[FUCKING SERIES] : Kidding saison 2 : L’importance d’être honnête
(Critique - avec spoilers - de la saison 2)
Rien ne nous a préparé à la claque qu'incarnait la première saison de la sublime Kidding et force est d'avouer que, même conscient de cette vérité (et stupidement armé avec l'idée qu'il était supposément impossible de faire mieux), il est bien difficile également ne pas admettre que la seconde salve d'épisodes du show, plus structurée et rédemptrice, s'avère peut-être encore plus puissante et virtuose.
S'il était difficile de vivre avec soi-même dans les premiers épisodes, le véritable mojo de cette deuxième saison est bien l'importance d'être honnête, que ce soit avec nous ou les autres.
Forte de son équilibre précaire mais brillant entre une mélancolie fantaisiste et une absurdité burlesque jamais plombante, la saison 1 était une véritable cocotte-minute à l'image de son héros, Jeff Pickles, animateur d'une émission pour enfants coincé au milieu d'une dépression nerveuse, après la mort de l'un de ses fils jumeaux.
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S'il a ardemment essayé de trouver un moyen de pleurer et de faire son deuil, même devant les caméras - il a toujours été bloqué par son père surprotecteur et soucieux de son entreprise -, en cherchant un exutoire sain pour ses émotions, il laissera in fine exploser sa colère et sa misère émotionnelle en s'en prenant au nouveau compagnon de son ex-femme, Jill, en l'écrasant avec son PT Cruiser (c'est cruel mais incroyablement ironique à la fois).
La saison 2 reprend donc juste quelques secondes après l'accident, Jeff appelant à l'aide tout en appuyant l'hypothèse culottée que tout cela n'était qu'un accident.
Avec une certaine facilité difficilement condamnable, la série aurait pu continuer à s'appuyer sur le traumatisme de Jeff en l'obligeant à garder un contrôle de façade pour garder les siens près de lui, laissant gronder un orage qui ne pouvait éclater qu'encore plus fort; mais elle choisit tout simplement - et heureusement - de prendre le contre-pied de tout cela, en laissant Jeff affronter le désastre de sa vie pour mieux l'atténuer, en le laissant face à ses erreurs, ses défauts et son chagrin.
Et c'est aussi magnifique que passionnant et bouleversant à découvrir, puisque avant toute chose, Kidding n'use pas de la manipulation émotionnelle pour atteindre nos petits coeurs fragiles, mais elle s'échine de tout son long à croquer la vérité qui habite de vraies personnes possédant de vraies problèmes et qui apprennent à vivre avec, sans se sentir obligés de devoir les régler coûte que coûte pour avancer - ou en l'occurrence, nourrir l'intrigue.
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Car même si il part dans des délires totalement improbables et WTF-esque à souhait (Ariana Grande en fée des cornichons, une danse avec le Dalaï Lama,...), le show est avant tout et surtout, la vie dans ce qu'elle a de plus simple et difficile.
Extrêmement vif et créatif dans sa capacité à conter la spirale infernale - mais rédemptrice - qui frappe Jeff et ses proches, cette nouvelle saison ne perd jamais d'objectif l'idée que l'honnêteté est la clé de tous les problèmes, et que notre héros, plus acculé que jamais (même quand il accumule les acceptations de ses fautes et péchés, et qu'il doit s'adapter à elles tout en aidant ses proches à en faire de même), n'a que pour unique but de guérir d'aider sa famille après une perte indicible, qui les marquera toute leur vie.
En complète mutation au fil des épisodes (mélange hybride mais constamment cohérente entre le buddy movie, le thriller tendu, le drame familial déchirant et le trip cartoonesque), la série trouve le moyen d'être un terreau encore plus propisce à Carrey, véritable colonne vertébrale du récit, de peaufiner ce qui est son plus beau rôle à ce jour, bien aidé par les partitions habitées de la follement méconnue Judy Greer (qui vaut tellement mieux que les pauvres seconds rôles offert par Hollywood), mais aussi par une jeune Juliet Morris (la révélation du show), tout bonnement incroyable en nièce-sociopathe hilarante, et un Cole Allen touchant en enfant divorcé qui aspire à voir ses parents réunis.
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Puissante, universelle et indiscutablement unique, cette saison 2 égale et surpasse même d'une courte tête son illustre aîné, et force est d'avouer que si le couperet de son audimat fragile venait à frapper, elle incarnerait une fin résolument parfaite au parcours intime de Jeff Picole, tant elle semble avoir survoler avec maîtrise tout le spectre du chagrin et de la guérison liées au deuil et à la dépression, le tout dans un mélange fantasque de fantaisie, de sincérité et de mélancolie.
Avec ou sans troisième saison, Kidding est sans contestation possible, l'une des plus belles créations télévisées de l'histoire de la télévision US, mais on espère intimement que Showtime la laissera revenir encore une fois, par amour pour l'immense Big Jim...
Jonathan Chevrier