aspect lisse et discrète qu'elle s'échinait à imposer.

Copyright Netflix

Un sentiment d'ambivalence étrange, qui laisse un bon gros goût d'inachevé, entre le drame trop creux parce que pas totalement développé - mais qui à la belle intention d'étirer la mythologie sans ressasser la recette facile de la franchise -, et une horreur gore/macabre mais qui attire l'attention que par intermittence; remplaçant tout ce qui a fait l'identité de la saga, par quelque chose d'autre qui ne semble jamais être décidé à pleinement pointer le bout de son nez.
Pas fondamentalement mauvaise sans pour autant être réussite non plus, Ju-On : Origins persiste la malédiction Ju-On sur le petit écran, et s'est peut-être plus triste à voir qu'un simple bout de cinéma lyophilisé et opportuniste, produit pour un frisson facile par Hollywood...


Jonathan Chevrier