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[CRITIQUE] : The Nose or The Conspiracy of Mavericks

© School - Studio “SHAR”

Réalisateur : Andrey Khrzhanovsky
Acteurs : -
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Animation.
Nationalité : Russe.
Durée : 1h29min.

Synopsis :
Pendant la première moitié du XXe siècle, Staline fit régner la terreur en Russie. Le film décrit cela en combinant des paysages, des biographies et des chefs-d'oeuvre de peintres, de compositeurs et d'écrivains russes qui faisaient figure, durant cette période de totalitarisme, d'artistes d'avant-garde.



Critique :






C’est un véritable hommage à l’art russe d’avant-garde que nous offre Andrey Khrzhanovsky dans un mélange d’animation grouillant d’informations et de richesse.

Il n’avait pas réalisé depuis 2009, avec Room and A Half, jamais sortie en France. Son nouveau film, The Nose or The Conspiracy of Mavericks s’inscrit dans une programmation du Festival d’Annecy, se déroulant en ligne, d’une grande diversité tant au niveau des récits que des nationalités représentées. C’est une véritable expérience qui nous est offerte, culturelle et visuelle, où l’art russe est mis à l’honneur. Littérature, musique, cinéma, Andrey Khrzhanovsky les met en scène dans une narration disparate découpée en trois “rêves”. Le film déroule un propos politique percutant grâce à l’opéra de Dmitri Chostakovitch, adapté de la nouvelle Le Nez de Nicolas Gogol, sous le règne totalitaire de Staline. 

© School - Studio “SHAR”

Le film s’ouvre avec des images en prises de vues réelles, dans un avion où les passagers regardent chacun un film. De Harry Potter au Cuirassé Potemkine, c’est une métaphore peu subtile mais puissante qui se dégage de ces plans : la liberté de créer et de voir des œuvres différentes, parce que la culture se doit d'être aussi diversifiée que possible. Ce n’est pas un hasard si le réalisateur choisit le figure de Staline comme antagoniste, quand on sait qu’il s’est efforcé dans son régime totalitaire d’imposer un art russe traditionnel, lisse et dénué d’audace. C’est par les images, par l’art que la liberté prend forme nous dit Khrzhanovsky quand l’animation commence, par les petits écrans de l’avion. La mise en abîme est double ici : nous voyons le film par écran interposé, tout en étant témoin, lors de courtes séquences, du travail qu’effectue les animateurs sur le plan que nous sommes en train de visionner.
The Nose or The Conspiracy of Mavericks est portée par la musique de Dmitri Chostakovitch. Le premier “rêve” est même une version en papier animée de l’opéra Le Nez du début à la fin, mélangeant séquences scéniques et coulisses. Le personnage principal cherche son nez inlassablement car il n’est plus comme les autres, il n’a plus la petit bosse sur le visage. Il se démarque, trop à son goût. Cette première partie est ponctuée de références, russe principalement, mais nous pouvons voir, dans le visage blanc et cadavérique du personnage une réinterprétation du tableau Le Cri d’Edward Munch. La seconde partie nous montre Staline et Dmitri Chostakovitch se liant d’amitié. Staline n’y connait rien en musique et aide Chostakovitch à monter son opéra grâce aux ouï-dire de ses généraux. Il finit par aller voir son opéra, Le Nez et qualifie la musique de cacophonie, de fouillis musical. Ses généraux sont bien sûr obligés d’aller dans son sens. Le troisième acte est un procès, pour condamner la musique qui ne serait pas aux normes (comprenez qui prendrait des libertés) avec les goûts de Staline, formant une dictature dans l’art : un art uniforme. Il se finit par des actes de véritables procès, par des photographies de prisonniers, par les noms des artistes d’avant-garde placés sur des avions parsemant le ciel, délivrant ainsi un catilinaire contre la politique de Staline, mais aussi contre le pouvoir actuel (avec un bref passage d’une interview au sujet de la Crimée).

© School - Studio “SHAR”

The Nose or The Conspiracy of Mavericks peut être difficile d’accès, à cause de ses références marquées, du ton déstabilisant qu’impose sa structure narrative et de l’information constante qui nous arrive par la rétine, chaque plan comportant son lot de symboles et métaphores. C’est l’Histoire que nous montre Andrey Khrzhanovsky, celle des représailles, de l’injustice, d’artistes bafoués. Celle de l’art plus vivant que jamais, qui réside dans le mouvement perpétuel d’un avion en plein vol. 


Laura Enjolvy 


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