[Y-A-QUOI A LA TELE CETTE SEMAINE ?] : #59. Semaine du 8 au 14 septembre 2019
Avec le retour du mois de septembre et un hiatus de quelques semaines, Y-a-quoi cette semaine à la télé ? se fait une petite beauté avec une nouvelle formule encore plus riche en cinéma. Chaque semaine je vais continuer à faire — pour vous — le tour des programmes TV en extirpant de tout cela une offre cinématographique autour de trois œuvres. Mais, je vais aussi vous proposer des contre-programmations ainsi que des secondes parties de soirée pour les cinéphiles insomniaques.
Semaine du 8 Septembre au 14 Septembre
Dimanche 8 Septembre.
Les Figures de l’ombre de Theodore Melfi sur France 2.
Katherine Johnson, Mary Jackson et Dorothy Vaughn, trois scientifiques afro-américaines qui ont permis aux États-Unis de prendre la tête de la conquête spatiale, grâce à la mise en orbite de l’astronaute John Glenn. Maintenue dans l’ombre de leurs collègues masculins et dans celle d’un pays en proie à de profondes inégalités, leur histoire longtemps restée méconnue est enfin portée à l’écran.
De sa facture classique, et clairement pensée comme un film à Oscars, Les Figures de l’Ombre s’avère exceller dans ce domaine. Dans une année ayant célébré le premier homme sur la lune, le long-métrage de Theodore Melfi vient surligner que cet exploit n’aurait pas était possible sans ces femmes de l’ombre. Touchant sans être bouleversant, tendre sans être mièvre, drôle sans être parodique; l’œuvre étonne par sa sincérité, par sa pédagogie, mais surtout par le portrait qu’elle dresse de ces femmes qui ont tant donné à leur pays et qui pourtant ont terminer dans les limbes de l’Histoire. Ce film apparaît dès lors comme nécessaire et dans le climat actuel l’appellation politique lui scie à merveille.
Mais aussi...si vous n’êtes guère friand de calcul, d’Histoire ou de conquêtes spatiales, Arte propose à 21 h le thriller politique Les Marches du Pouvoir réalisé par George Clooney. Adaptation d’une pièce de théâtre de Beau Willimon — a qui l’ont doit House of Cards — le film nous fait suivre Mike Morris (George Clooney); un gouverneur favori à l’investiture démocrate et son conseiller de campagne Stephen Meyers (Ryan Gosling) qui va vite plongé dans les eaux troubles de la politique. Sorte de thriller où viennent s’immiscer des genres tels que le western, Clooney signe un long-métrage passionnant qui s’inscrit quelque part entre Stone et Pakula.
Pour les somnambules...après Les Figures de l’ombre, France 2 continue sa soirée cinéma avec le culte, Alien. Réalisé par Ridley Scott, le film met en scène Ellen Ripley (Sigourney Weaver) et l’équipage du Nostromo alors qu’il découvre un signal sur une mystérieuse planète. Véritable orfèvrerie de SF où vient s’immiscer le sursaut de l’horreur, Alien est une claque qui continue à provoquer toujours autant d’angoisse chez le spectateur.
Lundi 9 Septembre.
Pas de Printemps pour Marnie d’Alfred Hitchcock sur France 5.
Mark Rutland sait qu’à chaque nouvel emploi Marnie Edgar déleste ses employeurs. Intrigué par son comportement et attiré par sa fascinante beauté, il l’engage tout de même comme secrétaire-comptable dans sa maison d’édition. Un jour, la jeune femme s’enfuit avec la caisse. Mark s’aperçoit du vol et donne le choix à Marnie entre le mariage ou la dénonciation à la police.
Trop souvent Pas de Printemps pour Marnie est relégué dans les œuvres mineures du maître du suspens, quelle grossière erreur. Le cinéaste y délaisse la frénésie de ses thrillers habituels, il plonge dans les méandres de l’esprit. En cela, il renoue avec le colossal Sueurs Froides, en y injectant une froideur inattendue. L’héroïne hitchcockienne devient plus torturée que jamais, le réalisateur parvient; dans la rigidité de l’époque a imbibé sa pellicule d’une noirceur quasi inédite où l’horreur se trouve est dans les traumas d’une vie et non dans le sang d’un meurtre. Grand chamboule-tout à l’audace monstrueuse, Pas de Printemps pour Marnie est bien loin d’être un film anecdotique, il est au contraire l’un des plus essentiels du maitre. Son dernier mastodonte cinématographique.
Mais aussi...alors qu’il est plein tournage pour son prochain film, Tenet, TMC reprogramme Batman Begins de Christopher Nolan. Premier volet d’une trilogie qui aura marqué un virage dans le genre du superhéros. Dénué de toute infantilisation, Nolan éviscère le Batman pour autopsier les traumas de Bruce Wayne. Intime et sombre, tout en étant spectaculaire, il fait renaître un mythe de ses cendres avec une splendeur inédite.
Une envie de légèreté ? N’hésitez pas à vous mettre sur C8 à 21 h pour Le Diable s’habille en Prada. Les coulisses de la mode croquées avec un humour acide s’articulant autour de répliques piquantes mises dans la bouche d’une Meryl Streep jouissive en ersatz d’Anna Wintour dont chaque mimique est un éclat de rire.
Jeudi 12 Septembre.
Le Pacte des Loups de Christophe Gans sur NRJ12
1766, une bête mystérieuse sévit dans les montagnes du Gévaudan et fait de nombreuses victimes, sans que quiconque puisse l’identifier ou la tuer. L’affaire prend rapidement une dimension nationale et porte atteinte à l’autorité du Roi. Le chevalier Grégoire De Fronsac, est alors envoyé dans la région pour dresser le portrait de la bête. Il est accompagné de l’étrange Mani, un indien de la tribu des Mohawks. Au cours d’une soirée donnée en son honneur, Fronsac fait la connaissance de Marianne De Morangias ainsi que de son frère Jean-François, héritiers de la plus influente famille du pays. Fronsac se heurte bientôt à l’animosité des personnages influents de la région.
Christophe Gans est un réalisateur trop rare, le pauvre accumule les difficultés pour mener à bien un projet, en témoignent les échecs successifs de ses adaptations de Fantomas, 20 000 lieues sous les mers ou Corto Maltaise. Il faut dire que le cinéaste tient à secouer la rigidité du cinéma français, Le Pacte des Loups s’inscrit dans cette démarche. Budget monstrueux pour une œuvre qui s'efforce de créer un genre peu répandu dans l’hexagone : le blockbusters à la française. Film somme qui vient grappiller ses inspirations dans des genres tels que les westerns américains, l’épouvante européenne ou les films d’arts martiaux asiatiques. Le Pacte des Loups est une œuvre immense, palpitante, prolifique dont émanent des images sublimes. Un acte de foi qui aurait pu lancer une nouvelle ère pour le cinéma français, cela ne sera pas le cas.
Mais aussi...TF1SeriesFilms propose Vol 93 de Paul Greengrass, réalisateur de la majorité des Jason Bourne. 11 septembre 2001, 4 avions sont détournés par des terroristes, 3 atteindront leur cible, pas le vol 93. Ici, point de lyrisme, l’œuvre puise sa puissance dans son approche quasi documentaire filmant les événements en temps réel. Greengrass n’a pas besoin de souligner l’émotion elle vient tambouriner en vous, elle prend aux tripes et ne vous quitte pas un instant. En d’autres termes ? Dévastateur. Dérangeant. Indispensable.
Thibaut Ciavarella